Des histoires qui font mal

Réinventer la vie
Pour de vrai, pour de faux
Francine D’Amour (Boréal)

Il y a dans ce recueil plusieurs nouvelles qui, en apparence, n’ont rien à voir les unes avec les autres. Mais toutes posent la question de savoir qui parle, qui dit vrai, qui divague. Qu’est-ce qu’écrire, finalement? Où est la vérité en littérature? Tout cela sur le mode léger, ironique et parfois cinglant qui a fait la marque de l’auteure de Presque rien. Pourtant, plus on avance, plus on est saisie par l’émotion, une vraie émotion. Car la mort rôde. Implacable, froide. «Et vous aurez froid, si froid! Froid jusque dans vos os. Vos viscères. Votre âme.»

 

 

Destins cruels
Trois Femmes puissantes (Prix Goncourt 2009)
Marie Ndiaye (Gallimard)

VCL-TroisFemmes-EQ244.jpgIl y a trois récits dans ce livre, trois récits de vie qui ont pour héroïne une femme. Chacune son histoire, chacune ses tourments. Ce qui les unit? Leur destin, qui se joue entre le Sénégal et la France. Toutes trois ont connu l’humiliation, la souffrance. Et toutes trois luttent pour leur dignité, s’accrochent à la vie. Cet ouvrage magistral est porté par un souffle d’écriture remarquable et une profonde humanité. Impossible de rester insensible au 10e roman de cette auteure, née en France d’un père sénégalais et d’une mère française, lauréate en 2001 du Femina pour Rosie Carpe.

 

 

 

 

 

 

Entre deux feux
L’œil de marquise
Monique LaRue (Boréal)

VCL-OeilMarquise-EQ244.jpg Ça se passe au Québec, des années 1960 à aujourd’hui. Ça raconte notre histoire politique: FLQ, référendums, accommodements raisonnables, et tout et tout. Mais ces évènements sont vus par une certaine Marquise, dont les deux frères n’en finissent plus de s’entredéchirer. En contrepoint se dessinent les questions suivantes: qu’est-ce qui nous divise, qu’est-ce qui nous rassemble à l’intérieur d’une famille, d’un couple, d’un peuple? Et comment venir à bout des stigmates du passé, comment entrevoir l’avenir autrement, à partir d’aujourd’hui? Elle est très forte, Monique LaRue, très habile dans les retournements de situation. Toute en nuances, toute vibrante.

 

 


 

On a adoré
Mauvaise fille
Justine Lévy (Stock)

 

L’histoire
Une jeune femme enceinte tente de réconforter sa mère mourante. Mais elle combat elle-même ses propres angoisses, ses propres démons. Comment porter la vie en soi quand celle qui nous a donné naissance se meurt?

VCL-MauvaiseFille-EQ244.jpg Ce qui vous fera succomber
1. Les sentiments partagés de la narratrice. Elle en veut à sa mère, une ex-héroïnomane qui n’a pas su prendre soin d’elle lorsqu’elle était enfant. Mais elle ne peut s’empêcher d’aimer sa maman autrefois si belle, aujourd’hui si fragile, rongée par ce maudit cancer qui ne lâche pas prise. Elle ne peut pas non plus s’empêcher de penser qu’elle sera peut-être une mauvaise mère, elle aussi.

2. On a l’impression d’y être. D’être dans la tête, dans les tripes de cette fille dépassée par les évènements. Qui en vient à se demander si cette mère ne fait pas place nette pour permettre à sa petite-fille de venir au monde.

3. L’émotion contenue, qui arrive par en dessous. La charge brutale, qui nous tombe dessus. Et l’ironie, l’autodérision. Le dosage est parfait.

Notre avis
C’est un livre coup-de-poing, au-delà du cliché. L’auteure va loin, très, très loin dans l’exploration des rapports mère-fille, dans le questionnement sur la maternité. On en reste bouche bée. Et on s’en fout, finalement, de savoir que le père de la romancière s’appelle Bernard-Henri Lévy.

L’extrait

Toxique 

Sagan en désintox
Françoise Sagan (Stock)

VCL-Toxique-EQ244.jpg En 1957, trois ans après avoir publié à 19 ans son mythique Bonjour tristesse, Françoise Sagan a un grave accident de voiture. Très souffrante, elle devient peu à peu accro à la morphine qu’on lui administre pour calmer ses douleurs. Au bout de trois mois, ce sera la cure de désintoxication dans une clinique spécialisée. Toxique raconte à chaud sa terreur, son désespoir, son angoisse, tandis que le manque, obsessif, l’empêche de respirer. Ce bref journal, publié cinq ans après la mort de son auteure, nous dévoile de l’intérieur l’enfer qu’elle a vécu. Des dessins à l’encre de Chine, signés Bernard Buffet, accompagnent l’ouvrage qui était demeuré jusqu’ici inédit. Troublant.

«Il paraît que ça va devenir plus difficile. Je le crois volontiers, j’étouffe depuis ce matin. Il faut, paraît-il, s’accrocher. L’esprit monte et descend entre deux crises, sans cesse. Décrocher le téléphone, garder cet air courageux, expliquer posément que décidément ce n’est pas supportable comme ça. Ils feront quelque chose, quelque chose qui retardera le moment où je partirai. Tout ce que je fais pour moi est contre moi, c’est assez épouvantable.»

 

 

 

The Big Book of Legs de Dian Hanson (Taschen)

VCL-TheBigBook-EQ244.jpg Quelque 400 photos de jambes féminines, avec ou sans talons aiguilles, porte-jarretelles ou bas résille, d’hier à aujourd’hui. Très, très sexy. Mais sachez qu’on montre aussi des seins dans cet ouvrage. Beaucoup de seins féminins, donnés à voir à pleines pages. Comme si les photographes, devant tant d’appâts, n’étaient pas arrivés à faire un choix: cuisse ou poitrine?

 

 

 

 

 

 Les cent plus belles chansons du Québec, texte de présentation de Bruno Roy, illustrations de Diane Dufresne (Fides)

 VCL-CentBelleChansons.jpgElles disent notre passé, notre présent, nos rêves, nos défaites. Elles sont signées par La Bolduc, Gaston Miron, Félix Leclerc, Claude Dubois, André Fortin, Éric Lapointe, Loco Locass, Ariane Moffatt… On aurait pu en choisir d’autres, remarquez bien. Mais devant les paroles des chansons rassemblées dans cette anthologie grand format, impossible de ne pas fredonner, le cœur léger ou la gorge nouée.