Style de vie
Musique: 10 artistes québécois à découvrir
À la découverte de 10 artistes québécois qui nous permettront de renouveler nos listes d’écoute et, peut-être même, notre regard sur le monde.
par : Dominic Tardif- 25 mars 2021

BACKXWASH; APAISER ET NOURRIR SA COLÈRE
En remportant l’automne dernier le prix Polaris du meilleur album canadien de l’année pour God Has Nothing To Do With This Leave Him Out Of It, Backxwash devenait la première femme trans à recevoir cette prestigieuse récompense. Une victoire historique, qui ne serait qu’à moitié réjouissante si sa musique n’était pas aussi puissamment rageuse. Le rap a rarement autant été chargé de l’énergie féroce du punk que sur ces 10 brûlots comprimés en moins de 23 minutes.
Née en Zambie, Ashanti Mutinta quitte l’Afrique au tournant de l’âge adulte afin de se soustraire à l’oppression d’une famille conservatrice et imagine depuis un rap atomique, pourfendant toutes les formes d’entraves placées sur le chemin de quiconque embrasse une identité dite hors norme. On le garantit: aucune forme de colère ne saurait résister à une séance d’écoute – à fort volume! – de Backxwash, dont on sort à la fois apaisé et revigoré.
ANACHNID; APPRIVOISER SES LOUPS
Un capteur de rêves est traditionnellement un objet sacré retenant les mauvais rêves hors de la chambre de son occupant, bien que sa forme rappelle aussi la toile de cette créature mal-aimée qu’est l’araignée. Voilà le symbole puissamment polysémique sous le signe duquel s’épanouit la ténébreuse musique d’Anachnid, dont l’album Dreamweaver agit lui aussi à la manière d’un capteur de rêves, comme une sorte de filtre protecteur qui nous permettrait d’observer la violence du monde, avec le précieux recul de la connaissance de soi et de la juste colère.
D’origine oji-crie et micmaque, Anna-Khesic Kway Harper appartient à une génération d’artistes autochtones qui arriment la culture traditionnelle de leurs peuples aux sonorités de la pop mondiale (dont celles du trap, un sous-genre du hip-hop issu du sud des États-Unis). Il n’est ainsi pas interdit de croire que le loup qu’on entend dans Animism est aussi un peu celui auquel son parrain et sa marraine lui ont jadis appris à répondre en chantant afin qu’il ne s’approche pas trop d’elle. Dialoguer avec le danger afin de le tenir à distance? Et s’il y avait une leçon là-dedans?
CRI; FAIRE LES FOUS N’IMPORTE OÙ
Fous n’importe où, c’est le titre de l’inoubliable chanson de Daniel Bélanger que revisitait Charlotte Cardin en 2019 avec l’indispensable concours du créateur de musique électronique CRi. Savoir lâcher son fou n’importe où: tel est l’un des nombreux apprentissages qu’on a faits à l’arrivée de 2021, au terme de neuf mois durant lesquels il aura fallu se faire à l’idée de transformer nos salons en pistes de danse.
Des circonstances proverbialement exceptionnelles pour lesquelles le premier album de Christophe Dubé, alias CRi, semble avoir été spécialement conçu, tant cette conjugaison de pulsations irrésistibles et de mélodies spleenétiques traduit à la perfection notre blues pandémique, tout en contribuant à nous en soulager. Ce disque, intitulé Juvenile, révèle paradoxalement un artiste mature, qui a la sagesse d’espérer que la rencontre avec l’autre demeure possible, comme le chante sur Signal son héros musical absolu, un certain… Daniel Bélanger!
LAURENCE-ANNE; VOIR LA VIE EN MUSIQUE
«Ce qui est un peu cocasse, c’est que l’album a été composé la semaine avant que tout s’arrête», confie Laurence-Anne au sujet de sa retraite créative de mars 2020, dans le confort d’une «petite maison dans la vallée», au cœur du paysage enneigé de Marsoui, un village de la Gaspésie. «Dans mon appartement, je n’ai pas nécessairement la concentration pour composer. J’ai besoin de me retrouver seule, dans ma bulle, de ne pas sortir de la semaine. À Marsoui, si je voulais composer jusqu’à 3 h du matin, je pouvais le faire.»
L’été venu, elle se pointe en studio avec, sur le nez, des lunettes roses. «Mes musiciens et moi, on s’est dit: “Voici les lunettes de la Musivision.” Au début, c’était juste une joke, ce mot-là, mais plus j’y pensais, plus ça avait du sens.» Pourquoi? Parce que les synthétiseurs omniprésents plongent l’album dans une ambiance rétrofuturiste et parce que la musique, comme ces lunettes roses, teinte sans cesse le regard de Laurence-Anne sur l’existence, en l’aidant à transcender les tristesses d’hier. «Oui, on pourrait dire que je regarde toujours la vie à travers les lunettes de la musique.»
Elle lancera son deuxième disque, Musivision, le 23 avril.
LOUIS-ÉTIENNE SANTAIS; PIANISTE DE RÊVE(S)
La nuit, dans le demi-sommeil cotonneux de l’entre-deux-mondes, parfois les idées – douces ou anxiogènes – se bousculent à la porte de notre cerveau. C’est du moins ce que vit régulièrement le pianiste et insomniaque Louis-Étienne Santais qui, plutôt que de rester blotti sous l’édredon à compter les moutons, a pris l’habitude de filer vers son studio pour sublimer grâce aux touches de son piano ses longues heures sans dodo.
Son premier album, Reflection I, ouvre une fenêtre sur les méditations d’un rêveur radieux, dans un mode néoclassique ayant l’élégance de nous maintenir en apesanteur, à la frontière de l’éveil et de l’onirique. Pas étonnant que sa berceuse pour adultes contemplatifs, Augustines, ait franchi la barre des 4 millions d’écoutes sur Spotify. À propos de la nuit: le musicien révélait récemment, avec la chanteuse Ghostly Kisses, une céleste relecture de J’ai demandé la lune, d’Indochine.
LUCILL; COMPAGNON D’ERRANCE
Vous avez dans votre vie quelqu’un qui ne cesse de répéter que de la bonne musique, il ne s’en fait plus? Nous avons pour elle ou lui un remède infaillible baptisé Lucill. C’est le nom du projet musical de Raphaël Bussières, qui a lancé en septembre dernier Bunny. Ce premier album, réalisé par Francis Mineau (batteur de Malajube), ressemble à une sorte de jeu de Cherche et trouve pour mélomanes avertis tant il regorge de clins d’œil à des icônes des années 1980 et 1990 (comme The Cure ou Weezer).
Mais Bunny est surtout un disque capable d’épouser avec grâce vos longues promenades comme vos dimanches matins duveteux, que bercera de sa voix diaphane notre jeune homme cafardeux. Concluons en empruntant une phrase à l’auteur-compositeur Dumas avec qui il a, pour le meilleur, beaucoup en commun: «C’est le bonheur quand j’erre» au son de Lucill, dans ma tête ou dans la ville.
NAYA ALI; À VIVE ALLURE
«You ain’t never seen another like me», lance Naya Ali avec une assurance bétonnée sur Get It Right, déclaration d’intention explosive tirée de son album Godspeed: Baptism (Prelude). Simple fanfaronnade, typique de la rhétorique hip-hop? Quiconque a tendu l’oreille à son débit infaillible devra admettre qu’elle se contente ici d’affirmer la pure vérité: la jeune histoire du rap québécois compte peu de femmes aussi magnifiquement frondeuses, dont la confiance tient de l’avertissement-à-prendre-pour-argent-comptant plutôt que de la poudre aux yeux.
Cette Montréalaise née en Éthiopie se met au rap dès l’adolescence, puis le délaisse au début de la vingtaine pour se consacrer à une carrière en marketing, jusqu’à ce que l’appel de la rime se fasse à nouveau trop urgent. Un changement de cap contre lequel un orienteur l’aurait probablement mise en garde, mais que récompensait en janvier dernier l’important Prix de la musique noire canadienne. On n’avait jamais vu une personne comme elle, non, et pourtant, on ne saurait plus s’en passer.
SOPHIA BEL; PRINCESSE FUNESTE
À ce stade-ci de notre rapport à la technologie, presque tout le monde a déjà vécu pareille humiliation: vous échangez des messages agréables avec un prétendant ou une prétendante, vous réfléchissez peut-être même déjà dans le secret de votre monologue intérieur au nom que porteront vos enfants, puis… silence complet. Plus aucune nouvelle de votre correspondant, soudainement devenu muet.
Sophia Bel venait tout juste de se faire ainsi «ghoster» lorsqu’elle a créé avec son camarade CRi You’re Not Real You’re Just a Ghost, extrait défoulatoire de Princess of the Dead, Vol. II, qui arracherait assurément un sourire de connivence à Avril Lavigne. Le minialbum signale d’ailleurs la résurgence de plusieurs textures sonores associées aux années 1990 et 2000 (époque bénie où il était beaucoup plus difficile de «ghoster» quelqu’un!). Trip-hop, drum & bass, pop-punk: la funeste princesse emprunte au passé, avec la conscience qu’il n’y a rien de plus intemporel que de cracher ce qu’on a sur le cœur.
SORAN ORAN; DÉSARMANT AUTODIDACTE
Lors de sa participation à La voix en 2016, Soran est parvenu à insuffler une âme nouvelle à un classique aussi usé que Hotel California, preuve des merveilles que peuvent accomplir ses cordes vocales. «Ce jeune homme peut vraiment tout chanter!» C’est ce qu’on s’est exclamé en avril 2020 lorsqu’il a élaboré une ritournelle – authentiquement efficace! – avec des commentaires que ses fans avaient laissés sous une publication Instagram (une de ses scènes de choix, tout comme TikTok).
Reste que c’est en octobre dernier qu’on a réellement pris la mesure de l’artiste désarmant qu’est Soran en visionnant le clip d’Until The Day I Die, une visite de la maison de son enfance, que sa mère avait achetée sur la Rive-Sud à son arrivée du Japon. La pièce, elle, se déploie comme une promesse faite à sa regrettée maman de toujours honorer sa mémoire, de toujours l’aimer. Larmes assurées. Un premier album serait en chantier.
ZACH ZOYA; IL RAPPE ET… CHANTE!
«Je vous parle d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître»: celui où il était de bon ton de ridiculiser les rappeurs en prétextant que s’ils jasent sur un rythme, c’est parce qu’ils ne savent pas chanter. Une mesquinerie que Zach Zoya réduit à néant dès qu’on l’entend pousser la note sur Pillz, une ballade chaloupante tirée de Spectrum, le premier minialbum de ce Rouynorandien, fils d’une mère québécoise et d’un père sud-africain ayant fui l’apartheid pour l’Abitibi.
Vous avez un vieux 2 $ en papier à parier sur le MC local le plus susceptible de se tailler une place dans les palmarès internationaux? Placez-le sur Zoya, qu’on a souvent surnommé «le Drake québécois», une lourde comparaison, qui en dit aussi long sur l’ambition fièrement revendiquée du principal intéressé que sur le richissime potentiel des morceaux de celui qui, à l’instar de son compatriote abitibien Raôul Duguay, sait tout à la fois chanter la pomme et hypnotiser grâce à son flow d’une étourdissante vélocité.
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