Enfant, on l’a vue napper ses lèvres de rouge, parfumer ses poignets, courir chez le coiffeur ou à son cours de yoga. On a même fouiné dans sa trousse à maquillage, pour l’imiter et ainsi découvrir les secrets de sa féminité. Avec les années, on a suivi (parfois en rechignant) ses conseils avisés: «N’oublie pas ton écran solaire!», «Ne touche pas à tes boutons!», «Attention aux bains trop chauds!», et quoi encore? Puis, au moment où on s’est construite en tant que femme, on s’est mise à partager avec elle nos produits de soins bios et les tutos de nos youtubeuses beauté préférées. Dans la foulée, notre maman a été la première à nous parler de l’importance d’aimer notre corps et d’en prendre soin, peu importe les diktats ambiants. Bref, elle a façonné notre rapport à la beauté et à notre estime de soi, tout en nous transmettant parfois – à son insu – ses propres insécurités, mais aussi sa fierté d’être une femme. Cet héritage maternel, chaque fille le porte en elle. Et si on le célébrait?

Claudine de Repentigny: directrice du bureau de Montréal de Judy

«Ma mère, d’une grande beauté, a toujours privilégié le naturel et l’élégance discrète. Sa seule coquetterie? Avoir des cheveux impeccables! Elle allait chez le coiffeur chaque semaine. C’était sacré pour elle. Évidemment, le vent était son pire ennemi, mais ça ne l’a pas empêchée de conduire une décapotable… dont elle n’a jamais baissé le toit! (rires) Même si ma mère restait à la maison pour s’occuper de sa famille, elle était toujours bien mise. Je me souviens des effluves de son parfum (Bal à Versailles, de Jean Desprez), qui flottaient inlassablement dans l’air quand on rentrait de l’école… J’ai hérité de sa vision pure de la beauté: très peu de maquillage, des crèmes de soins pour le visage de grande qualité et une protection élevée contre les méfaits du soleil, “un poison, entre midi et deux heures!”, comme elle me l’a si souvent répété. Ma mère, Lucie, est un modèle de sérénité et d’authenticité: à 75 ans passés, elle n’est pas “retouchée” et elle respire la jeunesse. Elle inspire ma quête constante d’équilibre, en beauté comme dans la vie en général.»

 

Rebecca Döry et sa mère, Susan

Rebecca Döry et sa mère, Susan Image par: Attila Döry

Rebecca Döry: étudiante en design graphique et mannequin

«Avec la pression des réseaux sociaux, c’est précieux d’avoir une mère qui n’est pas superficielle! Ma maman, Susan, est un modèle de femme positive, indépendante et vraiment bien dans sa peau. Dès que j’ai un doute, elle me rassure et me rappelle combien c’est essentiel de croire en soi. Elle me répète aussi que la beauté physique, ce n’est pas tout dans la vie, que je dois aussi prendre soin de mon corps pour être en santé. Ses conseils beauté? Garder ma peau impeccablement propre – on partage d’ailleurs le même démaquillant de Bioderma – et avoir la main légère, côté maquillage. Avec elle, j’ai appris que, pour mettre mon visage en valeur, “less is more”. Du mascara, un peu de gloss rose, et le tour est joué. De mon côté, je lui refile des trucs que j’ai appris des maquilleurs et des coiffeurs, lors des séances photos. On aime bien commenter le look de l’une et de l’autre, surtout avant de sortir. Et ce qui rend ma mère encore plus belle, c’est qu’elle ne sait pas à quel point elle est magnifique!»

 

Karla Étienne et sa mère, Hortense

Karla Étienne et sa mère, Hortense. Image par: Ralph Balian

Karla Étienne: danseuse et directrice adjointe, Zab Maboungou/Compagnie Danse Nyata Nyata

«Ce que m’a transmis ma mère, Hortense, c’est une approche globale en matière de bien-être. Elle a toujours insisté sur l’importance d’une hygiène minutieuse. Elle m’a appris à faire ma toilette du matin et du soir, à me frictionner sous la douche et à prendre soin de ma peau, de mes dents, de mes cheveux, de mes ongles… Dans notre culture [haïtienne], la négligence corporelle peut refléter un malaise de l’âme. Alors, on mise beaucoup sur le paraître. Pour nous, la coiffure est un art! Ma mère a toujours choisi les meilleurs shampoings et huiles pour revitaliser et embellir nos cheveux, souvent très secs. Quand j’étais petite, elle me disait aussi de me tenir droite. Mais dans la transmission, tout ne passe pas par les mots. Les façons d’être et de faire [de notre mère] jouent également un grand rôle. J’ai beaucoup appris d’elle par mimétisme! Aujourd’hui, quand je vois que ma mère a pris le temps de se faire belle pour sa famille, ça m’émeut. Pour moi, le fait de prendre soin de soi n’est pas qu’égocentrique, c’est une forme de respect envers les autres…»

Ma fille, mon miroir

Trois façons de permettre aux filles de s’épanouir en beauté, selon la Dre Stéphanie Léonard, psychologue et auteure de Miroir miroir: Vivre avec son corps (Éditions La Semaine).

1. Le premier modèle 

«La mère reste un point de repère déterminant pour sa fille en ce qui concerne l’identité féminine. Plus la mère a confiance en elle, malgré ses imperfections, plus elle transmet un modèle positif à sa fille. En revanche, plus la mère adhère aux stéréotypes irréalistes de la société, plus la fille peine à être bien dans sa peau. C’est pourquoi il faut aller chercher des outils pour, tout d’abord, se sentir bien comme mère.»

2. Le guide intime

«Certes, la complicité mère-fille favorise le dialogue et permet d’aborder des enjeux délicats (dont l’image corporelle), mais la mère doit rester un guide. Car, en matière d’estime de soi et d’apprentissage de la féminité, la fille recherche une mère, pas une copine.»

3. Un comportement cohérent

«Ce qui a le plus d’impact, c’est ce que la mère fait et non ce qu’elle dit. Une fille dont la mère vante la beauté au naturel, mais qui ne sort jamais sans se maquiller, s’imprégnera plus de son comportement contraignant que de son discours positif. La cohérence entre nos paroles et nos actes constitue le plus bel héritage à léguer à nos filles.»