Quand le Canadien a échangé son flamboyant numéro 76, l’été dernier, la nouvelle a fait couler beaucoup d’encre. Si bien que des mois plus tard, P.K. Subban continue de défrayer la chronique ici: on épie ses performances à distance, on décrie ses blessures, on salue son implication auprès des enfants malades (de Montréal comme de Nashville) et on s’amuse même à scruter son style vestimentaire. Car ce hockeyeur a l’étoffe d’une star: il se donne en spectacle dans toutes les sphères de sa vie!

Jeudi 1er décembre 2016 Réveil à 3 h pour attraper mon avion, qui décolle à 6 h. Après une escale à Toronto, j’atterris à Nashville juste avant le lunch. Le contraste météo est moins radical que je le croyais: c’est ensoleillé, et il fait 9 °C. Je décide donc d’aller explorer la ville, histoire d’en prendre le pouls et de voir comment P.K. y a trouvé ses marques. Au cœur du centre-ville, à deux pas de la célèbre avenue Broadway, où la musique country émane de dizaines de restos-bars, P.K. me souhaite la bienvenue. Eh oui! Tout de jaune et de bleu vêtus, lui et quatre de ses coéquipiers figurent en façade du Bridgestone Arena, amphithéâtre qui tient lieu de domicile aux Predators. Le décor est planté! Je m’arrête boire un verre (ou deux) au Tootsie’s Orchid Lounge, institution tennessienne où Subban a volé la vedette, à son arrivée, en imitant Johnny Cash au karaoké. Les ceintures western, les franges, les bottes et les chapeaux de cow-boy sont ici légion: avec mon allure sobre et minimaliste, je constate que je détonne un brin. Mais je me dis que P.K., lui, doit évoluer dans cette faune hétéroclite comme un poisson dans l’eau. Tout ce qui est coloré, clinquant et original a la cote, à Nashville! Tiens, tiens…

 

L'avenue Broadway, à Nashville

L’avenue Broadway, à Nashville.

Vendredi 2 décembre 2016, 13 h C’est jour de séance photo avec P.K. Subban! Car pour une deuxième année, il est designer invité chez RW&CO., manufacturier canadien de prêt-à-porter affilié au groupe Reitmans. En clair, ça signifie qu’il a imaginé – en fonction de son style et de ses goûts singuliers – six complets, huit chemises et quelques accessoires masculins qui arriveront en magasin et en ligne au printemps. Mais, avant de me rendre au studio, je fais escale au Centennial Park, où est érigé un centre d’arts ayant l’allure d’une réplique du Parthénon. Une équipe de télé québécoise attend P.K. pour une interview filmée. Je me joins à elle… et on attend longtemps! Près de 75 minutes passent avant qu’on voie enfin poindre la Cadillac grise de Subban. Vêtu d’un jean noir, d’un tricot et d’un foulard, il salue tout le monde et nous serre la main, l’air archidécontracté (cela dit, je me demande s’il fait attendre ainsi les jour- nalistes sportifs!). Il sort d’un entraînement matinal éreintant, mais a l’air frais comme une rose. Pas étonnant qu’il me confie, quelques instants plus tard: «Ma plus grande force, c’est d’être capable de relativiser. Quand je ne suis pas en forme, que je suis fatigué ou que j’ai mal joué, je concentre tout de suite mes énergies sur l’engagement suivant. C’est ainsi que j’arrive à garder le cap et à mieux performer. Même chose pour les rumeurs émanant des médias et les ragots des partisans: je ne laisse rien de ça m’affecter, jamais.» À bon entendeur…

 

 

15 h Arrivée au studio photo, en banlieue de Nashville. Avant de se lancer devant l’objectif, P.K. prend une bouchée. Un «petit» gueuleton de chez Burger Up, un de ses restos favoris. Au menu? Deux salades de kale avec poitrine de poulet mais sans vinaigrette, et deux portions d’ailes de poulet avec un mélange de sauces BBQ et piquante. Compliqué, le P.K.? Plutôt sûr de lui et de ses goûts. À preuve, il refuse formellement d’être photographié ou filmé en train de manger. «Mais vous pouvez le faire à volonté quand je suis en caleçon, aucun souci, lance-t-il en riant. D’ailleurs, avis aux filles de Montréal: je suis toujours célibataire…» Sapré P.K.: il n’en rate pas une! Plus tard, insatisfait de la musique qui joue au studio, il ira chercher son propre iPhone, et c’est sur les notes de Roxanne, de The Police, qu’il réussira enfin à charmer l’objectif de la caméra. Le plateau est bondé: on doit être une bonne vingtaine de personnes sur place! Mais Subban n’en fait pas de cas. Au contraire: les foules, au hockey comme ailleurs, ça l’allume. En parlant à la troisième personne (ça lui arrive souvent), il statue: «Le P.K. adulte est identique au P.K. enfant: il dit ce qu’il pense sans retenue, il manifeste sa joie avec fracas, il fait des pitreries et n’a pas peur des caméras. Peu importe où je vais, tout ce que je fais est grossi au microscope parce que je suis différent. Je l’ai toujours été et le serai toujours. C’est dans mon ADN toute cette exubérance. What you see is what you get

20 h It’s a wrap! C’est dans la poche: P.K. a été immortalisé sur pellicule dans chacun des complets qu’il a créés pour RW&CO., et de façon toujours impeccable. «J’ai horreur des habits trop grands qui tombent mal, c’est le pire faux pas mode à mes yeux», estime-t-il. Après avoir enfilé un jean (plutôt ajusté, vous l’aurez deviné), il me reçoit dans sa loge. Lui qui s’apprête à disputer deux matchs d’affilée, le lendemain et le surlendemain, est encore pétillant d’énergie (je me demande bien où il la puise, d’ailleurs… Car moi, je suis vannée.). De bonne grâce, Subban se prête à un «interrogatoire» plus personnel, répondant avec générosité à quelques autres de mes questions, tant sur sa carrière que sur sa nouvelle ville et sa vie. «Les Predators ne se sont implantés à Nashville qu’en 1998, m’informe-t-il. Ils sont donc tout jeunes, en comparaison des Habs et de leur dynastie centenaire. Mais les fans d’ici, au même titre que ceux de Montréal, connaissent le hockey et communiquent leur passion avec brio. En débarquant ici, confie-t-il, ce qui m’a surtout étonné – outre le fait que le country ne soit pas le seul et unique style musical en vogue! –, c’est l’enthousiasme des partisans. Ils sont bruyants et font littéralement vibrer l’amphithéâtre à chaque match. Et ça, c’est enivrant! Mais à l’inverse des Montréalais qui venaient me questionner ou me demander de prendre la pose avec eux lorsqu’ils me croisaient dans la métropole, les gens de Nashville sont discrets et tendent plutôt à rester en retrait quand ils m’aperçoivent. Tout le contraire de mes nouveaux coéquipiers, qui essaient de me flouer en trichant allégrement aux cartes, dans l’avion. Mais ça, c’est une autre histoire», lance P.K., mort de rire.

 

La collaboration P.K. Subban pour RW&CO

La collaboration P.K. Subban pour RW&CO. Photographe: RW&CO

Samedi 3 décembre 2016, 13 h Par le plus grand des hasards, c’est la journée P.K. Subban, ce samedi-là au Bridgestone Arena. Le numéro 76 figure en une du programme du match, et une casquette à son effigie est remise à tous les spectateurs présents dans les gradins. Ça tombe bien! Or, en dépit de l’atmosphère de fête, les Predators s’inclineront en prolongation contre les Devils du New Jersey. Mais Subban marquera un but, qu’il ne manquera pas de célébrer avec entrain comme à son habitude. Récipiendaire en 2013 du trophée Norris, remis au meilleur défenseur de la Ligue nationale de hockey, P.K. est un gagnant qui rêve des plus grands honneurs sportifs, et ce, même s’il déploie beaucoup d’énergie à mettre sur pied sa marque personnelle et à assouvir ses envies de show- business (il s’est d’ailleurs pris un agent à Hollywood). «Tous les jours, sans exception, admet-il, je pense à la Coupe Stanley. Je rêve de la remporter et de la tenir au bout de mes bras. C’est mon but ultime, pour l’instant.» Malchance: quelques jours plus tard, une hernie discale le mettra hors jeu pour de nombreuses semaines, l’empêchant même d’affronter ses anciens coéquipiers de la sainte Flanelle le 3 janvier 2017. Mais, quelle que soit l’adversité, gageons que Subban n’a pas dit son dernier mot… Et, on le sait, il est volubile, le P.K.! Ses nouveaux partisans, à Nashville, sont déjà derrière lui à 110 %, comme en fait foi ce commentaire du chauffeur de taxi qui m’a conduite à l’aréna: «Vous avez peut-être désormais notre Weber à Montréal, mais ici, on a votre P.K., et c’est très bien ainsi.»