«Un couple n’atteint jamais l’équilibre, précise Yvon Dallaire, psychologue, sexologue et auteur du livre Qui sont ces couples heureux? Dans le meilleur des cas, ajoute-t-il, il recherche l’équilibre.»

Cet équilibre, Cynthia et Éric avouent le rechercher depuis maintenant 25 ans. «Nous nous sommes connus à l’âge de 14 ans. Il y a quelques années, j’ai quitté mon conjoint parce que j’étais convaincue d’avoir fait le tour de notre relation. On se disputait de plus en plus souvent. Je voulais être avec un homme plus présent, qui m’écouterait, avec qui je pourrais parler et m’amuser davantage», raconte Cynthia, qui est revenue au bercail après seulement quelques mois de séparation.

Une lutte pour le pouvoir

Yvon Dallaire est formel. Les disputes dans un couple sont inévitables, voire même nécessaires. Elles témoignent d’une lutte pour le pouvoir, qui permet à chacun de savoir avec qui il est réellement, tout en affirmant ses besoins et ses attentes par rapport au couple. «Par contre, dans l’escalade d’une dispute, il ne faut pas dépasser une certaine limite. On ne doit pas tomber dans la violence verbale et dire des choses qu’on regrettera et qui risquent d’hypothéquer l’amour réciproque. On peut être en désaccord, sans attaquer l’autre», prévient-il.

Le couple est fait pour gérer des crises, selon le psychologue. «De préférence, des crises de croissance, mais dans les faits 50% des couples divorcent, 30% se résignent et s’endurent des décennies et seulement 20% réussissent à être heureux ensemble.»

Les sujets de dispute les plus courants, ajoute-t-il, sont dans l’ordre: l’argent, l’éducation des enfants, les relations avec la belle-famille, la répartition des tâches ménagères, la conciliation entre la vie personnelle, la vie familiale et la vie professionnelle et la sexualité. «Quand on se sépare, non seulement les deux premières sources de conflits demeurent, mais on en ajoute deux autres, à savoir les relations avec les ex et l’éducation des enfants de l’autre», ironise-t-il, persuadé que tous les couples peuvent être «sauvés», s’ils apprennent à partager le pouvoir.

 Partager le pouvoir

Pour apprendre à partager le pouvoir, Yvon Dallaire juge qu’il faut apprendre les différences qui existent entre les hommes et les femmes. Lors de ses consultations, il dit utiliser l’image d’un damier, où d’un côté un partenaire dépose les pièces d’un jeu d’échec et de l’autre, celles d’un jeu de dames. Dès qu’un joueur avance une pièce, son partenaire lui répond que ce n’est pas de cette façon qu’on doit jouer. «Chaque joueur veut jouer à son jeu en même temps. Partager le pouvoir, c’est accepter de jouer au jeu de l’un et ensuite au jeu de l’autre. Mais seulement 20% des couples y arrivent.»

Le couple peut aussi déléguer des pouvoirs à chacun dans différents domaines ou, comme le propose Jacques Salomé, alterner le pouvoir. «Par exemple, si un parent est plus permissif que l’autre avec les enfants, il faut en discuter et déterminer quels sont les terrains, où ils s’entendent dans l’éducation. Ensuite, il peut déléguer certains aspects de l’éducation à l’autre et l’appuyer, parce que les enfants comprennent assez vite qu’il faut diviser pour mieux régner et utiliseront le parent le plus permissif contre le plus disciplinaire», admet-il.

Négocier des ententes à double gagnants

Le couple doit apprendre à négocier des ententes à double gagnants, plutôt que des compromis, et chaque partenaire doit accepter d’être influencé par l’autre. «Si un conjoint vit une grande insécurité financière, alors que l’autre est plus confiant, le couple peut prévoir un poste dans son budget pour les dépenses impulsives et un autre pour l’épargne systématique.»

La négociation d’une entente à double gagnants a été salutaire pour Cynthia et Éric. «Après mon départ, on a réalisé qu’on s’aimait encore, raconte Cynthia. Je suis revenue, mais nous avons dû réajuster plusieurs choses dans nos vies. Nos garçons ont laissé tomber plusieurs activités parascolaires, dont le hockey, pour que mon conjoint puisse être plus présent à la maison. Et, de mon côté, je me suis inscrite à quelques activités pour avoir ma propre vie à l’extérieur de la maison.»

Suggestion de lecture

Qui sont ces couples heureux?, Yvon Dallaire, Option santé éditeur, 2006, 288 pages.