«On nous fait croire que les gens veulent du divertissement facile. Moi, je cherche à expliquer que ce n’est pas vrai.» Pierre Lapointe tient son auditoire en haute estime, et celui-ci le lui rend bien.

Après avoir présenté son spectacle à grand déploiement Mutantès et le disque Sentiments humains, l’artiste s’est astreint au dépouillement le plus complet pour nous offrir l’excellent album Seul au piano, enregistré en concert à la Chapelle historique du Bon- Pasteur l’automne dernier.

Mais Lapointe n’est pas l’homme d’un seul projet: il prépare déjà Conte crépusculaire, un «tableau humain expérimental au possible, épouvantable et superbe d’un roi mourant», avec le plasticien David Altmejd. S’il dit vouloir repousser les limites de la chanson au cours de cette présentation, il ne s’arrête pas là: il réfléchit également à un autre album. «Il suscitera les passions. C’est un disque qui sera soit adulé, soit détesté», dit-il en blaguant sur la fin potentielle de sa carrière. On ne miserait pas là-dessus!

Conte crépusculaire, du 4 au 7 mai à la Galerie de l’UQAM.

EVELYNE COTÉ

Photo: Sébastien Roy

 

On écoute Keren Ann

En 2003, cette artiste d’origine israélienne chantait sur son disque Not Going Anywhere: «Rien de nouveau sous le soleil; je n’irai nulle part…» En écoutant 101, son nouvel album, on ne peut que constater à quel point elle s’est trompée. Le chemin qu’elle a parcouru a de quoi impressionner: après s’être fait connaître en signant de magnifiques pièces pour Henri Salvador (elle a coécrit Jardin d’hiver, entre autres) et en enregistrant deux jolis disques en français, elle a exprimé son spleen en anglais, ce qui lui a valu un beau succès d’estime aux États-Unis. 101 est une étape majeure dans l’évolution de Keren Ann. My Name Is Trouble, le premier single, est un morceau pop éthéré, mais rythmé, qui rappelle Eurythmics ou Goldfrapp et qui tranche nettement avec le style folk et épuré de son album précédent. Sa chanson Run With You, dont la musique aurait pu être composée par Air, surprendra ses fans. Quant à la pièce-titre, longue énumération à saveur ésotérique, elle rappelle le travail récent de son ancien compagnon d’armes Benjamin Biolay. Au-delà de ses explorations sonores délicates, Keren Ann continue d’affirmer en douceur sa personnalité à la fois charmeuse et mélancolique.

NICOLAS TITTLEY

Photo: Amit Israeli

 

Nouveautés chez le disquaire

Timber Timbre
Creep on Creepin’ on

On ne s’étonnera pas que le groupe montréalo-torontois partage la scène avec Patrick Watson ces jours-ci: tous deux naviguent dans les mêmes eaux folk, teintées de sonorités foraines et de cordes dramatiques. Taylor Kirk, le chanteur de Timber Timbre, a également une voix qui ressemble à celle de Watson, bien qu’elle soit un brin plus grave. Prenez ces comparaisons comme des compliments, car ce disque est aussi personnel que charmant.

 

Les Breastfeeders
Dans la gueule des jours

Avec son rock garage digne des sixties, ce groupe semble toujours à l’écart des tendances de notre temps. C’est pourtant le temps, celui qui passe, qui est au coeur de ce nouvel album. La formation élargit sa palette sonore (on peut entendre un quatuor à cordes et un marimba) et donne plus de place à la chanteuse et claviériste Suzie McLelove, dont la voix offre un agréable contrepoint à celle, plus rêche, de Luc Brien.

 

 

Peter Peter
Peter Peter

Ce jeune auteur-compositeur est ancré dans son époque et sa ville: ses chansons Montréal et HoMa, lettres d’amour tordues à la métropole, ont d’ailleurs été enregistrées au studio mythique hotel2Tango en compagnie de Howard Bilerman (ex-batteur d’Arcade Fire). Le jeune homme explore les sonorités pop en faisant un joli duo avec Coeur de pirate, Tergiverse, mais il est à son meilleur quand il interprète des pièces évanescentes et intimistes.

 

Monogrenade
Tantale

Finaliste aux Francouvertes l’an dernier, cette formation n’avait enregistré jusqu’ici qu’un minialbum. Celui-ci ne laissait pas soupçonner que Monogrenade pouvait offrir un disque aussi riche que Tantale. Le groupe a beau revendiquer l’influence de Debussy et de Chopin, son rock planant doit plus à Radiohead et à Sigur Rós qu’aux compositeurs classiques.

 

 

Alanna Cherote
Paper Flower

Australienne de naissance, la chanteuse folk est obsédée par la culture canadienne. Sur le délicat Paper Flower, cette fan de Ron Sexsmith (dont elle reprend All in Good Time) déterre un succès oublié du groupe A Foot in Cold Water, (Make Me Do) Anything You Want, qu’elle porte de sa voix délicate et sensuelle.

 

 

 

NICOLAS TITTLEY

 

 

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