Ce que Valérie avance est bel et bien vrai. À la lecture de ce son livre – moi qui fais partie d’une famille nucléaire – j’ai été profondément touchée, habitée, voire transformée. Tout particulièrement par le récit de la journaliste culturelle Catherine Brisson, qui n’a pas eu l’appel de la maternité, mais qui s’est grandement investie dans son rôle de belle-maman auprès des deux enfants de son conjoint. Vers le milieu de son témoignage, une phrase, pourtant si belle et inoffensive, a eu sur moi l’effet d’un choc électrique: «Je ne serai jamais votre mère, mais vous serez toujours mes filles», dit Catherine.

Bien que Valérie ait une réalité différente de la mienne, elle a saisi mon malaise. «Dans ta vision à toi, qui es mère, je comprends que cette phrase doit être difficile à recevoir. Pour ma part, j’ai eu plusieurs conversations avec les filles de Martin [Juneau] pour savoir si ça les dérangeait que, lorsque je parle d’elles, je dise: “mes filles”. Et elles m’ont toutes deux répondu qu’elles en étaient flattées. Je les appelle aussi souvent “mes cœurs”, parce que ces enfants-là, je ne les ai pas portées dans mon ventre, mais je les ai portées avec mon cœur, au plus profond de mon être.»

En l’écoutant me parler ainsi de ces belles-filles, avec autant de verve et de passion, quelque chose que je n’avais pas prévu me saute aux yeux: Valérie éprouve un sentiment aussi fort à l’égard de son amoureux que de ses belles-filles. «Quand je les ai rencontrées, elles étaient si jeunes. Léonie n’avait que deux ans, et Simone, cinq. On a vécu tellement de choses ensemble, autant dans le quotidien qu’au cours de voyages extraordinaires, affirme Valérie, les yeux luisants. Alors, oui, c’est clair, je suis aussi attachée à Martin qu’à ces deux petites humaines-là.»

Dans la tête de la femme de 33 ans, c’est ni plus ni moins qu’une adoption… sans le petit bout de papier qui confirmerait la chose. «À la fin d’une année, sur 365 jours, j’en ai passé la moitié avec ces enfants-là. L’autre moitié, elles étaient avec leur maman. J’ai donc passé autant de temps avec elles que leur mère l’a fait. Assurément, il y a une relation forte qui se développe au fil du temps.»

Parmi les choses qui choquent le plus Valérie, c’est le manque de reconnaissance pour sa réalité de belle-mère et l’absence de termes pour la nommer. «Pourquoi le mot belle-parentalité n’existe-t-il pas? C’est comme si on me disait que la parentalité existe, mais pas la belle-parentalité. Tu imagines? On n’a même pas le vocabulaire adéquat pour parler de notre rôle! Et pourquoi y a-t-il une journée nationale du ketchup, mais pas une qui soit consacrée aux beaux-parents? Parce que, dans ma vie, je me donne sans compter pour les filles, mais je le sais qu’à la fête des Mères, ce n’est pas moi qui aurai droit au bricolage. Il ne pourrait pas exister une journée où je le recevrais, mon bricolage? Pour toutes les nuits où je me suis levée pour nettoyer leur vomi parce qu’elles voulaient que je sois là… J’aimerais vraiment ça, avoir cette journée en guise de reconnaissance!» (Rires)

Petite pause. Grande Respiration.

Valérie ajoute: «Tu sais, quand je m’occupe des filles lorsqu’elles sont malades, elles ne me disent pas: “Merci, maman, je t’aime”… Je reçois plutôt un: “Je m’ennuie de maman.”» Long silence où nos regards ne se quittent pas, et où, d’un coup, c’est à mon tour de saisir tout ce qu’elle tente de m’expliquer depuis le début. Chapeau, belles-mamans!

NDLR: Ce contenu était prévu pour le numéro de mai, mais compte tenu de la pandémie et du remaniement de certains contenus il sera publié dans le numéro d’été en kiosque le 25 juin. Nous vous offrons l’entrevue en primeur et vous invitons à découvrir le shooting mode dans notre prochaine édition.

La blonde de papa Valérie Roberts

Le livre La blonde de papa est disponible en librairie et en version numérique sur le site de KO Éditions.


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