Il y a quelques années, Jessica Hortsmann se faisait un point d’honneur de se présenter à tous ses rendez-vous doux arrangée de façon tout à fait ordinaire! «Je portais un jean et un chandail à capuchon, j’attachais mes cheveux en queue de cheval et je me maquillais très peu. Je ne faisais rien de plus que pour n’importe quelle autre occasion», raconte cette jeune femme de 29 ans qui partage son temps entre Montréal et Princeton, au New Jersey. Non seulement l’apparence n’a jamais trôné au sommet de la liste de priorités de cette brunette au teint basané, mais l’idée qu’on s’intéresse à elle seulement pour ses beaux yeux l’a toujours horripilée.

Comme la majorité des gars qu’elle fréquentait étaient eux aussi plutôt décontractés, Jessica n’a jamais senti qu’elle n’en faisait pas assez. Même que la fois où un homme l’a emmenée dans un bar branché vêtu de son plus beau veston, une boîte de chocolats dans une main et un bouquet de fleurs dans l’autre, elle a trouvé qu’il exagérait! «On ne se connaissait pas du tout, et pour moi, ces attentions étaient complètement artificielles», dit-elle en riant. Pour Jessica, la séduction passe par l’authenticité. «J’ai toujours été comme ça: je suis la même avec les étrangers et avec mes amis proches. Je ne vois pas l’intérêt de cacher des choses ou de jouer un jeu.»
 

Vérité ou conséquences…

Évidemment, on peut être coquette tout en restant soi-même. «Il n’y a rien de mal à rallonger ses cils avec un peu de mascara et à porter des talons hauts pour avoir de plus belles jambes», assure Danièle Parent, animatrice de l’émission Célibataires recherchés et auteure de plusieurs ouvrages sur la séduction et les bonnes manières. L’important, c’est d’aborder la séduction en demeurant celle qu’on est dans la vie de tous les jours. Pourtant, «beaucoup de gens font l’erreur de jouer un rôle quand ils cherchent à plaire, de prétendre être différents de ce qu’ils sont vraiment », explique Danièle Parent. Or, le mensonge n’a pas sa place dans la séduction. «Chassez le naturel et il revient au galop, que ça prenne un mois ou un an. Et quand l’autre s’aperçoit que la relation s’est construite sur des faux-semblants, l’échec est inévitable», explique-t-elle.

«Si on ne peut pas être soi-même au quotidien avec son partenaire de vie, la relation devient vite une cage», commente Marc-André Juneau, sexologue clinicien et psychothérapeute. Oser être vraie et naturelle dès le début a donc beaucoup de sens.

Pour Geneviève, ça va de soi. Quand elle se prépare pour un rendez-vous galant, cette comédienne de 27 ans, joueuse de hockey à ses heures, n’a qu’une chose en tête: se sentir bien. Parfois, elle enfile un jean troué, un t-shirt et un bracelet en cuir; à d’autres moments, elle choisit de porter une jolie robe avec un bas résille. Un peu de mascara, de crayon sur les paupières et de fard à joues complètent le tableau. «J’ai un petit côté rockeuse, avoue-t- elle. Je sais que ça ne plaît pas à tout le monde, mais je me sens belle comme ça.» Son mot d’ordre est la simplicité. «Je ne cherche pas à marquer des points. Si l’autre aime ce qu’il voit, tant mieux. Sinon, tant pis.»

Être sincère

Marie-Laurence Lévesque, une actrice et scénariste de 27 ans, a aussi pour principe d’être elle-même en toute occasion. Son look de prédilection pour une situation de séduction? «Je porte souvent un jean, un haut seyant et des souliers à talons. Je me maquille peu: en général, ça se résume à du mascara, du gloss et un peu de poudre.» Tout comme Jessica, elle s’habille de la même façon pour rencontrer un garçon que pour sortir avec ses copines. «J’estime qu’il faut rester soi-même dans la séduction. Si j’en faisais plus, je ne serais pas moi.»

Être authentique, c’est aussi abolir l’écart entre ce qu’on ressent et ce qu’on exprime. «Une personne authentique est attentive à ses propres perceptions, et ce qu’elle communique est vrai», explique Marc-André Juneau. C’est l’attitude que préconise Marie-Laurence Lévesque: «J’essaie d’être vraie, même quand c’est difficile.» L’été dernier, elle a eu une blind date. «En règle générale, je ne suis pas très à l’aise avec le concept de date. Je préfère laisser le hasard faire son oeuvre et rencontrer un garçon dans une fête chez des amis, par exemple.» Mais comme les entremetteurs étaient pleins de bonne volonté, elle a accepté. L’heure du rendez-vous venue, la nervosité l’a gagnée. «La première chose que j’ai dite quand je suis arrivée, c’est que j’étais nerveuse.» La réaction de son vis-à-vis? Il a admis sa propre nervosité. «Ça a complètement désamorcé la situation, et nous avons passé une super belle soirée, raconte-t-elle. J’ai beaucoup apprécié qu’on ait pu se parler honnêtement, sans prétendre quoi que ce soit.»

 

Vive l’estime de soi!

Évidemment, oser être soi peut se révéler angoissant. Surtout quand l’enjeu est grand. «Le joueur de poker qui mise sa paye hebdomadaire est plus nerveux que celui qui met seulement deux dollars sur la table. De la même façon, plus la personne qu’on rencontre nous fait de l’effet, plus on est nerveux», estime le psychothérapeute Marc-André Juneau.

Le secret? Avoir une bonne estime de soi. «C’est ce qui permet à une personne de s’apprécier, de prendre des risques dans la vie, de se sentir attrayante, d’être consciente de ses préférences et de les exprimer, etc.», poursuit-il. Et comment cultive-t-on cette fameuse estime de soi? Eh bien, de toutes sortes de façons…

Geneviève, elle, a pris confiance en ses propres moyens grâce au sport, notamment. «J’ai longtemps fait du hockey et du soccer de compétition. J’étais bonne et je jouais dans des équipes gagnantes », raconte-t-elle. Ses habiletés sportives lui ont valu la reconnaissance de ses pairs, des membres de son équipe et même des garçons. «Ça a beaucoup nourri ma confiance en moi. Mon corps est capable d’accomplir de belles choses, et j’ai commencé à le voir comme un outil, une façon de me valoriser plutôt qu’une source de complexes.» Tant pis si elle n’a pas le physique élancé d’une mannequin. Les jours où ses «cuisses fortes» l’irritent, elle se réconforte en pensant que, sans elles, son coup de patin serait drôlement moins redoutable.

Pour celles qui n’ont pas l’assurance de Geneviève, la partie n’est pas perdue. On peut entre autres améliorer son estime de soi en cultivant des intérêts et en explorant ses passions, selon Lisa Naylor, experte-conseil en matière d’estime de soi pour la compagnie Dove. «Souvent, les femmes bien dans leur peau sont celles dont l’identité et l’estime de soi ne dépendent pas uniquement de leur apparence. Elles puisent une partie de leur confiance dans le fait qu’elles ont des intérêts, des habiletés, des choses à dire qui les rendent intéressantes dans un contexte de séduction», explique-t-elle.

De plus, en s’investissant dans diverses activités, on augmente ses chances d’être reconnue. «C’est la clé de l’estime de soi, affirme Marc-André Juneau. À partir du moment où on est apprécié par quelqu’un qui compte à nos yeux, on commence à s’approprier une image positive de soi-même.» Par exemple, suivre un cours d’écriture ou se joindre à un groupe de plein air permet de partager ses connaissances, d’être acceptée dans un groupe et de se sentir appréciée par des gens qui ont des intérêts similaires aux nôtres.

Autre façon de nourrir sa confiance en soi: apprendre à accepter les compliments et les marques d’appréciation. «Quand un homme les complimente sur leur jolie robe, beaucoup de femmes répondent: "Ça? C’est juste une vieille affaire!"» regrette Yvan Phaneuf, thérapeute en relation d’aide et auteur de Devenir un homme «vrai» plutôt qu’un «vrai» homme. Pourtant, les petites attentions de ce genre sont essentielles pour alimenter la confiance en soi. «Et pas seulement quand elles viennent de quelqu’un qui nous plaît, insiste-t-il. Les sourires des inconnus dans la rue ou les compliments d’un collègue nous donnent aussi de la valeur.» En réponse, il suffit de dire merci, tout simplement!

Réduire les attentes

Avoir de l’assurance est aussi plus facile quand on n’est pas dans l’urgence de plaire… «Je suis très bien seule, confie Marie-Laurence. Grandir auprès de ma mère dans une famille monoparentale m’a appris que je n’avais pas besoin d’un homme pour parvenir à mes fins, vivre ma vie et m’épanouir.» Du coup, même si elle espère un jour rencontrer l’amour, elle ne cherche pas à plaire à tout prix.

Même son de cloche du côté de Geneviève. Après avoir passé de nombreuses années en couple, elle vit une lune de miel avec le célibat et ne sent pas l’urgence d’entreprendre une nouvelle relation.

Un détachement qui n’est pas donné à tout le monde. Ainsi, les quelque 5000 clients de l’agence de rencontres Intermezzo Montréal ont souvent des attentes démesurées. «Les célibataires ont la fâcheuse manie de gérer leur vie personnelle comme un dossier professionnel: ils veulent des résultats», observe Marie-Hélène Couture, directrice du service à la clientèle d’Intermezzo.

Or, quand on veut plaire à tout prix, c’est difficile d’être soi-même. «Au fond, la seule attente qu’on devrait avoir en allant à un rendez-vous, c’est de vivre un moment agréable en compagnie d’une nouvelle personne», estime Marie-Hélène Couture.

Il faut aussi tenter de se débarrasser de la peur d’être rejetée. «Personne n’aime le rejet, mais tout le monde passe par là un jour ou l’autre. Il faut simplement éviter de le "prendre personnel"», croit Danièle Parent. Un principe auquel Jessica adhère totalement. «Je sais que je suis digne d’être aimée, mais ça ne veut pas dire que je plais à tout le monde, et ça me convient tout à fait.»

L’estime de soi: une denrée rare

Pour séduire au naturel, il faut un minimum d’estime de soi. Malheureusement, beaucoup de femmes en manquent. «Dans mes conférences et mes ateliers, je demande aux participantes d’énumérer ce qu’elles ont de plus beau. La plupart sont incapables de dire quoi que ce soit», raconte Danièle Parent, spécialiste de la séduction. En revanche, quand vient le moment de nommer leurs défauts, elles sont intarissables. «Même les femmes brillantes, belles et articulées se trouvent moches et manquent de confiance en elles», se désole-t-elle.

À l’agence de rencontres Intermezzo Montréal, Marie-Hélène Couture dit pourtant voir de plus en plus de femmes qui sont bien dans leur peau et osent aborder la séduction au naturel… mais il reste du chemin à faire.

Selon une étude récente menée par la compagnie Dove dans le cadre de son Mouvement pour l’estime de soi, à peine 3 % des Canadiennes de 18 à 64 ans se sentent à l’aise de dire qu’elles sont belles. Et seulement 56 % des adolescentes de 15 à 17 ans se disent sûres d’elles. Des chiffres décourageants quand on connaît les effets néfastes d’une faible estime de soi. «Près de la moitié des jeunes filles ont déjà évité d’exprimer une opinion ou de participer à des activités sociales parce qu’elles n’étaient pas à l’aise avec leur apparence», affirme Sharon MacLeod, directrice de Dove. Les femmes plus âgées s’empêchent parfois d’aller à une entrevue d’embauche ou à un rendez-vous chez le médecin, poursuit-elle. «Imaginez quand elles sont dans une relation intime avec un garçon!»

L’avis des gars

Comment réagissent les hommes devant l’authenticité? Ça dépend d’où ils en sont dans leur vie. «Plus un homme est mature sur le plan émotif et a une bonne estime de soi, plus il va apprécier une femme capable d’être vraie et de lui donner l’heure juste», estime le sexologue Marc-André Juneau, qui guide beaucoup de ses clients dans l’art de la séduction.

Au-delà du maquillage, les hommes aiment avant tout la féminité, ajoute Marie-Hélène Couture. «Ils cherchent une femme soignée, capable de mettre son corps en valeur. Ça peut s’exprimer de façon très simple. Par exemple, les ongles peuvent être beaux sans être peints», illustre-t-elle.

«On peut être féminine en se levant le matin, sans artifice, renchérit Danièle Parent. C’est plutôt une question d’attitude, de grâce, d’élégance.» De fait, quand on pose la question aux principaux intéressés, le mot «attitude» revient souvent dans leur bouche pour définir la féminité. «Ce n’est pas une question de robe ni de maquillage, dit Yves. Ça renvoie plutôt à une certaine élégance, une délicatesse, une manière de s’asseoir, de marcher ou de sourire.» «Peu importe qu’une fille porte du rouge à lèvres ou pas, un jean ou une robe, la féminité tient à son langage corporel, poursuit Luc. Très loin du tomboy, elle dégage une aisance naturelle et quelque chose de gracieux, de félin, de sensuel.»

Jusqu’à maintenant, Geneviève a l’impression que son approche 100 % naturelle plaît plus qu’elle n’effraie. «Mais je sens que ça peut en intimider certains. » Malgré cela, elle garde le cap. «Si je suis en harmonie avec moi-même et avec ce que je ressens dans le moment présent, l’autre personne le perçoit et se permet d’être vraie à son tour», affirme-t-elle. La table est mise pour une certaine réciprocité. «La rencontre ne débouchera peut-être pas sur une relation, mais au moins, on ne joue pas de rôle. Il y a un véritable échange.» C’est déjà énorme!

 

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