Au royaume de la sexualité, les croyances populaires sont bien ancrées: les femmes auraient moins de libido que les hommes, et ces derniers seraient toujours partants pour essayer de nouvelles galipettes.

Savez-vous quoi? C’est faux! «On présume que ce sont les hommes qui s’ennuient le plus vite et qui trompent leur femme par besoin de nouveauté», note Sonja Lyubomirsky, psychologue et professeure de psychologie à l’Université de Californie à Riverside. «Mais des études récentes montrent que c’est le contraire qui se produit. La passion sexuelle des femmes doit être davantage alimentée par la nouveauté que celle des hommes.» C’est d’ailleurs pour cette raison que les femmes se désintéressent rapidement des ébats sexuels.

Catherine, 32 ans et célibataire, n’a jamais franchi le cap des trois ans avec un homme. «La baisse de désir n’était souvent pas le seul facteur en cause, mais il jouait pour beaucoup dans ma décision de rompre», dit-elle. Même schéma chaque fois: la passion se transformait en une routine qui envoyait valser le désir de la jeune femme. «J’ai eu trois relations qui ont duré près de trois ans. Dans les trois cas, mon chum du moment ne semblait pas vraiment affecté par notre traintrain sexuel, alors que moi, je finissais par m’en lasser.»

Pas de plaisir, pas de désir

Les femmes seraient-elles plus volages par nature que les hommes? Multiplieraient-elles les amants si elles étaient libérées de leur éducation et des règles morales de la société? Difficile à dire, répondent les experts…

Ces derniers sont, en revanche, plus loquaces pour parler des différences entre la sexualité féminine et la sexualité masculine. Il semblerait que le désir chez l’homme soit plus persistant que celui de la femme. «Ça s’explique en partie par le fait que, biologiquement, l’homme est fait pour « produire » le plus grand nombre d’enfants possible», avance Robin Milhausen, professeure de sexualité et de relations familiales à l’Université de Guelph, en Ontario. Sa collègue Sarah Murray et elle ont publié en 2012 une étude auprès de quelque 170 universitaires, hommes et femmes, sur le désir. Constat: la libido des femmes tend à chuter sensiblement au fil des mois passés en couple, alors que celle des hommes persiste. «Il existe plus de 300 facteurs qui ont un impact négatif sur le désir des femmes, indique la chercheuse. La routine au lit est un élément significatif, de même que l’absence de plaisir dans le cas de certaines femmes.»

En effet, selon un sondage publié par la compagnie de condoms Durex en 2012, seulement 31 % des femmes atteindraient l’orgasme durant leurs ébats (comparativement à 84 % des hommes). Un facteur qui explique en partie leur manque d’enthousiasme à l’idée de faire l’amour…

«J’ai rarement le temps de me rendre jusqu’à l’orgasme lorsqu’on fait l’amour, mon conjoint et moi», confie Édith, mère de deux jeunes enfants et en couple depuis six ans. «Depuis quelques années, on fait presque toujours l’amour au lit, aux aurores et rapidement, avant que les enfants se lèvent.» Résultat: un désir en déroute, combiné à une frustration latente, mine la femme de 38 ans. Son conjoint, lui, n’a jamais manifesté de mécontentement à propos de leur vie sexuelle, si ce n’est qu’il trouve Édith pas assez portée sur la chose. «J’ai tenté à quelques reprises de lui parler de mon insatisfaction, en lui disant par exemple que j’avais besoin de plus de temps et de caresses pour jouir. Ça m’a valu quelques soupers au restaurant, mais ça n’a pas vraiment changé les choses!»

Les pannes d’inspiration masculines seraient-elles un facteur important des pannes de désir féminines? «Certainement, répond le sexologue clinicien Alain Gariépy. Les hommes manquent souvent de créativité au lit. Plusieurs d’entre eux – pas tous, bien entendu – possèdent en matière sexuelle des références liées à la pornographie. Ce n’est sans doute pas très imaginatif, et ça n’inspire pas nécessairement toutes les femmes.» De plus, les hommes sont en général moins enclins à puiser en eux de quoi alimenter leur désir. «Une des particularités de la sexualité masculine est qu’elle est davantage axée sur la vue. Les hommes sont excités par quelque chose qu’ils voient, quelque chose de concret, de tangible.» Le spécialiste ajoute que, pour cette raison, ils ne se lasseront pas de répéter les mêmes gestes, et d’être excités par les mêmes scénarios et les mêmes postures. D’où la fameuse routine, qui ennuie leurs partenaires.

L’ennui n’est pas incurable

Les choses sont plus mystérieuses du côté des femmes, ne serait-ce que parce que les chercheurs commencent à peine à s’intéresser à leur désir sexuel. Les femmes elles-mêmes ne comprennent pas toujours bien ce qui le module. Ce qu’on sait en revanche, c’est que «souvent, lorsque les femmes éprouvent peu ou pas de désir, elles croient que c’est leur faute», déplore Sonja Lyubomirsky. Ce qui n’est pas forcément le cas, comme le confirme France, 45 ans. «J’ai mis du temps avant de réaliser que ce n’était pas moi qui avais un problème, mais que c’était tout simplement notre vie sexuelle qui manquait de piquant.» France et son chum vivent ensemble depuis 12 ans. Elle estime que, de la deuxième à la septième années de leur vie commune, sa vie sexuelle a tourné à vide. «J’avais rarement envie de faire l’amour, je croyais que je n’étais pas normale, que j’avais un problème.» Le couple a même failli y laisser sa peau. Mais il y a cinq ans, un sexologue a mis le doigt sur la difficulté: une vie sexuelle monotone, à mille lieues des fantasmes que France alimentait. La solution? Parler. S’ouvrir. Communiquer. «Je me suis rendu compte qu’on ne parlait jamais de sexe dans notre couple, raconte France. Quand j’ai commencé à expliquer à mon chum comment je me sentais – démotivée sexuellement -, que j’aimerais qu’il me fasse telle ou telle chose, qu’on pouvait peut-être considérer d’autres endroits que la chambre à coucher, etc., il s’est dit surpris mais très ouvert.»

Malheureusement, les conjoints ne font pas tous preuve d’une aussi grande ouverture d’esprit. Édith, elle, s’est plutôt butée à de l’incompréhension et à une certaine résistance lorsqu’elle a tenté, quelques fois, d’avouer à son chum son insatisfaction. «Il le prenait personnel; c’est comme si je remettais en question ses qualités d’amant.» Aujourd’hui encore, Édith s’accommode d’une vie sexuelle qui la laisse plutôt froide. «Jusqu’à quand vais-je m’en accommoder? Je l’ignore.»

«Certains hommes peuvent en effet se sentir vexés si leur amoureuse remet en question leur vie sexuelle, fait remarquer le sexologue Alain Gariépy. Il ne faut pas oublier que les hommes subissent une grosse pression sociale pour être toujours à la hauteur.

L’important est de les rassurer et de souligner leurs points positifs.» France a bien compris ça et a pris garde de ne pas faire de reproches à son conjoint. «Pourquoi l’aurais-je fait? Ce n’était pas lui le problème; lui, il était heureux de notre vie sexuelle. C’était moi qui ne m’exprimais pas.»

«Pour que les choses changent, les femmes doivent prendre l’initiative, soutient Robin Milhausen. Elles doivent parler de ce qui les préoccupe et créer les conditions pour obtenir satisfaction.» Encore faut-il que leurs désirs soient réalistes. Si l’idée d’une passion perpétuelle est la seule qui les stimule, la déception sera inévitable. «Dans notre culture, la passion amoureuse est considérée comme un idéal, note Sonja Lyubomirsky. C’est une idée à laquelle il est difficile d’échapper puisqu’elle est véhiculée partout: dans les pubs, au cinéma, à la télé…».

Catherine l’admet, elle carbure à cette passion. «Je sais bien que la passion n’est pas éternelle, mais j’ai beaucoup de difficulté à concevoir une vie de couple sans flammèches! Peut-être que je ne suis tout simplement pas rendue là.» Pour sa part, France, loin d’avoir fait une croix sur la passion, reconnaît que de tels moments sont moins fréquents qu’au début de sa relation. «Et il faut davantage y travailler, en essayant des choses nouvelles, car la passion est moins spontanée.»

Ainsi, qu’elles choisissent d’y travailler ou non, il semble que beaucoup de femmes possèdent en elles une soif d’exaltation sexuelle qui réclame du plaisir; elles ont envie d’être allumées, subjuguées. Qu’est-ce qui expliquerait, sinon, le succès phénoménal d’un roman tel que Cinquante nuances de Grey? «À moins de s’arrêter à la seule idée qu’une femme doit être soumise pour avoir du plaisir, je pense que le message que retirent beaucoup de femmes d’un tel livre est qu’elles peuvent s’approprier leur sexualité, posséder un imaginaire érotique et prendre l’initiative. Ce qui est, somme toute, très positif», conclut Alain Gariépy.

Chasser l’ennui

Quelques idées pour retrouver un peu d’exaltation au lit et éveiller votre créativité:

«Sex»primer

Que ce soit à l’aide de mots crus ou tendres, susurrés ou hurlés, osez verbaliser vos envies, vos fantasmes, vos rêves. Puis, laissez les mots planer dans l’air et faire leur effet, sans attente. Bien sûr, vous pouvez aussi les écrire: lettre, courriel, texto, petit mot glissé dans les poches de sa veste…

Changer de rythme

Vous faites toujours l’amour en 16 minutes? Pourquoi ne pas essayer le slow sexe – regards langoureux dès le matin, longues caresses, préliminaires qui se prolongent. L’amour éclair est une autre option, avec ses étreintes rapides et spontanées, qui peuvent s’avérer, elles aussi, excitantes et intenses.

Nourrir son imaginaire

Laisser traîner un roman érotique ou, mieux, narrez-en des passages à votre amoureux. Mieux encore: inventez vos propres scénarios que vous mettrez en scène. Caméra!

Briser la routine

Au lieu de toujours faire l’amour au lit, pensez à la douche, au salon, à la cuisine, à la voiture… Dans le même état d’esprit, n’hésitez pas à couper court à votre routine en changeant de position, de manies, de type de caresse.

Oser

Peut-être y a-t-il des choses qui vous excitent, mais dont vous n’avez jamais parlé à votre chum. Parce que vous en aviez un peu honte ou que vous craigniez sa réaction. Pourquoi ne pas oser lui suggérer qu’il mette en pratique vos fantasmes: celui d’être attachée de temps en temps, de le dominer, que vous vous déguisiez tous les deux, etc.

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