Je suis devenue agente de bord à l’âge de 19 ans. Je considérais ce métier depuis peu, attirée par son côté glamour et la possibilité de me la jouer globe-trotter dans un uniforme adorable, et je me suis lancée dans l’aventure sans trop y réfléchir. À l’issue d’un long processus d’embauche et après de nombreuses entrevues, ma cohorte et moi avons suivi une formation en continu d’un mois. Nous étions probablement une cinquantaine, tous jeunes et libres, et il y avait une excellente chimie entre nous. Après avoir passé nos journées ensemble, à apprendre comment sauver des vies et verser des cocktails, on sortait tous pour une soirée arrosée. C’était une expérience très intense! Peu de temps après avoir terminé la formation, je me suis envolée pour la première fois.

Quand on travaille pour une compagnie aérienne, l’équipage avec lequel on collabore change à chaque vol. Il m’arrivait donc de côtoyer des gens de Vancouver ou de Toronto. J’adorais mon nouvel emploi où j’apprenais à découvrir cet univers unique, voyageant d’un aéroport à l’autre, entourée de personnes intéressantes, dans un monde parallèle, hors du temps, où les heures et les jours ne veulent plus dire grand-chose. En commençant dans le métier, on n’effectue généralement que des vols assez courts; j’ai donc parcouru le ciel de Montréal à Québec, Ottawa, Cuba, Cancún… On ne choisit pas non plus son horaire, et on finit souvent par faire des heures impossibles entrecoupées de nuits à l’hôtel, où on tente de dormir quelques heures avant de repartir de plus belle. En vol, la complicité s’installe vite entre les agents de bord et l’ambiance fait en sorte qu’on est souvent en mode séduction : la proximité physique, le contact avec les clients parfois un peu ivres qui ont tendance à flirter et la culture très superficielle du métier, où l’apparence compte énormément… Il s’opère dans le ciel une espèce de magie. La plupart de mes collègues étaient âgés de 19 à 25 ans et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on était en mode party! Il n’était pas rare de finir la soirée dans une chambre d’hôtel, avec une bouteille de rhum achetée à la boutique hors-taxes, en compagnie des membres de l’équipage avec qui on travaillait ce jour-là.

J’étais agente de bord depuis six mois quand, lors d’un vol vers Toronto, une ambiance singulière s’est développée entre mes collègues et moi. Tout au long du trajet, nous nous sommes échangés des regards remplis de sous-entendus. Je n’étais pas particulièrement attirée physiquement par eux, mais pour une raison que j’ignore, ce jour-là, tout le monde était beau dans son uniforme et le courant passait fort entre nous. Ce soir-là, nous couchions tous dans un hôtel en banlieue de Toronto. Dans le minibus qui nous y menait ont pris place deux gars qui se fréquentaient, un gars et une fille qui vivaient déjà une aventure, le pilote, le copilote, et moi. La tension sexuelle s’intensifiait de plus en plus, et des mains ont commencé à se balader.

Tout près de l’hôtel se trouvait un bar miteux où les cocktails ne coûtaient presque rien. On s’y est donné rendez-vous. Après quelques verres, spontanément, tout l’équipage s’est mis à se frencher. Gars-fille, fille-fille, gars-gars, peu importe; tout le monde s’embrassait à pleine bouche sous le regard excité des clients de l’établissement. Le pilote, qui était beaucoup plus vieux que nous (et marié) me faisait de l’œil depuis le début du vol. Je l’évitais, malgré son insistance, parce que je ne voulais rien savoir d’être l’agente de bord qui couche avec le pilote. Je trouvais ça beaucoup trop cliché. Je repoussais donc ses avances, tout en continuant d’embrasser le reste des membres de l’équipage, ce qui semblait l’allumer encore plus.

À la fermeture du bar, nous sommes rentrés à l’hôtel. Après quasiment dix heures de préliminaires et de tension sexuelle intense, nous nous sommes tous, à l’exception du copilote, retrouvés dans ma chambre où la soirée a atteint son paroxysme. Nos jeux sensuels ont évolué vers une véritable partouze.

Nous étions cinq dans mon lit; les deux hommes gais, le gars et la fille hétéros et moi. Tout le monde se touchait, s’entremêlait et se faisait plaisir sous le regard excité du pilote, bague au doigt, qui se masturbait assis au bout du lit. Les deux gars ont fait l’amour, l’autre gars et la fille aussi, et j’ai participé joyeusement à leurs ébats sans avoir, pour ma part, de relation complète. Je ne suis pas bisexuelle et avant cette nuit-là, je n’avais jamais fait l’amour avec une autre femme. Je ne savais pas vraiment ce que je faisais, mais tout était spontané, agréable et excessivement excitant. Personne n’était trop saoul, tout le monde était consentant. C’était libérateur. Éventuellement, les deux couples sont partis ensemble et le pilote aussi. De nouveau seule dans ma chambre, j’ai dégrisé tranquillement. C’était une soirée magnifique de laquelle je suis ressortie émancipée. Tout était si naturel, confortable, authentique…

Le lendemain, nous nous sommes tous rejoints au restaurant de l’hôtel pour déjeuner. Il y avait un autre équipage de Montréal avec nous et nous n’avons pas pu discuter de la veille, mais plusieurs regards complices ont été échangés. Je n’ai jamais reparlé de cette aventure ni même vraiment revu les personnes avec qui j’ai vécu cette nuit inoubliable. Peu de temps après, j’ai quitté mon emploi d’agente de bord, incommodée par les horaires exigeants.

Aujourd’hui, je suis mariée et j’ai deux enfants. Mon propre mari n’a jamais eu vent de cette histoire, et c’est très bien comme ça. C’est une expérience géniale qui fait partie de mon jardin secret. J’aime savoir que derrière cette façade de mère de famille qui magasine au Costco, j’ai un passé des plus excitants. Comme quoi on ne devrait jamais se fier aux apparences!