J’ai un visage relativement symétrique, agréable. Seul hic, mon nez. Certains diront qu’il me donne du caractère, avec sa petite bosse sur l’arête. Sauf que moi, il me dérange. Or, dans quelques minutes, ce nez un peu volontaire sera chose du passé. Enfin, c’est ce que promet le docteur Arthur Swift, chirurgien esthétique, dans la salle d’attente duquel je me trouve.

Bref coup d’œil autour de moi. Chic endroit. Chics patientes, aussi: foulard Hermès, ongles manucurés, chaussures de designer. Mais pourquoi ces femmes, déjà parfaites, sont-elles ici? Pour quel problème consultent-elles?

Et moi? Pourquoi suis-je ici? Rencontré lors d’une conférence, le chirurgien m’a promis de corriger mon petit défaut sur le nez avec une injection «absolument sans risques». Sa technique? La «BEAUTIPHICATION», basée sur le concept ancien du «nombre d’or» (phi) ou «divine proportion». Selon le docteur Swift, ce rapport mathématique peut être utilisé en tant que chiffre standard pour avoir de meilleurs résultats lorsqu’on procède à une injection. Tout visage esthétiquement parfait serait donc construit selon ces proportions, à l’instar de l’architecture classique, la sculpture grecque ou… le visage d’Angelina Jolie. Ressembler à Angelina Jolie? Tentant. Assez pour passer sous l’aiguille?

La chirurgie esthétique non invasive, une tendance qui monte

Développée il y a quelques années, comme alternative à la chirurgie esthétique classique, la chirurgie esthétique non invasive gagne en popularité. Moins risquée, moins coûteuse, plus rapide, elle fait de plus en plus d’adeptes, tant du côté des patients que des praticiens. Tellement que la demande de chirurgie classique, comme les liftings complets, tend à diminuer, explique le dermatologue Jean-François Tremblay: «Avant l’avènement des techniques moins invasives, les patients étaient dirigés vers la chirurgie classique faute de meilleures méthodes. Aujourd’hui, les injections et les lasers permettent d’adresser les cas légers à modérés, de façon parfois supérieure au lifting».

Le docteur Tremblay explique qu’on parle de chirurgie non ou minimalement invasive lorsque la convalescence est courte. Selon lui, cette terminologie reflète une tendance de plus en plus grande vers les chirurgies et techniques de rajeunissement «en douceur et ayant pour but de rafraîchir l’apparence de façon progressive et naturelle, tout en minimisant les impacts».

Dans ce domaine, les innovations se bousculent. Laser, injections de produit de comblement, mini-lift. Comment s’y retrouver? Selon le docteur Jean-Pierre Daigle, chirurgien plasticien, à chaque problème sa solution: si un lifting complet permet de redessiner les contours du visage, il ne permet pas de regonfler les lèvres. L’utilisation du laser ou les injections d’un produit de comblement est alors requise. Le dermatologue Jean-François Tremblay n’hésite pas à combiner diverses techniques: «Les techniques varient selon les besoins des patients. Par exemple, il faut souvent combiner la microliposuccion avec le minilift afin de bien raffermir et redéfinir les contours».

Les risques

Or, si la chirurgie non invasive se dit plus sécuritaire, elle n’est pas non plus à prendre à la légère. Selon le docteur Jean-Pierre Daigle, «toutes les chirurgies ont des risques». Par exemple, la quantité de produit injecté peut être inadéquate, ce qui crée une augmentation de la pression dans les tissus et réduit la circulation sanguine. Dans le pire des cas, cela peut mener à la nécrose des tissus, qu’on devra alors enlever par chirurgie. Conséquence moins grave, mais tout aussi fâcheuse: on peut aussi se retrouver avec une lèvre ou un côté du visage asymétrique.

Et puis, il y a toujours le risque qu’on regrette la procédure, surtout si on ne prend pas la décision pour les bonnes raisons. Comme l’explique le docteur Daigle, un événement ponctuel, comme un mariage ou une soirée de gala, ne constitue en aucun cas une motivation valable. N’oublions jamais que, même si les résultats sont temporaires (comme dans le cas du JuvédermMC ou du BotoxMC), ces produits comportent des risques. Surtout lorsqu’ils sont utilisés de façon répétée sur une longue période, comme l’explique le docteur Daigle, «une telle utilisation peut générer des séquelles au niveau des tissus vivants et rendre plus risquées les interventions subséquentes». En clair, on ne sait pas comment le produit risque de réagir à la longue. Il n’existe pas encore d’études concluantes sur les effets à long terme de ces procédures, trop récentes.

14:10 – Dans la salle de chirurgie

C’est l’heure. Le chirurgien prend mes mesures. Mes proportions respectent le phi et mon visage est symétrique. Génial. Mais que faire de mon nez? Le docteur Swift me propose alors de procéder à une injection de JuvédermMC, un produit de comblement à base d’acide hyaluronique obtenu par biosynthèse. Le produit n’est pas d’origine animale, ce qui évite tout risque d’allergie. On l’utilise le plus souvent pour augmenter le volume des lèvres ou combler les contours du visage, mais le docteur Swift s’en sert aussi pour modeler l’arête du nez. Quinze minutes, aucune douleur, retour au boulot possible tout de suite après. Sounds good. Trois secondes de réflexion plus tard, je fonce.

14h30 – Quatre injections plus tard

Quatre injections plus tard et une bosse sur le nez en moins, je ressors, ravie, du bureau du docteur Swift. J’ai un peu mal à la tête et au nez, et la vague impression qu’on m’a jeté une balle de glace en pleine figure!

14h45 – Retour au boulot
Quinze minutes après, je suis de retour au bureau, faisant bien attention de ne pas toucher à mon nez puisque le produit est modelable pendant les trois heures qui suivent l’injection. Aucune réaction de mes collègues qui n’ont remarqué qu’un petit changement, sûrement dû à la légère enflure.

7h00, le lendemain. – Doute
Je me réveille le lendemain et je ne me reconnais plus: ce n’est pas mon nez. Celui qui me dérangeait depuis toujours. Parti et remplacé par un beau nez, parfait, mais quelconque. Et ça y est, je commence à regretter ma décision. Il faut que je parle au docteur Swift: selon lui, il est possible de retirer le produit en injectant une substance qui le fera se dissoudre. Je suis plus que tentée par cette option.

9h05 – Panique
Mal de bloc monstre. Moment de panique. Je dois rester calme. Difficile, lorsqu’on est préoccupée par son apparence… et hypocondriaque en plus! Je tente de joindre le docteur Swift. On me répond qu’il est en chirurgie pour la journée et qu’il me rappellera en soirée. Pas le temps de patienter, d’autant plus que mon mal de tête semble empirer. Et si l’aiguille était entrée trop profondément dans l’arête du nez? Je contacte derechef une autre clinique. On me répond que la douleur est due au fait que je ne porte plus mes lunettes depuis deux jours et que mes yeux sont fatigués. Ouf!

9h10 – Re-doute
Les propos du docteur Daigle, que j’ai rencontré plus tôt dans la semaine, me reviennent en tête: «Ce type d’intervention doit être motivé par les bonnes raisons». Hum! aucune mention de la rédaction d’un article dans la liste des bonnes raisons.

Deux jours plus tard
Les jours ont passé et ma fixation sur mon nez aussi. Je n’ai pas rappelé le docteur Swift pour entamer une procédure de dissolution du JuvédermMC. En fait, mon nez ne m’importe plus. Il est bien ainsi, tout neuf, tout beau, mais il l’était tout autant avant.

Est-ce que je vais le refaire? Je ne crois pas. Cette légère imperfection fait partie de moi, elle me définit. Et, surtout, j’ai appris à l’accepter. Est-ce que je le conseille? Tout dépend de notre capacité à vivre avec nos défauts, et de nos priorités: n’oublions pas que ce type de chirurgie doit être réitéré tous les six à huit mois (dépendamment des patients), ce qui garantit une relation à long terme avec son chirurgien – et une facture plutôt salée. Le coût d’une injection de JuvédermMC est fixé à environ 750$ par seringue, mais on n’en utilise pas toujours la totalité. Il est possible de récupérer le contenu non utilisé pour les interventions subséquentes. Si on calcule qu’il nous faudra probablement deux traitements par année pour maintenir les résultats, le processus coûterait plus de 7000 $ au bout de cinq ans. La perfection a un prix!

 

Le docteur Jean-Pierre Daigle est chirurgien de reconstruction et chirurgien plasticien, directeur du Centre de Médecine et de Chirurgie Ambulatoires Isomed : http://www.isomed.ca/

Le docteur Arthur Swift est chirurgien plasticien, directeur de l’Institut de Chirurgie Plastique de Westmount et directeur médical du spa médical Victoria Park: http://www.drarthurswift.com/fr

Le docteur Jean-François Tremblay est dermatologue spécialisé en rajeunissement par injection, chirurgie laser et esthétique, co-fondateur et directeur médical de l’Institut de Médecine Esthétique MédIME: http://www.medime.ca/

 

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