Le 17 mars dernier avait lieu la rentrée montréalaise du spectacle À mains nues d’Émile Proulx-Cloutier. Et ç’a été un beau grand voyage. L’auteur-compositeur-interprète m’a certes touchée avec des interprétations senties de pièces tirées de ses deux opus Aimer les monstres et Marée haute – je pense entre autres ici à Petite valise, Maman et Force Océane – et il a réussi un tour de force en me faisant être complètement attentives à un bon nombre de pièces inédites. Voulant créer d’abord un spectacle, puis plus tard, un album, Émile nous a offert 40 % d’œuvres complètement neuves. Ç’a été un laboratoire vivant où l’on a senti l’homme vibrer. Oui, il était là pour passer certains messages de haute importance (sur la dérive climatique et sur les droits bafoués des peuples autochtones, entre autres), mais il était aussi sur scène pour s’amuser, et pour amuser un public qui, on va se le dire, semblait conquis d’avance.
J’ai été pendue aux lèvres de ce grand conteur jusqu’à la dernière pièce du rappel, Kid, qui est ma préférée de son répertoire. Un show à vivre pour se sentir exister.

Des nouveaux spectacles d’humour achevés et tordants, il en pleut ces temps-ci! Cela dit, lorsqu’on a envie de se faire brasser la cage le temps d’une soirée et de ressortir de la salle avec l’envie de pousser certaines réflexions plus loin, c’est vers Mes sentiments, la nouvelle création de Virginie Fortin, qu’il faut se tourner. Mariant une écriture incisive et brillante à une livraison précise et à un indéniable talent d’improvisation, l’humoriste offre une performance qui frôle la perfection. J’y retournerais simplement pour l’entendre parler de Marguerite, sa fille qu’elle n’aura jamais. Courez-y (pour vrai)!

C’est en ayant elle-même vécu la «seconde de trop» dans un milieu qui la consumait que l’ ancienne recherchiste et productrice télé Marie-Pierre Duval a eu l’inspiration pour ce premier roman. Je vous mentirais si je ne vous disais pas d’emblée que je me suis reconnue en Marie, le personnage principal de ce livre. Un travail prenant, une vie familiale mouvementée, le bruit constant et angoissant du téléphone intelligent qui nous rend tous et toutes joignables 24/7 ou presque; ça fait beaucoup. Et d’un coup, Marie s’effondre dans les toilettes du bureau – crise de panique monstre – pour ne plus jamais y retourner. Puis, elle entame une immense quête, soit celle de tenter de comprendre sa chute. Je vous laisse sur deux phrases de ce roman qui me hantent encore: «Pour redevenir libre et retrouver sa vie, il faut savoir déplaire.» et «Une preuve que rien n’est tracé d’avance, et le reste de la vie peut-être une page blanche.» Une lecture hautement libératrice.

Éditions Stanké, 30 $.

Comme il en va de notre responsabilité – et je dirais même de notre devoir – de s’éduquer personnellement et collectivement sur la réalité des peuples autochtones, l’émission radiophonique Kuei! Kwe!, animée par Mélissa Mollen Dupuis, est un must hebdomadaire. Je vous recommande d’entrée de jeu d’aller écouter en rattrapage l’épisode du 19 mars dernier. Au menu: Natasha Kanapé Fontaine parle de son rapport avec ses cheveux en tant que femme autochtone et de sa participation au collectif de 10 femmes «Les Audacieuses» qui se feront toutes raser la tête le mois prochain pour amasser des fonds pour Leucan; Samian revient sur la polémique entourant sa non-participation au Festival international de la chanson de Granby; et Scott-Pien Picard présente son nouvel album, Pekuaiapu («celui qui ouvre le chemin»). Promis que cette écoute vous donnera envie de replonger dans les anciens épisodes.

KUEI! KWE!, le samedi de 20h à 21h ou offert sur la plateforme OHdio.