C'est mon histoire
C'est mon histoire: «Mon blogue a failli détruire mon couple»
Pour échapper à la dépression post-partum, Sarah rejoint la communauté des mamans blogueuses. Sa vie sur la toile lui cause bientôt des problèmes...
par : Pascale-Lou Angelillo- 22 mars 2016
Enceinte, je m’imaginais en mère comblée, gazouillant de bonheur avec mon bébé du matin au soir. Pourtant, après la naissance de Léa, je me suis surtout sentie terriblement seule, aux prises avec un puissant baby blues. Trois ans plus tard, quand le petit frère de Léa est né, j’étais bien décidée à lutter de toutes mes forces pour ne pas retomber dans le même état. Gabriel avait à peine un mois que je cherchais déjà toutes les occasions de stimuler mes neurones. Alors que j’attendais à la clinique pour un rendez-vous en gynéco, en feuilletant un magazine pour jeunes mères, je suis tombée sur un article consacré aux mamans blogueuses. Nous étions en 2009: les blogues, c’était encore quelque chose de nouveau à l’époque. Le soir même, je suis allée sur un premier blogue et… j’ai été prise! L’auteure, une jeune maman québécoise active et drôle, représentait tout ce que je rêvais d’être. Elle parlait de son accouchement par césarienne, de l’enfer des couches et des nuits sans sommeil, de ses relations tendues avec les petites gardiennes un peu blasées, tout ça avec un humour formidable! Habituellement, la seule chose qui occupait mon esprit était le sommeil et l’allaitement de Gabriel. Mais ce jour-là, quand il s’est réveillé de sa sieste, je ne l’ai pas entendu, parce que j’étais trop fascinée par les 200 posts que ma nouvelle amie virtuelle avait écrits en un an. Elle en publiait un par jour! Chaque matin, j’allumais fébrilement mon ordinateur pour les découvrir. Bientôt, ça ne m’a plus suffi. Alors, j’ai cliqué sur la liste des blogues qu’elle recommandait et j’ai découvert un univers infini de mamans blogueuses. C’était génial! Il suffisait de quelques clics pour communiquer avec des femmes qui me ressemblaient. Leurs billets et commentaires répondaient à bon nombre de mes questions et me rassuraient. Je me reconnaissais tellement en elles! Je me suis alors dit que, si elles avaient créé leur blogue, je pouvais le faire aussi.
« J’étais aussi très attentive aux commentaires des internautes et quand, un jour, j’ai reçu ma première remarque insultante – «On s’en fout, de ta vie!» -, j’ai été anéantie. »
J’ai commencé par commenter leurs articles, un passage obligé pour faire partie de la communauté des mamans blogueuses. Je le faisais pendant que ma fille était à l’école, durant les siestes de Gabriel et parfois même en allaitant mon fils. J’étais accro à ces blogues, et leur emprise sur moi ne cessait de croître. Enfin, j’ai osé et je me suis lancée. J’ai créé Une mom pas pire et j’ai atteint un nouveau stade dans la dépendance. Je me suis imposé le même rythme que mes consœurs: chaque jour, il fallait publier un billet. Quand je n’étais pas devant mon ordinateur, je restais connectée mentalement à mes articles, ce qui frisait l’obsession. Je passais chaque chiffre à la loupe: nombre de visiteurs, nombre de pages consultées… Je voulais tellement que mon blogue soit populaire! J’étais aussi très attentive aux commentaires des internautes et quand, un jour, j’ai reçu ma première remarque insultante – «On s’en fout, de ta vie!» -, j’ai été anéantie. J’étais beaucoup trop impliquée émotionnellement.
PLUS: C’est mon histoire: «J’ai souffert d’une dépression post-partum»
C’est quand j’ai repris le boulot que les choses se sont vraiment compliquées. Je ne bloguais jamais au bureau, de peur d’être prise en faute et mise à la porte. Mes collègues ignoraient tout de mes activités de blogueuse, et seul mon mari savait que je tenais un véritable journal intime sur internet. Il me restait donc peu de temps pour poster mes billets. Je bloguais le soir, après avoir couché les enfants, durant cette fameuse plage horaire habituellement réservée au temps passé en amoureux avec mon mari. Nos moments coquins de fin de soirée n’étaient plus qu’un lointain souvenir. Une mom pas pire occupait tout mon temps libre, et mon mari et moi n’avions plus une minute d’intimité.
« Je pensais à tous les jolis billets qui accompagneraient ce beau projet: la grossesse, l’attente de l’arrivée du bébé, la «gestion» des trois enfants à la maison… »
Au début, Paul s’est réjoui de ma nouvelle passion. Il savait à quel point ma première grossesse avait été difficile côté moral et que mon blogue m’avait permis d’éviter la déprime post-partum après la naissance de notre fils. Un soir, pour l’une des rares fois ces derniers mois, nous avons retrouvé la flamme de notre amour et nos réflexes de jeune couple. Nous nous sommes longuement embrassés et, un peu soûls, nous nous sommes couchés dans les bras l’un de l’autre. C’est là que Paul m’a proposé de faire un troisième enfant. J’ai souri. Je pensais à tous les jolis billets qui accompagneraient ce beau projet: la grossesse, l’attente de l’arrivée du bébé, la «gestion» des trois enfants à la maison… Quand je lui ai dit ce qui me faisait sourire, Paul a explosé. Il s’est mis à crier: «Je n’en peux plus de cette vie virtuelle qui ruine notre vie!» Rien ne semblait pouvoir calmer sa colère. Le lendemain, il est parti avec les enfants pour la fin de semaine. Sans moi. «Tu pourras mettre ce temps à profit pour bloguer ou pour réfléchir et revoir tes priorités», m’a-t-il lancé en claquant la porte. Je n’en revenais pas. Paul ne s’énervait jamais, et nous ne nous disputions jamais. Depuis la naissance des enfants, nous n’étions jamais partis l’un sans l’autre. J’étais allée trop loin…
Je n’ai pas allumé mon ordinateur du week-end. J’ai beaucoup réfléchi. Notre dispute a agi comme un détonateur. Paul avait raison. Depuis que j’avais créé mon blogue, le moindre fait donnait lieu à un billet que j’écrivais mentalement avant même de prendre le temps de savourer l’événement. Chaque jour, je racontais mon quotidien mais, en réalité, je passais à côté de ma vie. Il était temps de tourner la page. Je n’étais plus dans cet état postnatal qui m’avait poussée à créer mon blogue. Rejoindre cette communauté m’avait permis de me sentir moins seule, mais pas de m’évader de l’univers des couches et des petits pots, au contraire. C’était même mes seuls sujets de discussion en ligne! Et puis, il y avait ce rythme que je m’étais imposé! J’étais exténuée. C’en était trop! Quelques jours plus tard, j’ai publié mon dernier billet pour prévenir mes lectrices que je mettais fin à Une mom pas pire. Puis, j’ai désactivé mon blogue. Nous l’avons fait, ce petit troisième. Antoine a un an aujourd’hui. Pendant mon congé de maternité, j’ai recommencé à consulter les blogues de jeunes mamans. Mais, cette fois, je n’ai eu aucune envie d’y participer. Ma vie de famille, je ne la vis plus en ligne, je la vis au présent.
À DÉCOUVRIR:
C’est mon histoire: «Mon chum, c’est ma maison»
C’est mon histoire: «Ma grossesse m’a réconciliée avec ma soeur jumelle»
C’est mon histoire: «Je me suis inventé un amant»
Infolettre
Abonnez-vous pour ne rien manquer des tendances phares et des dernières actus mode, beauté, célébrités, lifestyle.
À lire aussi dans C'est mon histoire
À lire
Style de vie
Catherine Souffront : âme d’artiste
À 28 ans, Catherine Souffront quittait son poste de procureure de la Couronne pour réaliser son rêve: devenir actrice.
par : Laïma A. Gérald- 18 avr. 2024
VIP
Catherine Souffront est en couverture du magazine ELLE Québec de mai 2024
La comédienne Catherine Souffront est en couverture de notre nouveau numéro, en kiosque dès le jeudi 18 avril. Voici les détails !
par : ELLEQuebec.com- 17 avr. 2024
Mode
Cette marque de bijoux se réinvente et on adore!
Découvrez sept nouvelles pièces de Pandora qui nous font rêver.
par : Elle Québec- 10 avr. 2024