5 octobre 2021. J’ouvre grand les rideaux de ma chambre d’hôtel, qui donne sur les toits d’un Paris gris et pluvieux. Ma jupe midi en soie et mes sandales resteront au chaud. J’opte plutôt pour un t-shirt blanc et un pantalon noir, que j’enfile avec une veste bomber matelassée et une pochette gracieusement prêtées par Chanel pour l’occasion. Dans le doute, le style nonchalant des Parisiennes est toujours une valeur sûre.
À 9 h 45, j’arrive place Joffre, au pied du Champ-de-Mars, dans un bal de parapluies et de voitures noires. Le Grand Palais – lieu emblématique des défilés de la maison de luxe – est en rénovation, et c’est au Grand Palais éphémère, une salle d’exposition temporaire proche de la tour Eiffel, qu’a lieu le dévoilement de la collection prêt-à-porter Chanel printemps-été 2022 dessinée par la directrice artistique Virginie Viard. Je passe rapidement devant les photographes et les habituées du street style qui prennent la pose. Après vérification de mon invitation – et de mon passe sanitaire! –, je me faufile dans l’antre du défilé, l’un des plus courus de la Fashion Week. Après 20 mois de pandémie, il est facile de présumer que les équipes et les invités présents se réjouissent, tout comme moi, de pouvoir assister à ce show en présentiel.
Au milieu des célébrités, des journalistes et de quelques influenceuses triées sur le volet, j’aperçois des dames, d’illustres inconnues à l’élégance singulière. Des clientes de longue date, me dis-je. Sous les masques de protection pour le visage, de rigueur, on devine l’effervescence des retrouvailles, l’envie de vivre pleinement ce moment de grâce. Et cette foule hétéroclite, que j’imaginais intimidante, se révèle authentique et bienveillante.
Je me fraye un chemin jusqu’à mon siège, situé à quelques mètres de la passerelle, autour de laquelle ont déjà pris place de nombreux photographes. «La mode, ce sont des vêtements, des mannequins et des photographes», puis-je d’ailleurs lire dans la note d’intention du défilé, écrite par Virginie Viard. Dans cet espace confidentiel à l’ambiance feutrée qu’est le Grand Palais éphémère, elle a souhaité recréer l’émotion des flashs des appareils photo qui crépitaient autour des podiums dans les années 1980.
Assise devant moi, Sophie Fontanel, autrice et célèbre critique de mode, me glisse à l’oreille qu’elle trouve le décor et l’ambiance intimistes. Un peu plus loin, j’aperçois Lily-Rose Depp, Charlotte Casiraghi, Caroline de Maigret et Kristen Stewart, égéries Chanel, qui prennent place au premier rang.
Les premières notes d’Aline, du chanteur français Christophe, s’égrènent. Sur la passerelle, la mannequin Vivienne Rohner ouvre le bal en maillot de bain, avant de laisser la place à Anna Ewers, vêtue d’un bikini noir souligné d’un ourlet blanc et accessoirisé de ceintures fines qui mettent sa taille en valeur. Avec sa crinière blonde et son sourire franc, elle évoque Claudia Schiffer, qui enflammait les passerelles dans les années 1990, ou encore Brigitte Bardot, icône française des sixties sous le soleil de Saint-Tropez. Le ton est donné!