«J’adhère complètement à l’idée de réaffirmer la laïcité de l’État et d’encadrer les demandes d’accommodements, déclare Fadoua. Moi non plus, je ne veux pas que ma vie devienne régie par la charia! Là où le bât blesse, c’est dans tout ce que ce débat a suscité comme réactions à propos des musulmans et des femmes voilées. Ça m’affecte profondément.»

«Mais le débat sur la charte était nécessaire, affirme Louise. Le Québec a longtemps formé une société très homogène, blanche et catholique. Nous avons beaucoup souffert du catholicisme – qui n’admettait aucune autre façon de penser – jusqu’à ce qu’on s’en débarrasse. Et là, on accueille (et c’est tant mieux!) des immigrants qui affichent leurs croyances religieuses. J’avoue trouver ça troublant.»

Qui sont les femmes qui ont participé à la table ronde?

«La majorité des musulmans québécois ne pratique pas, répond Fadoua. Mais je crois que le problème se situe sur le plan de la visibilité religieuse dans une société qui ne veut plus entendre parler de religion. Le foulard, on le remarque… N’empêche que la charte ne règle rien à ce sujet: peut-être Suad va-t-elle perdre son emploi, mais vous croiserez toujours des femmes voilées au supermarché.»

«Comme le dit Louise, au Québec, c’est mal vu d’afficher sa foi, dit Marie-Charles. Dernièrement, j’ai commencé à aller à l’église et j’avoue que je suis gênée de le dire… En ce qui concerne la charte, je me considère comme une sorte de « Janette inclusive ». Je comprends le malaise que certains éprouvent par rapport au voile, mais l’identité d’une femme ne se résume pas à son foulard…»

Découvrez les citations inédites de cette table ronde

«Moi, avant cette histoire de charte, je n’avais jamais eu de problème avec personne, y compris après avoir choisi de porter le voile, confie Suad. Je suis très bien intégrée à la société, je vais à de multiples soupers de Noël chaque année, et j’entretenais d’excellents rapports avec mes collègues. Depuis qu’on a commencé à parler de la charte, on m’a insultée dans la rue et on m’a crié de retourner chez moi. Mes relations professionnelles sont devenues très tendues. Et l’État me dit que je ne peux plus travailler pour lui. Mais pourquoi le gouvernement n’a-t-il pas demandé à mon supérieur si je faisais bien mon boulot? Pourquoi n’a-t-il pas mené de sondages et d’études pour vérifier la situation sur le terrain? Ce qui me frustre, c’est qu’on a créé un problème là où il n’en existait pas.

«D’un point de vue féministe, il y a autre chose que je ne comprends pas, ajoute-t-elle. Si certaines femmes voilées sont soumises, pourquoi les empêcher de travailler? C’est leur seule porte de sortie! En les privant d’argent, on leur enlève leur autonomie.»

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