Diane Kruger est la première à l’admettre: son dernier rôle est différent de ceux qu’elle a l’habitude de jouer. L’actrice d’origine allemande, que nous avons jointe par Zoom, est rayonnante de beauté. Elle est assise de façon décontractée, porte un sweatshirt blanc tout simple et un legging, et ses cheveux blonds sont attachés en une queue de cheval soignée. Son style est simple, mais impeccable. «Jamais de ma carrière je n’ai participé à un film comme celui-ci», dit-elle. Comme la sortie du film a été retardée d’un an à cause de la pandémie, Diane Kruger est on ne peut plus ravie que le long métrage puisse enfin trouver son public. The 355 raconte l’histoire d’un groupe d’agentes internationales du renseignement qui font équipe pour empêcher qu’un dispositif capable de changer le monde tombe entre de mauvaises mains. Jessica Chastain, qui est aussi la productrice de l’œuvre, Lupita Nyong’o, Penélope Cruz et Fan Bingbing rejoignent Diane Kruger à l’écran dans cette version féministe d’un genre souvent saturé d’hommes.

Matthew Sprout

Le titre du film est un clin d’œil à l’agente 355, une espionne active pendant la révolution américaine. Diane Kruger incarne Marie, une agente du service de renseignement allemand BND, une louve solitaire, posée, sérieuse. Elle est chargée de la même mission que Mace (Jessica Chastain), une agente plutôt aventurière au côté canaille qui travaille pour la CIA. Les deux femmes se rendent vite compte que, bien qu’étant à l’opposé l’une de l’autre, elles ont un but commun. Elles décident de faire équipe avec une agente du service de renseignement colombien DNI (Penélope Cruz), une pro de la techno britannique, ancienne du MI6 (Lupita Nyong’o), et une agente du ministère chinois de la sécurité d’État (Fan Bingbing).

Réalisé et coécrit par Simon Kinberg (The Martian, Deadpool 2), ce suspense divertissant et étonnamment émouvant fait accélérer le rythme cardiaque des cinéphiles dès les premières minutes. Poursuites à vive allure entre les gratte-ciel, combats corps à corps et maniement d’armes sont au menu! Au milieu des explosions, des coups de pied et des coups de feu, le film fait la part belle à la complicité entre ces actrices au talent exceptionnel. «Je connais Jessica depuis des années, et le fait d’avoir été invitée à me joindre à la distribution m’a fait du bien, tout simplement parce que j’étais en compagnie de consœurs extraordinaires, dit Diane Kruger. Je fais habituellement partie de films où je suis entourée d’hommes, où il y a peu de rôles principaux féminins… Alors, l’expérience était rafraîchissante.»

Il s’agissait du premier projet de l’actrice depuis la naissance de sa fille, en novembre 2018 – le papa est l’acteur Norman Reedus, qu’on a pu voir dans Walking Dead. Elle a voulu se lancer un défi, notamment, en se préparant physiquement pour le rôle. «C’était comme si on apprenait à danser, affirme-t-elle à propos des scènes de combat. Elles étaient minutieusement chorégraphiées, et c’était une manière toute nouvelle de jouer pour moi, car la façon dont on tombe, dont on se relève, par exemple, en dit long sur notre personnage.» L’aspect physique du rôle n’est pas la seule chose qui a motivé l’actrice à l’accepter. Jessica Chastain, consciente que plusieurs actrices du projet étaient aussi des mamans, a veillé à ce que le plateau soit adapté aux enfants, ce qui a fait une énorme différence pour Diane Kruger et son bébé de huit mois. «Sur le plateau, ç’a été facile d’avoir une remorque réservée aux actrices et à leurs enfants, dit la productrice par courriel. C’était important pour moi d’intervenir sur ce plan. Les studios devraient soutenir davantage les parents de cette façon.»

Diane Kruger attribue une grande partie de l’énergie sur le plateau de The 355 à Jessica Chastain. «Elle apprécie vraiment le travail des autres femmes. C’est une productrice qui participe activement aux échanges de vues sur le projet. Elle était toujours présente quand nous avions des questions ou des doutes sur les personnages. Ça nous a donné l’impression de faire partie intégrante du film; on se sentait appréciées.» Cette notion de respect est partagée par la productrice. «Travailler avec Diane était génial, écrit Jessica. C’est une vraie pro. Elle arrivait chaque jour sur le plateau prête à botter des culs… et le mien! C’est inspirant de travailler à ses côtés; elle donne toujours son 100 %.» 

«À ce stade de ma vie, je suis intéressée par les rôles qui montrent des femmes dans leur plénitude, sous leurs différentes facettes.»

L’estime mutuelle entre les acteurs et les producteurs, remarque Diane Kruger, prend de plus en plus de place dans l’industrie cinématographique – et c’est dû en grande partie au fait que davantage de femmes sont présentes sur les plateaux et occupent des postes importants sur le plan créatif. Les rôles qu’on propose aujourd’hui à l’actrice sont plus complexes et intéressants que ceux qui lui étaient offerts à ses débuts en tant qu’ingénue – par exemple Hélène, le personnage qu’elle incarne dans Troy (2004) aux côtés de Brad Pitt. «À ce stade de ma vie, je suis intéressée par les rôles qui montrent des femmes dans leur plénitude, sous leurs différentes facettes. En ce sens, vieillir est une bonne chose: je sens que les personnages qu’on m’offre sont plus complets.»

La carrière de Diane Kruger à Hollywood est plus que réussie, mais on la connaît aussi pour ses rôles au cinéma européen. À l’âge de 16 ans, elle quitte sa ville natale d’Algermissen, en Allemagne, pour s’installer à Paris et devenir mannequin. Elle y découvre les films français; l’un d’eux, dans lequel jouait l’actrice allemande Romy Schneider, que Kruger aimait regarder quand elle était petite, l’a marquée. «Elle a fait un film avec Claude Sautet intitulé Les choses de la vie, qui a vraiment changé mon existence. De voir qu’elle parlait français avec un accent et qu’elle était si appréciée en France m’a donné de l’espoir pour mon propre cheminement.» Diane Kruger a appris la langue de Molière et, presque immédiatement, sa carrière d’actrice a décollé. Elle n’a pas arrêté depuis, jouant dans d’innombrables longs métrages des deux côtés de l’Atlantique, notamment des rôles primés dans Inglourious Basterds, de Quentin Tarantino, et In the Fade, du réalisateur allemand Fatih Akin.

Diane Kruger joue encore souvent en Europe (son prochain film, auquel participe Liam Neeson, a été tourné à Barcelone), mais c’est encore aux États-Unis qu’elle habite pour le moment. Maintenant, avec sa fille (à la prématernelle) et son partenaire, qui travaille sur une série télévisée à Atlanta, elle fait des choix professionnels plus réfléchis – surtout depuis la pandémie. Elle était à Los Angeles avec sa mère, sa fille et Norman lorsque les choses se sont arrêtées, en mars 2020; par hasard, ils y avaient atterri au retour d’un séjour en Nouvelle-Zélande. «La vie a ralenti, et tout le monde, y compris notre fille, s’est détendu et s’est habitué à la présence des autres, raconte Diane Kruger. Avec le recul, je me rends compte que c’était un moment vraiment spécial, où on a pris le temps de se déposer.» 

Lorsque je lui demande si la pandémie a modifié ses choix en matière de mode, elle rit. «C’est plutôt le fait d’avoir un enfant qui a changé la donne. Je passe la moitié de mes journées dans la cour de récréation. Alors, les bottes Chanel me semblent moins appropriées. Et je ne sors pas beaucoup, parce que je sais que je dois me lever à l’aube le lendemain. ll faut vraiment une occasion spéciale pour que j’accepte l’invitation et que je perde de précieuses heures de sommeil!»

Matthew Sprout

Entre le Festival de Cannes de l’été dernier – qui, selon elle, a été une expérience très émouvante parce qu’elle a enfin pu se retrouver dans une salle de cinéma avec ses pairs – et de grands événements comme le Met Gala, où elle a fait tourner les têtes dans une superbe robe Prabal Gurung verte, et l’annonce de ses fiançailles avec Norman Reedus, il semble que les jours calmes de la vie pandémique soient derrière elle. «La vie va vite, le temps file – et il y a tant de choses à faire. C’est un peu comme un nouveau départ, mais avec l’envie d’une vie plus équilibrée

Les premières de films sont également de retour, et l’actrice est ravie de retrouver ses collègues de The 355 pour la sortie en salle, après une si longue attente. «J’ai hâte de voir tout le monde, pas seulement pour célébrer le film, mais aussi pour recouvrer l’essence de ce que nous avons ressenti en le filmant, dit-elle, un peu nostalgique. 

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