Le musée de l’Innocence
Orhan Pamuk (Gallimard)

«C’était le moment le plus heureux de ma vie, je ne le savais pas.» Ainsi commence ce grand roman d’amour de près de 700 pages, d’une rare profondeur, d’une rare intensité. L’action se passe à Istanbul, ville natale de l’auteur. Dans les années 1970, un homme de 30 ans, riche et insouciant, s’apprête à se fiancer avec une femme de son âge, érudite, du même milieu que lui. Ils forment un couple dit «moderne », occidentalisé; leur union est déjà consommée. Mais le coup de foudre frappe le futur marié quand il aperçoit dans une boutique une cousine éloignée, âgée de 18 ans, qu’il n’avait pas vue depuis des lunes. Sous le sceau du secret, il entreprend une relation charnelle fusionnelle avec cette petite vendeuse désargentée. Mais loin de lui l’idée de renoncer à ses fiançailles. Quand il se rendra compte de l’erreur monumentale qu’il a commise, il sera trop tard… Ce n’est là que le début de cette histoire tragique, qui s’étend sur une trentaine d’années. En arrière-plan, on assiste aux bouleversements politiques et sociaux qui secouent la Turquie. Le héros, lui, détaché du monde, obsédé, entêté, vit dans le passé, entouré des petits objets qui entretiennent le souvenir de celle qu’il ne peut oublier et à qui il veut rendre hommage. Sensibilité à fleur de peau, sensualité exacerbée, souci maniaque du détail dans la déclinaison des sentiments amoureux: le plus récent ouvrage du Prix Nobel de littérature 2006 envoûte. Et atteint le sublime.

 

 

yeux-ciel-225.jpgLes yeux au ciel
Karine Reysset (Éditions de l’Olivier)

Le cinquième roman de cette écrivaine française dans la trentaine est un petit bijou. Tout passe par les silences, les non-dits et les blessures des personnages de ce drame familial. L’intrigue se déroule le temps d’une fin de semaine, dans la maison du bord de mer d’un père vieillissant et de sa deuxième femme, où déboulent ses enfants et ses petitsenfants, chacun enfermé dans sa bulle. On apprend que, des années plus tôt, un évènement terrible est survenu, qui empoisonne encore aujourd’hui le climat familial. Extrêmement touchant, tout en délicatesse, ce roman traite en sourdine de l’enfance qui nous habite encore, même une fois que nous sommes devenus adultes. Et de l’amour, de la protection, du réconfort que nous attendons de nos parents, même vieillissants.

 

On a adoré Les imperfectionnistes de Tom Rachman (Grasset)

L’histoire
Celle d’un journal fondé à Rome dans les belles années de l’imprimé, mais qui court à sa perte depuis l’arrivée d’Internet; celle de ses artisans, de ses patrons, surtout, et même de sa clientèle.

Ce qui vous fera succomber

1. Les personnages: chacun a ses travers, ses drames et ses soucis, dans une entreprise de presse où personne n’a le temps de se parler.

2. Les vacheries, les trahisons, les mauvaises pensées de tout un chacun, qui s’enchaînent à un rythme d’enfer.

3. L’impression d’avoir sous les yeux un kaléidoscope du genre humain.

4. Un savoureux mélange d’humour et de tendresse.

Notre avis
Un livre exubérant, fougueux, irrésistible. On a très hâte de voir la version cinématographique du premier roman de ce journaliste britannique de 37 ans, qui a cédé les droits d’adaptation à Brad Pitt.

 

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