L’autre jour, en surfant sur Internet, je suis tombé sur un site qui donne des conseils aux filles. La rubrique de la journée? «Dix façons d’amener votre amoureux à changer son look et ses attitudes.»

Chères lectrices, regardez-moi dans les yeux et répondez franchement à ma question: c’est quoi, ce trip de toujours vouloir changer vos chums?

Si vous vouliez un bungalow en banlieue, pourquoi avez-vous acheté un condo au centre-ville? Si vous vouliez un chat, pourquoi avez-vous acheté un chien?

Dans un de ses spectacles, Patrick Huard raconte une bonne blague à ce sujet. «Tu répètes que je suis pépère, que je ne ressemble plus à l’étalon fringant que tu as connu plus jeune, dit-il à sa blonde. Mais enlève la selle et le harnais que tu m’as installés sur le dos, ouvre la porte de l’enclos et tu vas voir que je suis encore capable de galoper!»

Les Anglais ont résumé ce réflexe contradictoire dans une belle phrase: «I love you, you’re perfect. Now, change.» C’est exactement de cette manière que la plupart des filles se comportent: «Je t’aime, tu es parfait. Maintenant, change.» Change ton look, tes habitudes, ta façon de manger, tes amis…

Vous tombez follement amoureuse d’un chien de ruelle. Vous l’emmenez à la maison, vous le tondez, vous lui coupez les griffes, vous lui mettez un collier rouge et or, vous l’obligez à faire pipi sur la gazette, vous lui faites suivre des cours de bonnes manières, vous le chicanez chaque fois qu’il jappe, vous le frappez avec un magazine dès qu’il se met à zigner…

Puis, vous déplorez le fait qu’il ressemble à un caniche! Faudrait choisir, les filles.

Vous me faites penser à un gai qui faisait partie de mon cercle d’amis, il y a plusieurs années. Son fantasme ultime était de coucher avec un hétérosexuel. Mais si un gars hétéro couchait avec lui, c’est parce qu’il n’était pas tout à fait hétéro…

Résultat: le gars était constamment frustré. Il ne pouvait jamais réaliser son rêve. C’est la même chose avec vous. Vous nous demandez de changer, vous EXIGEZ qu’on change, mais si on répond à votre demande, vous êtes déçues.

Dans le fond, ce que vous désirez vraiment, c’est qu’on vous résiste. Qu’on vous dise non.

Vous nous faites passer un test. Vous nous demandez de vous donner quelque chose que vous ne voulez pas.

Vous ne trouvez pas ce jeu stupide? stérile? contreproductif?

Après ça, vous vous demandez pourquoi les gars sont mêlés. Duh!

On le serait à moins, non?

Quoique, à bien y penser, on fait la même chose. On veut que vous soyez sexys, sensuelles, désirables, que vous rendiez nos amis jaloux… Mais si vous faites tourner trop de têtes et si trop de gars se mettent à vous flirter, on vous traite d’allumeuses et on vous fait la gueule.

Qui sait? C’est peut-être ça, l’amour. Une joute de souque-à-la-corde.

Le gars tire de toutes ses forces pour attirer la fille de son bord, la fille tire de toutes ses forces pour attirer le gars de son bord, mais aucun joueur ne doit bouger, aucun ne doit céder d’un pouce.

Chacun doit résister à l’autre.

Le jeu se termine quand un des participants faiblit, traverse la ligne et met le pied dans le territoire de l’autre.

Fou? Certes. Mais il faut être fou pour vivre à deux, vous ne trouvez pas?

Article publié originalement dans le numéro de mars 2008 de ELLE QUÉBEC