Pourquoi avez-vous décidé d’être photographe street style?

Je m’y suis mis sur un coup de tête. J’aimais la photographie, donc j’ai commencé à prendre des clichés de n’importe quoi. En regardant mes photos de plus près, je me suis rendu compte que celles que j’aimais le plus croquaient des gens qui avaient un certain style. Comme j’avais une formation en mode, je me suis dit que j’avais certainement l’œil pour ce genre de choses. Je me suis lancé… et ça a marché!

Qu’est-ce qui vous donne envie de photographier quelqu’un?

Les raisons sont différentes à chaque fois. Je peux être attiré par les vêtements, la coiffure, la personnalité d’un(e) passant(e)  ou la façon dont il/elle se tient… Il y a toujours un élément primordial qui ressort dans chacun des clichés. Mes photos ne s’intéressent pas seulement à la tenue: les vêtements sont là pour raconter une histoire. Il en est de même pour les costumes de films.

Alors, quel est le secret pour avoir du style?

Les personnes que je connais qui ont du style ressemblent à elles-mêmes et à personne d’autre! Leur look évolue, certes, mais il y a toujours une cohérence dans leurs tenues. L’important n’est pas de porter une pièce de tel ou tel designer. Par contre, faire retoucher nos trouvailles est un bon début: avoir des vêtements à la bonne taille aide à sublimer la silhouette!

 

Scott Schuman The Sartorialist

Crédit: Instagram @thesartorialist

Où trouve-t-on les gens les plus stylés à New York, où vous habitez?

J’aime aller photographier downtown. L’ambiance est cool et relax, et l’arrière-plan est idéal. Il y a des styles fabuleux uptown, mais c’est plus formel.

Et dans le monde, quelle ville détient le record de street style?

Montréal, bien évidemment! (rires) Je plaisante, je ne suis malheureusement ici que depuis 24 heures. Selon moi, l’Italie est un vivier de gens bien habillés. Prenez Milan: c’est une petite ville, mais la plupart de ses habitants gagnent leur vie en rapport – de près ou de loin – avec le style, que ce soit parce qu’ils travaillent en mode, en design d’intérieur ou en architecture. Le nombre de personnes stylées au kilomètre carré est énorme, et je ne parle même pas de Florence et de Rome!

Sur Instagram, on peut facilement se sentir photographe pour peu qu’on joue avec les filtres. Vous, c’est votre métier…

Beaucoup de gens se croient photographes, mais ce n’est pas parce qu’on publie un cliché en ligne qu’il véhicule une émotion. La photographie, c’est un vrai métier. On doit sans cesse penser à son audience, à la façon de communiquer de la bonne façon, etc. Cela dit, c’est le premier outil de communication en ce moment, du moins pour la mode, devant les magazines. Et c’est surtout une source d’archives incroyable! On n’a jamais connu ça dans l’histoire du monde. Dans le futur, on sera capable de regarder en arrière, et de voir ce qui était important pour telle ou telle génération.

 

Scott Schuman The Sartorialist

Crédit: Instagram @thesartorialist

Quel précieux conseil vous a-t-on donné dans votre carrière, et qui vous est utile encore aujourd’hui?

Je l’ai reçu d’Angela Ahrendts. Pendant longtemps, elle a été à la tête de Burberry, avant d’être récemment engagée comme vice-présidente senior chargée des boutiques Apple. L’année dernière, elle était d’ailleurs la femme la mieux payée des États-Unis! Elle m’avait engagé, il y a de ça 26 ans, alors qu’elle travaillait pour un designer peu connu. Ce qu’elle m’a dit m’a marqué: «Pour réussir, il faut être à l’aise d’être mal à l’aise.» J’en ai tiré qu’il fallait que je sois capable de sortir de ma zone de confort, d’essayer de nouvelles choses. On m’a proposé récemment de jouer dans une vidéo. Ce n’est pas quelque chose que j’aime particulièrement faire, mais c’est un bon défi. Et l’argent que je gagne en faisant ça me permet de financer la photographie.

Pensez-vous que vous serez comme Bill Cunningham, à photographier les créatures de mode passé les 80 ans?

Je l’espère! J’ai toujours respecté sa façon de travailler fort, et ce jusqu’à la fin. On se retrouvait souvent aux mêmes endroits, et j’ai essayé de créer – sans succès – une relation avec lui. Il n’entendait pas très bien, ce que beaucoup de gens ignorent, donc il ne communiquait déjà plus très bien quand je l’ai rencontré. J’aimerais pouvoir moi aussi être suffisamment en forme pour photographier les gens jusqu’à la fin de ma vie, mais si je ne le suis pas, j’aimerais avoir une librairie. Je n’y offrirais que des livres très chers. Je n’en vendrais aucun, mais je rencontrerais un tas de gens.

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