J’ai fait le tour de mon historique lubrique et j’ai réalisé que tous les hommes que j’ai aimés ont d’abord mis leur désir entre mes mains. Avant de poser le moindre geste, ils ont nommé leur envie. C’était ensuite à moi d’en faire ce que je voulais.

«J’ai vraiment le goût de t’embrasser en ce moment.»

«Mon plan idéal, ce serait de te ramener chez moi ce soir. T’en penses quoi?»

«Est-ce qu’on peut s’avouer qu’il y a une tension sexuelle entre nous? On fait quoi avec ça?»

«Dans 10 secondes, à moins que tu me dises que ça ne te tente pas, je vais mettre ma main dans tes pantalons, OK?» (Celle-là me fait encore rire.)

Il n’y a rien de plus intense que les secondes qui s’écoulent entre le moment où quelqu’un révèle avoir envie de vous et celles où, avec un enthousiasme commun, vous vous touchez enfin. L’attente, tel un délice. La vulnérabilité, l’attirance confirmée, la douce certitude que ça va se passer, l’appétit… Le désir nommé fait de la magie.

«Si tu veux coucher avec quelqu’un et que tu juges que c’est réciproque, tu n’as qu’à le lui dire!» C’est ça, le conseil que j’ai donné à mon ami. Mais à une époque dans laquelle les enjeux intimes font tragiquement la manchette, j’ai pensé que ce serait bien de m’informer auprès d’une véritable experte.

Geneviève Boily réalise présentement sa maîtrise en sexologie à l’UQAM. Pour son mémoire, elle a entrepris de jeter les bases de ce que serait une séduction féministe. Comment fait-on pour séduire en toute égalité? Au fil d’entrevues menées auprès de femmes hétérosexuelles, de lectures et de recherches, Geneviève a commencé à voir des réponses se profiler…

«Il y a deux gros enjeux: l’agentivité sexuelle et le consentement, dit-elle. L’agentivité sexuelle, c’est l’idée que, si on a envie d’avoir un comportement sexuel, on soit à l’aise de le faire. On maîtrise son désir, ses relations et son propre corps. Ensuite, on ne sait pas toujours si on est dans un rapport de séduction ou non et, souvent, il y a de l’alcool en jeu quand on se pose ce genre de question, ce qui implique une inégalité de pouvoir. Le consentement viendrait diminuer cette ambigüité-là, car il s’agit de demander explicitement une permission à la personne qui nous attire.»

C’est tout simple, dit comme ça! Mais il reste du chemin à faire avant de démocratiser l’idée qu’une femme est responsable de sa sexualité et que le consentement est aussi sexy qu’obligatoire. Notamment parce que notre façon de «cruiser» s’inscrit dans de vieilles habitudes sexistes, comme le fait de croire qu’il y a des chasseurs et des chassées…

«La séduction comprend une panoplie de scripts sexuels, des scénarios écrits depuis belle lurette, me précise Geneviève. Et on se conforte dans ces scripts-là parce qu’ils sont hypertraditionnels et hétéronormatifs! Pourtant, la base du consentement, c’est juste le respect et l’écoute de l’autre. Ça, et oser être soi-même dans la séduction. On perd de notre authenticité en essayant de répondre à un script sexuel… Et si on était juste nous-mêmes?»

Alors, je rectifie mon conseil, cher ami! «Si tu veux coucher avec quelqu’un et que, grâce à l’écoute respectueuse dont tu fais preuve, tu juges que c’est réciproque, tu n’as qu’à le lui dire! En étant toi-même. Parce que la vulnérabilité, c’est sexe.»

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