Il y a le «Comment ça va?» de type 1. Le CÇV-1, comme le nomment les spécialistes de la fonction phatique, du fond de leurs laboratoires de sémiotique. On le place au début des conversations, tout le monde répond «Ça va. Pis toi?», que ce soit vrai ou pas, et on passe rapidement aux affaires courantes.

Plus tard dans la conversation, si elle se fait entre deux vrais amis, il arrive que se pointe le «Comment ça va?» de type 2. Formulé un peu différemment («Mais là… toi…, comment ça va?»), il s’accompagne d’un regard qui connecte les âmes.

C’est généralement quand le CÇV-2 montre le bout de son nez que la vraie conversation débute et qu’on se dit Les Vraies AffairesTM. On sait d’ailleurs qu’on tient un ami pré- cieux quand il pose la question. On le sait encore plus quand on se sent capable d’y répondre vraiment, pleurs, sanglots et rires inclus.

Le CÇV-2 fait disparaître momentanément la grande solitude au cœur de l’expérience humaine, une quête qui en amène certains à l’autre bout du monde, mais qu’on peut trouver chez soi, autour d’un café, un dimanche après-midi. Suffit d’avoir les bons amis. (Que ça.)

Finalement, il y a la troisième forme de «Comment ça va?»: la question qu’on pose… à soi-même. C’est une habitude que j’ai prise il y a deux ans, et que j’aurais dû intégrer à ma vie bien avant. À intervalles réguliers, au détour d’un moment en tête-à-tête avec moi-même, je «poppe» la question. «Hey, moi. Comment on va?»

Ça semble bête d’avoir à y réfléchir consciemment. Je devrais déjà savoir la réponse, puisque je passe toutes mes journées en ma compagnie. ( Je suis si attachant.) Et pourtant, cette réponse arrive souvent à me surprendre.

Qu’elle soit un «Ça va pas super» qui nous tire quelques larmes, ou un «Ça va vraiment bien, au fond!» qui étonne, on gagne toujours à la connaître.

Parfois, je me rends compte que ça va moyen parce que j’ignore les demandes, pourtant tout à fait raisonnables, de mon for intérieur. (Quoi? Que dis-tu, for? Je devrais trouver le moyen d’insérer une journée de congé dans ces 21 jours ininterrompus de travail? Peut-être bien…)

Souvent, je découvre que je vais mieux que je ne le pensais. Je constate que si je m’arrête pour faire le décompte des bonheurs, j’ai le plaisir de vivre qui arrive dans le vert. À ce moment-là, non seulement je suis heureux, mais je suis également en train de profiter du fait d’être heureux. Boum! Une double portion de bonheur pour pas plus cher. Merci, CÇV-3!

Parce qu’elle permet de se connecter avec les autres autant qu’avec soi-même et de faire le point sur ce qui compte vraiment, je place la question «Comment ça va?» en 38e position de la liste infinie des choses qui font du bien.

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