Il y a le biographe. De Guy Lafleur ou encore de Céline Dion, de René Angélil… Il y a le passionné d’histoire. Qui aime jouer avec la fiction, même quand il s’agit de retracer la vie de Christophe Colomb ou de Monica la Mitraille. Et il y a le romancier. Qui ne peut s’empêcher de mêler la grande et la petite histoire, les personnages réels et inventés. Ainsi, dans La fureur et l’enchantement (Libre Expression), Georges-Hébert Germain met en scène le patriote Chénier et le fils de l’écrivain Philippe Aubert de Gaspé, mais aussi le pacifiste François et la délurée Laurence, tout droit sortis de son imagination. Ces deux-là s’aiment, sur fond de rébellion contre les habits rouges au Bas-Canada et de colonisation au Saguenay-Lac-Saint-Jean.

 1-Votre roman commence en 1837. Pourquoi cette période de notre histoire vous a-t-elle intéressé?

Elle était particulièrement agitée. La société canadienne-française, confinée à un territoire réduit, étouffait. Les jeunes, particulièrement, en souffraient. Si vous n’étiez pas un seigneur ou le patron d’une grande compagnie, si vous étiez un jeune francophone sans le sou, vous n’aviez pas la possibilité de faire votre vie, de cultiver une terre. Le choix qui s’offrait à vous se résumait à ceci: ou vous deveniez insurgé ou vous deveniez un homme engagé toute votre vie. Il n’y avait pas d’espoir, pas de porte de sortie.

2-Pourtant, François, votre personnage, refuse d’abdiquer et continue de rêver…

Justement. J’ai voulu créer un jeune héros en quête d’un pays et de l’amour, qui ne baissera pas les bras. Et qui participera à la fondation du Saguenay, dans un climat évoquant le Far West.

3-Difficile, en voyant le titre de votre roman, de ne pas penser à La détresse et l’enchantement. Est-ce voulu?

Tout à fait. C’est un clin d’oeil à Gabrielle Roy, que j’admire énormément. Mais c’est aussi une allusion au roman mythique de Faulkner, Le bruit et la fureur, titre qui fait lui-même référence à la pièce Macbeth, de Shakespeare. Comme vous le voyez, je me tiens près des grands… même si je me sens tout petit à côté d’eux.

Photo: Jacques Migneault (Georges-Hébert Germain)

 

 

Biblio-elle

Annees-150.jpgLes années
Annie Ernaux (Folio)

Paru en France il y a deux ans, ce livre exceptionnel vient tout juste d’être réédité en petit format. Une femme de 67 ans, écrivaine confirmée, revisite son passé en restant ancrée dans le présent… et en jetant un oeil sur l’avenir. «Sauver quelque chose du temps où l’on ne sera plus»: c’est ce que propose l’auteure de La place dans cette oeuvre de mémoire attentive, où s’entremêlent l’intime et le collectif.

 

PenseeMagique-150.jpg

L’année de la pensée magique
Joan Didion (Le Livre de Poche)

Réédition attendue d’un ouvrage remarquable, qui a valu à son auteure le prestigieux National Book Award aux États-Unis. Bien qu’il soit douloureux, ce livre est une merveille. Un soir de décembre 2003, Joan Didion voit son mari mourir sous ses yeux. Commence alors pour elle l’année de la pensée magique: celle où elle tentera l’impossible pour faire revenir auprès d’elle l’homme de sa vie.

 

 

L’Extrait: Dépression postpartum au masculin

Derives-150.jpgDérives
Biz (Leméac)

Il croyait qu’après la naissance de son fils il passerait les plus beaux moments de sa vie. Il a plutôt sombré dans la dépression. Biz, membre du groupe Loco Locass, raconte comment les trois premières années de sa paternité l’ont mis K.-O. Un premier livre fort, courageux, inspiré, loin d’être banal. Où l’on voit apparaître les spectres de Baudelaire, Van Gogh, Hubert Aquin et Dédé Fortin. Où la mythologie sert de repère, tandis que le nouveau père se terre dans son lit, dérivant dans un marais imaginaire. Un tout petit livre de moins de 100 pages, qui offre un regard cru sur la paternité et lève bien des tabous.

«Bénéficiant du plus généreux congé de paternité en Amérique du Nord, j’étais payé pour m’occuper de mon enfant. Le rêve de tout parent. Mais pourquoi j’ai eu l’impression de m’être fait cambrioler tout mon temps? Compagne jalouse, ma liberté a catégoriquement refusé d’entreprendre un ménage à trois avec mon fils: elle m’a quitté comme un gars: en chien sale, sans aucune explication.»

 

À LIRE: Trois livres qui défient la mort