Il n’a qu’un seul objectif dans la vie, depuis tout petit: devenir riche. Il ne s’en cache pas, bien au contraire. Le héros de Comment s’en mettre plein les poches en Asie mutante est prêt à partager les secrets de sa réussite avec nous. On se croirait dans un manuel de croissance personnelle. On y est presque… Ou plutôt dans une parodie du genre, hilarante par moments.

Ce troisième roman de Mohsin Hamid a été traduit en une trentaine de langues et a vendu plus d’un million de livres. Son deuxième roman, L’intégriste malgré lui, a fait l’objet d’un film. Ce sera aussi le cas pour Comment s’en mettre plein les poches…, adapté par le scénariste mexicain Guillermo Arriaga (Babel, Amores perros).

Nous sommes sur le continent indien, dans un pays anonyme qu’on peut facilement associer au Pakistan. L’histoire commence à la campagne, au sein d’une famille extrêmement pauvre. Bientôt le père, la mère et les trois enfants (dont le héros) vont quitter leur clan pour aller vivre en ville. «Monter à la ville»: c’est le titre du premier chapitre, qui correspond au premier conseil offert par le narrateur. Et ainsi de suite: «Faire des études», «Travailler pour soi-même», «Jouer avec les dettes»… Douze conseils, douze chapitres qui servent en fait de prétextes pour raconter en accéléré le parcours du héros, lequel va passer de la pauvreté la plus crasse à la richesse la plus extravagante. Corruption généralisée, concurrence déloyale, violence: les obstacles sont nombreux. Pour les surmonter, il suffit de ne pas perdre de vue son objectif et de laisser ses principes moraux au vestiaire, comme nous l’enseigne si bien le narrateur en s’adressant à nous à la deuxième personne du singulier, question de favoriser la complicité. Derrière, on sent bien l’ironie, la critique. On rit jaune devant ces pratiques de plus en plus répandues dans la course sauvage à l’argent qui sévit un peu partout sur la planète.

Ce qui séduit dans ce roman, outre l’intelligence du propos, c’est le ton, désinvolte, léger. C’est la drôlerie, mais aussi la sensibilité de l’auteur, l’émotion qu’il suscite à certains moments-clés. Et sa façon toute particulière d’aborder le sentiment amoureux.

Il dit de ne pas tomber amoureux: c’est un des 12 conseils du livre. Et pourtant… une grande histoire d’amour traverse le roman par intermittence. Elle n’est pas sans rappeler L’amour aux temps du choléra, de Gabriel Garcia Marquez, où un homme attend la plus grande partie de sa vie la femme qu’il aime, mariée à un autre. Notre héros, lui, est follement épris depuis l’adolescence d’une femme qui multiplie les amants, refuse la vie de couple et préserve jalousement son indépendance, sa liberté. Vont-ils en venir un jour à se rejoindre pour de bon, tous les deux? (Grasset)  

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