Venise et la Croatie font partie de ces destinations qui nous prennent par le ventre. Vous, je ne sais pas, mais moi, prosecco, risotto et gelato me font saliver! Quant à la cuisine de la côte dalmate, elle pique la
 curiosité, ne serait-ce que par ses accents méditerranéens. Alléchée par la promesse de joyeux festins, je me suis donc envolée pour l’Italie et Dubrovnik, surnommée la «perle de l’Adriatique». J’ai été comblée: de bars à vin en restaurants hype ou ancestraux, mon voyage a pris la tournure d’une escapade gastronomique.

Passeggiata et tapas trad

Que serait l’Italie sans la passeggiata, cette promenade rituelle qui précède l’apéro? «En cours de route, on rejoint des amis et on se fait une soirée cicchetti», dit la guide Corine Govi. Une soirée quoi? Et la Franco-Vénitienne de m’entraîner du côté du Rialto, à deux pas du célèbre pont pointu qui enjambe le Grand Canal. Selon elle, c’est dans ce secteur qu’on trouve les meilleurs bacari en ville: des micro bars à vin servant ces tapas vénitiennes que sont les cicchetti.

Avec ses marmites de cuivre suspendues au plafond, La Cantina Do Mori (San Polo 429) n’a certainement pas changé d’un iota depuis le Moyen Âge! Même chose pour son menu. À l’instar de Marlena de Blasi, auteur de Mille jours à Venise, j’y ai dégusté des artichauts marinés, des calmars grillés et la spécialité de la maison, des francobolli (une sorte de petits sandwichs-pas-de-croûte) garnis de légumes grillés ou tartinés de gorgonzola. Miam!

Ici comme au populaire All’Arco (San Polo 436), on trinque à l’ombra, un vin blanc tranquille, ou au prosecco, le «champagne» italien. Quelles bulles choisit-on, Corine? «Les meilleures, c’est- à-dire les locales, celles d’un Valdobbiadene brut!»

La bonne cuisine des pauvres

Comme j’avais encore un petit creux, ma guide m’a conseillé d’aller manger hors des sentiers battus, au restaurant Antiche Carampane (antichecarampane.com), situé à deux pas du pont des Tétons, où, du temps de Marco Polo, les prostituées s’affichaient à moitié nues aux fenêtres alentour. Dans une ville où les restaurateurs se moquent souvent de la gastronomie, demain apportant un nouveau flux de touristes, cette belle trattoria se démarque. Affiliée au mouvement Slow Food, elle sert une délicieuse cucina povera actualisée, à base de poisson et de fruits de mer dont, le saint-pierre Et le crabe-araignée.


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Pour le dessert, on se rend à la crèmerie artisanale Suso (gelatovenezia.it). Ici, on vous servira un panino di Manet, un sandwich à la crème glacée comme vous n’en avez jamais goûté. Il s’agit d’une tranche de panettone fourrée d’une ou deux boules de glace Manet aux pistaches, au sel de mer et au gianduja (une pâte de noisettes et de chocolat). Riche, vous dîtes? Indubitablement, mais tellement succulente!

Chez les romains en Dalmatie

Je pensais avoir quitté l’Italie, mais me voilà chez les Romains! Sur la côte croate, à Split, l’empereur Dioclétien a jadis fait construire un palais où il s’est retiré en l’an 305. Inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO, les vestiges de l’ensemble, qui pouvait loger 2000 personnes, m’ont donné un bon aperçu de l’ampleur du projet de retraite impérial…

Aux abords de cette enceinte fortifiée, le labyrinthe de petites ruelles qui s’est tissé au fil des siècles donne tout son charme à la vieille ville. Au détour de l’une d’elles, j’ai déniché un bar à vin à la déco invitante: Temple (Kraj Sv. Ivana 2). Inspirée par un proverbe croate selon lequel «celui qui boit trop ne vivra pas vieux, mais celui qui ne boit pas du tout est déjà mort», j’ai commandé un verre de prosek, à la suggestion du barman Toni Gabelic. «Ça sonne peut-être comme prosecco, mais ça n’a rien à voir, dit-il. C’est un vin doux qu’on élabore en Dalmatie depuis au moins 400 ans et qu’on boit pour se requinquer.» Un bon remède de grand-mère, quoi!

J’ai ensuite retrouvé l’Italie dans mon assiette en savourant un délicieux risotto automnal à la citrouille et à la lotte au restaurant L’Aroma (hotelsplit.com). Si la cuisine croate est métissée d’influences autrichiennes, hongroises et orientales, Histoire oblige, celle de la côte dalmate est surtout imprégnée des saveurs de la Méditerranée.

Dégustations à Ston

Quelle belle route que celle qui longe les 200 kilomètres de littoral entre Split et Dubrovnik! Sur les hauteurs de la ville de Makarska, la vue sur les maisonnettes blanches, les toitures orangées et la mer d’émeraude est carrément époustouflante.

Ourlée d’anses et de plages, la péninsule de Peljesac ne manque pas d’attraits. On s’y rend entre autres pour se délecter des huîtres élevées dans la baie de Mali Ston. Sont- elles vraiment, comme on le dit, les plus goûteuses de l’Adriatique? Je ne peux l’affirmer avec certitude, mais elles m’ont semblé charnues et moelleuses à souhait.

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Le village de Mali Ston est relié à celui de Ston par une muraille qui zèbre les collines avoisinantes. Voilà qui pique ma curiosité: que voulait-on tant protéger? Le sel, m’a-t-on expliqué, des marais salants de Ston. Au Moyen Âge, une époque où cette substance était essentielle à la conservation du poisson et de la viande, le sel suscitait évidemment la convoitise des ennemis ottomans et vénitiens.

Plantée d’oliviers et de vignes, la péninsule est un vrai jardin d’Eden. Au village de Ponikve, le vigneron Miso Ledinic m’a d’ailleurs servi une rasade d’un rouge 2007 qui en est digne: il s’appelle Gaspar, comme son grand- père, et est bardé de prix. «En face, dans l’île de Korcula, on élabore un vin blanc avec le réputé cépage posip, dit Miso, mais ici, on fait surtout du rouge, et le meilleur!»

De Raguse à Dubrovnik: Port-Réal

Classée elle aussi au patrimoine mondial de l’unesco, Dubrovnik m’a fait voyager dans le temps. Ses monastères et ses palais majestueux rappellent en effet l’époque où elle s’appelait Raguse. La ville était alors la rivale de Venise et contrôlait une part importante du commerce sur la Méditerranée. Longs de deux kilomètres, ses remparts sont également impressionnants, et du sommet, le point de vue sur la mer et les montagnes est à couper le souffle.

En kayak, j’ai eu un plaisir fou à contourner remparts et forteresses. D’ailleurs, m’est avis que c’est leur aspect majestueux qui a incité les créateurs de la télésérie Game of Thrones à camper le royaume de Port-Réal à Dubrovnik!

Cette balade sur les flots creusant l’appétit, j’ai ensuite filé chez Proto (esculap-teo.hr), un resto fondé en 1886, qui se targue d’avoir reçu à sa table l’anticonformiste roi Edouard VIII. Alléchant, «le menu est composé à 70 % de plats traditionnels», a tenu à préciser le gérant Sasa Sobot. Hum… Que choisir? La dubrovacka pasticada, du bœuf braisé au prosek? Le brodetto, un ragoût de fruits de mer? Le risotto noir, à l’encre de seiche, «qui fait partie de leur héritage méditerranéen»?

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Encore une fois, «l’héritage» ne m’a pas déçue. Pas plus que la torta od skorupa, un gâteau aux amandes et à la crème fouettée. Pour conclure une semaine de ripailles, ce délice, qu’on ne sert plus qu’aux grandes occasions, m’a semblé tout indiqué!

Carnet de bord

Y aller avec Air Transat (airtransat.ca), qui propose deux vols directs hebdomadaires à destination de Venise depuis Montréal dès juin et jusqu’à la mi-octobre; puis, de Venise à Dubrovnik avec Croatia Airlines (croatiaairlines.com; une envolée de 90 minutes).

Découvrir le forfait Trésors de Croatie, de Transat Découvertes (transatdecouvertes.com), offert de mai à octobre. D’une durée de 14 jours, il comprend plusieurs villes, dont Zagreb, Ljubljana (la capitale slovène), Split, Mostar (Bosnie-Herzégovine), Korcula, Dubrovnik et Monténégro. Parfait pour celles qui préfèrent le circuit organisé au voyage individuel.
. Elle ne fut jamais restituée au territoire croate.

À savoir En roulant entre Split et Dubrovnik, on doit franchir le poste-frontière de Neum, en Bosnie-Herzégovine. Longue d’une vingtaine de kilomètres, cette portion du littoral fut donnée aux Ottomans par Raguse afin d’empêcher les Vénitiens de l’attaquer par voie terrestre. Elle ne fut jamais restituée au territoire croate.

Dormir À Venise, chez Ca’Gottardi (cagottardi.com), un palais du XV siècle à Split, à l’hôtel Split (hotelsplit.com) un charmant hôtel-boutique au bord de la mer; à Dubrovnik, au Pucic Palace (thepucicpalace.com), un bijou d’architecture baroque. S’informer sur venicewithaguide.com; croatia.hr; visitsplit.com; visitdubrovnik.hr

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