En 2011, quand j’ai ouvert le bar Royal Phoenix, un pilier de la vie nocturne queer montréalaise, je m’étais engagée à créer un espace qui rapprocherait les gens. À l’époque, j’étais très investie en tant que coach d’une équipe féminine de roller derby et je voulais offrir à mes joueuses un endroit où elles se sentiraient en sécurité et bien dans leur peau.

Pendant cette période, j’ai pris une décision que bien des gens de mon entourage ont jugée radicale: celle d’arrêter de boire. Bien que concilier mon statut de propriétaire de bar et celui d’athlète ne m’ait jamais posé problème, c’est comme si ça les avait choqués. Ils s’entendaient pour dire que j’aurais de la difficulté à renoncer à l’alcool dans un environnement où l’alcool était omniprésent. La sobriété était presque perçue comme un non-sens.

De nos jours, on remarque que les jeunes générations qui arrivent à l’âge légal de boire ont fortement tendance à modérer leur consommation. Les mocktails, tout comme les bières, les vins et les spiritueux sans alcool, se retrouvent de plus en plus souvent sur les menus des bars et des restaurants, marquant l’avènement d’une nouvelle ère. Mais le paysage était bien différent il y a plus de 10 ans.

Il n’en demeure pas moins que l’alcool nous est encore proposé dans pratiquement tous les contextes. Les normes sociales et culturelles ont la vie dure! Or, choisir volontairement de ne pas boire ne veut pas nécessairement dire qu’on est alcoolique ou toxicomane. Personnellement, cette décision n’était pas à la suite d’un quelconque traumatisme antérieur. En tant qu’athlète et entraîneuse, j’ai toujours fait attention à ce que je consommais sur le plan nutritionnel. J’en étais arrivée à un point où boire de l’alcool ne correspondait plus à mon mode de vie, qui devenait plus sain d’année en année. Je me suis aussi rendu compte que j’aimais la clarté et la présence d’esprit que m’assurait la sobriété. Je n’avais pas besoin d’alcool pour m’amuser et décompresser. En fait, après avoir quitté le Royal Phoenix, j’ai réalisé que ce que j’avais le plus apprécié, c’était l’atmosphère et l’énergie qui régnaient dans cet espace que nous avions mis tant de cœur à bâtir. En tant qu’entraîneuse, je veille maintenant à ce que ça fasse partie intégrante des séances avec ma clientèle. 

En septembre dernier, les directives canadiennes en matière de consommation d’alcool ont été révisées pour la première fois depuis 2011. Alors qu’auparavant, on recommandait de boire moins de 12 consommations par semaine, ce chiffre est passé à un seuil de 2 par semaine. (La quantité varie en fonction du pourcentage d’alcool qu’une consommation contient. Par exemple, 12 oz pour de la bière ou du cidre, 5 oz pour du vin, 1,5 oz pour un spiritueux). Passé ce seuil, le risque de développer des maladies cardiovasculaires ou de subir un AVC augmenterait, en particulier chez les femmes, dont le cœur se détériore plus vite que celui des hommes. Sans préconiser une sobriété totale, le message est clair: moins, c’est mieux.

Ayant opté pour la sobriété pour être en cohérence avec mon style de vie, je dois encore composer avec des situations où l’alcool est le principal vecteur social, comme des fêtes ou des événements. Dans ces cas-là, les gens se demandent souvent s’ils devraient s’abstenir de boire en ma présence. Ça ne leur traverse pas l’esprit de se dire que je préfère ne pas boire, et même que je suis plus à l’aise à jeun!

À en croire mes expériences passées, commander une boisson non alcoolisée peut être une façon efficace de gérer ce genre de situation. Se faire bombarder de questions et devoir se justifier à répétition peuvent devenir épuisants. Avoir un mocktail ou une eau pétillante à la main permet de prendre part au toast, de siroter quelque chose en même temps que tout le monde et de boire un verre en discutant. En somme, on risque moins de se sentir exclue pour une raison ou pour une autre.

Dans le temps des fêtes, la consommation d’alcool, et surtout le fait de ne pas boire, fait souvent (trop) jaser. Si on a décidé d’opter pour la sobriété, certaines stratégies peuvent nous aider à préserver notre bien-être émotionnel pendant les nombreuses interactions sociales prévues ces prochaines semaines. Que ce soit à un party du jour de l’An ou dans un souper de famille, on en arrive inévitablement à devoir s’expliquer encore et encore. Or, la sobriété volontaire est une résolution consciente qu’on prend pour soi, et non une démonstration de supériorité morale face aux autres. C’est une décision personnelle qu’on devrait assumer publiquement, sans toutefois sentir qu’on a à la justifier, aussi joyeuses que soient les festivités. Pourquoi ne pas plutôt la célébrer? À votre santé — physique et mentale! 

Val Desjardins, propriétaire du Studio MTL et entraîneuse personnelle.

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