Dans le clip de son grand succès Good Days, la chanteuse SZA se métamorphose en une plante qui ondule au cœur d’une forêt mystérieuse, entourée de champignons géants. La scène, chimérique, reflète le brouillard à mi-chemin entre le réel et l’irréel que les champignons magiques sont réputés provoquer. Pendant que la psilocybine (le composé hallucinogène d’un champignon), le LSD et la kétamine font l’objet de recherches dont certaines aboutiront à des traitements thérapeutiques, leur représentation psychédélique infiltre la mode. «[Leur effet hallucinatoire] est une illusion qui est vraie aussi, d’une certaine façon», dit Anja Charbonneau, éditrice de Broccoli, un magazine centré sur la culture du cannabis, à propos de notre intérêt croissant pour les champignons, qui fascinent le monde depuis des millénaires. Cet automne, elle et son équipe publieront Mushroom People, une immersion dans le monde fascinant de ces organismes à ce point uniques qu’ils ont droit à leur propre règne dans la classification du monde vivant. «On leur associe un côté magique, ajoute-t-elle. Ils permettent d’accéder à quelque chose d’éphémère qui transcende la réalité, mais qui reste tout de même très naturel.»

Du côté des passerelles, les défilés printemps-été 2021 ont amené un vent de changement, parfois tripant. Dries Van Noten, qui ne lésine jamais sur les palettes kaléidoscopiques, a créé des imprimés solaires inspirés par le travail de l’artiste Len Lye, pionnier de la peinture sur celluloïd dans les années 1920. Chez Valentino, les motifs floraux ont pris de l’ampleur dans un clash de couleurs, Raf Simons a opté pour des tourbillons violets à l’esprit seventies, et Tom Ford a proposé un imprimé animalier, injecté d’une dose de glamour, légèrement décalé, comme un zèbre fondant sous le soleil. Reine d’une esthétique à la fois punk et féminine, Molly Goddard est passée de l’autre côté du miroir en mariant des carreaux d’un vert sous acide à des volants roses et orange vibrants, alors que Christopher John Rogers a préféré mêler des rayures aux couleurs saturées pour donner un effet intoxicant.

Certes, la psilocybine fait les manchettes, mais il serait dommage de ne voir dans les êtres fongiques que la possibilité d’un trip au pays des merveilles. En mars, la marque de luxe Hermès a annoncé qu’elle produirait certains de ses sacs à partir de mycélium, les racines souterraines du champignon, comme solution écoresponsable au cuir. «Un champignon peut être moche et repoussant, mais il peut aussi être remarquable, dit Anja Charbonneau. Pour les créateurs qui ont besoin d’une source d’inspiration, disposer d’une telle variété, d’un énorme spectre à la fois étrange et beau, c’est vraiment puissant.» Et le résultat est là, sur des silhouettes psychédéliques, délirantes et terriblement tendance!

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