Il fait beau dans la tête de Sarah-Jeanne Labrosse. Cette comédienne attachante, belle comme un coeur, garçon manqué à ses heures, a quelque chose d’une chercheuse d’âme. «J’aime fouiller la vérité de mon personnage, la sentir s’emparer de moi… C’est pour ces moments-là que je fais mon métier», déclare-t-elle dès les premières minutes de notre piquenique improvisé dans un parc du Plateau-Mont-Royal. Ses longs cheveux blonds sont ramenés sur son épaule, son visage est nu et lumineux, ses yeux expressifs, sa bouche gourmande… Elle poursuit sur sa lancée en me disant combien ce rôle de «détenue rebelle et fragile», qu’elle incarne dans la télésérie Unité 9, elle le voulait de toutes ses forces – même si elle se croyait «trop jeune» pour l’obtenir. «Quand j’ai su que je l’avais, j’ai sauté de joie, j’ai crié, j’ai pleuré!» confie-t-elle entre deux bouchées de grilled cheese. C’est qu’à 23 ans la comédienne, qui n’en est pourtant pas à son premier rôle, jubilait à l’idée de construire un personnage à part entière, qui ne soit pas «la fille ou la blonde de…». Elle aimait aussi l’idée de prêter ses traits à une jeune femme dont on connaît peu le passé. «Quand les filles arrivent à Lietteville, personne ne sait qui elles sont vraiment. C’est à elles de décider si elles seront fines ou tough. Après, la prison les change. Elles y vivent des choses dures qui aiguisent leur violence, leur tristesse…» Durant le tournage de la série, Sarah-Jeanne a vite compris qu’il suffit d’une minute dans la vie d’une femme pour que tout bascule. «On ne peut pas juger ces filles sans d’abord essayer de les comprendre», avance celle qui aurait été psychologue si elle n’avait pas été comédienne.

Sarah-Jeanne aurait pu se torturer à l’idée de devoir jouer avec des partenaires de la trempe de Guylaine Tremblay, de Micheline Lanctôt et de Céline Bonnier. Ou flirter avec le syndrome de l’imposteur. Mais c’est mal la connaître. «J’ai confiance en moi en général, affirme-t-elle sans la moindre prétention. Mais, cette fois, j’avais des doutes… Puis je me suis dit que, si on m’avait choisie, c’était sûrement pour de bonnes raisons. Plutôt que de me sentir mal, j’ai saisi cette chance de jouer avec ces grandes comédiennes. Unité 9, c’est une excellente école!» Ces dernières semaines lui ont d’ailleurs permis de retrouver ses merveilleuses camarades de jeu pour enregistrer les épisodes qui seront diffusés dès le10 septembre. Heureusement, l’ambiance légère qui règne sur le plateau compense pour la gravité de l’intrigue. «On a souvent des fous rires, parfois juste avant de jouer une scène heavy!» raconte Sarah-Jeanne en s’émerveillant de la complicité qui s’est très vite installée entre les comédiennes. «On est toutes très proches. On se voit souvent en dehors des tournages. On parle de nos vies, on s’épaule, on s’inspire…»

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Impossible de ne pas évoquer ses fameuses dreadlocks, qui la rendent méconnaissable. «Le matin, dès qu’on me pose les dreads, je deviens Laurence. Ma tête est plus lourde, mes mimiques sont différentes. Une partie de mes cheveux sont crêpés et mêlés aux rallonges. C’est douloureux parfois, mais ce look en dit tellement long sur mon personnage! Ça montre son côté grunge, qui se fiche de séduire. C’est un peu une carapace pour cette fille hypersensible.»

– Ça évoque aussi une certaine colère, non?

– Oui, et elle va l’exprimer encore plus la saison prochaine à cause des désillusions qui l’attendent, surtout dans ses relations avec les autres prisonnières. Elle qui pensait avoir trouvé une famille, elle va se buter à plus d’obstacles que prévu. Je n’en sais pas plus pour le moment, mais ça s’annonce déchirant pour Laurence…

Avec Unité 9, le téléroman Yamaska, dans lequel son personnage, Marie-Pier, prend de l’ampleur, et la série pour jeunes L’appart du 5e, diffusée à VRAK.TV, Sarah-Jeanne ne chôme pas. Elle apprend le plus souvent ses textes la veille des tournages, dans un casse-croûte bourdonnant près de chez elle. «Plus je suis sous pression, plus je performe!» s’empresse-t-elle de dire, précisant que cette «façon de carburer à l’adrénaline lui vient du sport». Il faut dire qu’elle est une joueuse de tennis accomplie. Dans sa jeunesse, elle s’est d’ailleurs classée parmi les meilleures du pays. Une passion qui n’a pas réussi à triompher de son désir fou de devenir comédienne. Il faut l’entendre raconter comment, à trois ans à peine, elle voulait «aller dans la télévision». «Comme à sept ans, je n’en démordais pas, mes parents m’ont inscrite dans une agence de casting pour enfants, en disant à l’agent: «C’est pas grave, si ça ne marche pas… »» Résultat: la jeune Sarah-Jeanne fait sa première apparition à la télé à l’âge de 8 ans dans le téléroman Le volcan tranquille, de Pierre Gauvreau, et enchaîne les rôles au petit comme au grand écran. «Les studios étaient un terrain de jeu pour moi», évoque la jeune femme, qu’on a vue grandir au fil des téléséries comme Le match!, Nos étés, Le gentleman et 30 vies, et des films Aurore,  de Luc Dionne, Eastern Promises, de David Cronenberg, Piché: entre ciel et terre, de Sylvain Archambault, et Starbuck, de Ken Scott.

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 À 23 ans, la comédienne compte 15 ans de métier, mais ne se considère pas comme une enfant de la télé. Curieux, non? «Oui, j’ai beaucoup joué dès mon plus jeune âge, mais j’ai grandi autant sur les plateaux de télé et de cinéma que sur les courts de tennis et à l’école. Ce qui fait que je ne me suis jamais sentie isolée ou différente des autres», explique-t-elle. Chose certaine, à défaut d’avoir reçu une formation en jeu, elle estime avoir fait sa place dans le métier à force d’audace («Je n’ai pas peur de dire que je veux un rôle») et de persévérance («Je n’ai pas peur de me faire dire non»). Elle ajoute qu’elle est difficile à déstabiliser. «Ça me vient de ma famille: chez nous, on est extrêmement optimiste! On ne laisse aucune place au découragement.»

Fille d’un père anglophone – Alan Labrosse, un agent de pilote de course automobile connu – et d’une mère francophone, Sarah-Jeanne parle les deux langues sans accent. Ce qui l’amène tout naturellement à faire du doublage, dès qu’elle n’est pas en tournage. Recherchée pour sa grande polyvalence, elle a prêté sa voix à plus de 50 films et séries télévisées, dont Anna Karénine, Frankenweenie et Les Tudors.

– Et la carrière à l’étranger, à l’instar de Caroline Dhavernas, de Laurence Leboeuf etd e Karine Vanasse, ça te tente?

– Tout me tente! Je reste ouverte… Mais ça se passe tellement bien pour moi ici que je n’ai envie de rien d’autre pour le moment!

Fille de clan, Sarah-Jeanne reçoit à souper son «cercle d’amis super serré» de quatre à cinq fois par semaine. «J’ai besoin de concilier l’amitié et le travail. C’est ce qui me tient en forme, concentrée, surtout quand j’enfile les journées de tournage, dès 4 h du matin. Je suis entourée d’amis passionnés, de qui je suis la confidente. J’adore ce rôle, j’apprends beaucoup de choses sur l’humain», avoue-t-elle, avec un sourire espiègle.

Son tempérament philanthrope l’a amenée à s’investir dans un autre rôle: celui de modèle auprès des jeunes. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’elle a accepté, le printemps dernier, de poser sans fard dans ELLE QUÉBEC pour la Journée sans maquillage. En compagnie de la comédienne Frédérique Dufort, elle a remis une bourse de 3000 $, offerte par VRAK.TV, à une école secondaire qui a participé à cette journée visant à sensibiliser les jeunes à l’importance de s’accepter tel qu’on est. «C’est essentiel d’assumer ses traits, de choisir de ne pas se maquiller, et de se trouver belle», souligne la comédienne. Elle ajoute: «Je trouve extraordinaire de pouvoir influencer les jeunes, de les aider à avoir une image positive d’eux-mêmes.» Dans le milieu artistique «où les troubles alimentaires foisonnent et où les femmes sont toujours à cinq kilos du bonheur», dit-elle, Sarah-Jeanne fait d’ailleurs figure d’exception. «Oui, la télé, ça grossit. Mais je ne vais pas perdre du poids pour avoir l’air plus mince à l’écran! Une fille, c’est pas censé avoir un six-pack comme un gars. Une fille, ça a un petit ventre, et c’est plus beau comme ça! »

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Quant à sa vie amoureuse, la comédienne confie être célibataire depuis près d’un an (une certaine presse a fait son miel de sa rupture avec le comédien Maxime Le Flaguais). Mais elle croit toujours à l’amour. «J’ai un trop bel exemple pour ne pas y croire: mes parents sont ensemble depuis l’âge de 15 ans, et ils sont toujours amoureux.» Elle poursuit, lucide: «Aujourd’hui, on est à un clic d’une nouvelle date. Mais je n’adhère pas à ça. Je crois à la fidélité, à l’envie d’avoir plein de projets à deux.» Son idéal amoureux? «Un gars dont j’admire les valeurs plus que la culture ou la richesse. Un gars qui fait preuve d’écoute et qui est capable de parler de lui-même…» Pensive, elle ouvre une porte sur l’avenir: «Je me vois avoir encore plein de beaux rôles. Je me vois aussi en couple, dans une maison avec plein d’enfants qui courent partout!» Je parie que sa Laurence rêve en secret, elle aussi, d’un aussi beau destin…

Le surnom que lui donne son père: «Sarah-Jeanne-Jelly-Bean!», à prononcer à l’anglaise.

Sa fratrie: Elle est la cadette de deux frères

Son animal de compagnie: Louis, un chat bengal «superaffectueux».

Son moyen de transport: Un vélo vintage bleu, acheté à 20$ à la Société de Saint-Vincent de Paul de Repentigny, sa ville natale.

Sa petite entreprise: Le foulard réconfort, une collection de foulards et de bonnets en laine d’alpaga tricotés à la main, par elle et des copines.

Son chez-soi: «Un petit condo chaleureux, lumineux, rempli de trouvailles… éclectiques.»

Une actrice qui l’inspire: «Nathalie Portman, dans Le professionel, le rôle d’elle que je préfère.»

Le conseil qui l’inspire: «Reste calme», un conseil de Sylvain Archambault, pour qui elle a joué dans Piché: Entre ciel et terre. «Ça m’aide dans les situations stressantes, frustrantes ou trop emballantes! Je suis trop jeune pour m’en faire!»

Entre tournages et doublages… Elle voyage, fait du quatre-roues, de la motoneige, joue au tennis, tricote, suit des cours de couture, de langue et… prend «un break

 

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