Elle est tombée. J’étais en position de squat au-dessus de la toilette d’un bar et – maladresse! – je l’ai échappée directement dans la cuvette. Pas le choix, il faudra que je m’achète une nouvelle coupe menstruelle.

Parenthèses pour les non-initié(e)s: il s’agit d’un petit récipient réutilisable en silicone qu’on insère dans le vagin pour recueillir le sang menstruel. Une solution écolo au tampon!

Je me rends donc à la pharmacie, et je remarque que trois choix s’offrent à moi. La taille 0 pour les personnes de moins de 18 ans; la taille 1 pour celles de moins de 30 ans et la 2, plus volumineuse, pour celles qui ont accouché par voie basse, qui ont un flux important OU qui ont entamé leur trentaine.

J’ai 31 ans. Pourtant, quelque chose me retient de prendre la troisième boîte. Quelque chose comme de l’angoisse et un truckload d’amertume. Que s’est-il donc passé dans la nuit de mon 30e anniversaire pour que mon vagin soit soudainement plus spacieux?

Je finis par acheter le plus gros modèle en espérant que mon vagin soit trop menu pour l’accueillir et je partage une photo de ma nouvelle acquisition sur Instagram. Je reçois aussitôt une avalanche de messages privés de femmes me faisant part de leur propre traumatisme, voire de leur honte à l’idée d’être plus larges qu’avant. Mention spéciale à ma voisine, qui m’a texté: «Bienvenue dans le club des vagins vieillissants.»

J’entame des recherches. Sur le site web d’un fabricant de coupes menstruelles (Luneale), j’apprends que le vagin est un organe dont les parois se touchent en tout temps: «Cela signifie qu’il n’existe pas de vagin trop étroit ou trop lâche, en revanche les muscles qui l’entourent (le périnée) peuvent être plus ou moins toniques […] Mais s’il y a un mythe qu’on tient à faire voler en éclats, c’est que tu deviendrais tellement relâchée après 30 ans que ta coupe menstruelle glisserait.»

Merci, c’est gentil. Mais alors, c’est quoi, le souci? Le périnée des trentenaires est-il systématiquement en déclin?

Maryse Chagnon, physiothérapeute en rééducation périnéale, m’éclaire: «L’idée que le tonus du vagin change nécessairement en vieillissant relève du mythe. En fait, c’est une question de génétique, d’accouchement(s) et d’hygiène de vie. Quant à l’âge, le seul facteur déterminant, c’est la ménopause. Là, on ne s’en sort pas: la baisse d’œstrogènes réduit la lubrification des parois vaginales ainsi que leur élasticité. Mais elle n’agrandit pas l’organe. Au contraire, elle pourrait diminuer la capacité du vagin à s’élargir au cours d’une relation sexuelle.»

Selon elle, l’âge n’est pas la donnée la plus fiable pour déterminer la taille idéale d’un récipient menstruel: «Il y a tellement d’autres facteurs qui peuvent entrer en ligne de compte! La génétique notamment, et même la constipation. Une personne qui en souffre fréquemment peut voir les tissus de son vagin se relâcher. De même pour une personne aux prises avec une toux chronique ou qui soulèverait des charges importantes dans le cadre de son travail ou d’une activité sportive.»

Or, vieillissement ou non, cette crainte d’être inadéquate demeure. «Il m’arrive souvent de rencontrer des personnes qui se préoccupent davantage du plaisir de leur partenaire que de leur propre santé, m’explique Maryse Chagnon. Par exemple, je reçois des femmes dans la quarantaine qui s’inquiètent parce que leur conjoint se dit insatisfait. En général, elles vont prendre tout le blâme, alors que lui aussi peut perdre du tonus avec le temps. L’érection va durer moins longtemps, et le pénis va prendre moins d’expansion…»

Noté! Entre-temps, peu importe notre âge, l’important, c’est de se connaître. Certains sites conseillent de s’explorer, d’oser palper et d’enfin comprendre la singularité de notre corps. En cas de doute, on peut évidemment consulter une physiothérapeute. En tout cas, moi, un simple entretien téléphonique m’a réconciliée avec ma nouvelle amie.

Ma belle et grosse amie…