Des régimes, il y en a une multitude – le Atkins, le Mayo, le Scarsdale, le Slim Data, le Montignac, etc. La sensation de l’heure? Le paléolithique, qui consiste à manger comme nos ancêtres d’il y a plus de 10 000 ans, soit avant l’existence de l’agriculture. Je l’ai d’ailleurs testé lors de mon
boot camp au Kenya. L’idée n’est pas neuve: elle date du milieu des années 1970, époque où le gastroentérologue Walter L. Voegtlin soutenait que les aliments transformés causaient les problèmes digestifs de beaucoup de ses patients. Toutefois, c’est dans les années 1980 que la nutrition datant de l’âge de pierre a réellement attiré l’attention du monde médical, à la suite de la publication, par le Dr S. Boyd Eaton, d’un article sur le sujet dans le New England Journal of Medicine. Selon la théorie du Dr Eaton, nos gènes, qui déterminent nos besoins nutritionnels, auraient très peu évolué en 40 000 ans. Par conséquent, l’alimentation de l’époque paléolithique nous conviendrait parfaitement.

Du steak! Encore du steak!

La règle du régime paléolithique est assez simple: si les femmes de Cro-Magnon ne mangeaient pas d’un aliment, on ne devrait pas en consommer non plus. On élimine donc les produits laitiers et céréaliers, le sucre, les légumineuses, le sel et tous les aliments transformés. Et on remplit notre assiette de viande (maigre, si possible), de poisson, de fruits de mer, d’oeufs, de volaille, de noix, de fruits et de légumes (en excluant ceux riches en amidon, comme la pomme de terre).

Pour ce qui est des gras, on préfère les huiles naturelles, comme celles de noix de coco et d’olive. En ce qui concerne les quantités, nul besoin de calculer le nombre de calories ingurgité; il suffit d’arrêter de manger lorsqu’on est rassasiées.

L’objectif principal du régime paléo, selon ses promoteurs, est d’améliorer l’état de santé général. En proscrivant les produits transformés, il vise à prévenir les maladies dites modernes, telles que l’hypertension, le diabète, les maladies cardiovasculaires et même l’hypercholestérolémie. S’ajoutent à ces bienfaits la régularisation des fonctions intestinales et la disparition de la fatigue, qui seraient dues à l’élimination du gluten de l’alimentation.

Quant au poids, les adeptes de ce régime devraient maintenir le leur ou même mincir, parce qu’elles ingèreront moins de calories qu’auparavant (difficile de manger du poulet à tous les repas!) et qu’elles consommeront des produits frais et naturels.

L’avis des nutritionnistes

Ce régime ancestral fait néanmoins l’objet de débats. Vu le manque de recherches sur le sujet et, par conséquent, de preuves scientifiques confirmant ses bienfaits, les experts s’inquiètent.

«L’idée de retourner aux produits naturels est bonne, mais je suis totalement en désaccord avec ceux qui prônent l’élimination de deux groupes alimentaires. Sans produits laitiers ou céréaliers, les possibilités de carences en éléments nutritifs sont trop grandes», explique Guillaume Couture, nutritionniste à la Clinique Santé Mansfield, située au centre-ville de Montréal.

Pour Nathalie Jobin, codirectrice de NUTRIUM au Département de nutrition de l’Université de Montréal, le régime paléo n’a rien de nouveau. «Les régimes suivent des cycles. Ils disparaissent et reviennent sous un autre nom. Le paléolithique est la tendance du moment, sans plus.» En ce qui a trait à l’état de santé des hommes de Cro-Magnon, Mme Jobin refuse de le comparer à celui des humains modernes, ces derniers vivant beaucoup plus longtemps que leurs ancêtres. «L’industrialisation a certainement eu des effets négatifs sur les êtres humains, comme les problèmes d’obésité, mais il ne faut pas tomber dans l’autre extrême en éliminant deux groupes alimentaires. Les céréales, par exemple, fournissent une bonne quantité de fibres, sont nourrissantes et régularisent le processus digestif.»

Vu les restrictions alimentaires associées au régime paléo, les deux spécialistes sont par ailleurs d’avis qu’il est difficile de le suivre à long terme. Ils ne sont pas les seuls: dans son analyse 2012 des régimes les plus populaires, le US News & World Report l’a classé bon dernier, 24e sur 24, les experts le considérant comme ardu à respecter et monotone. «Ce régime éloigne de nombreuses personnes de leurs habitudes de vie et peut même complètement occulter le plaisir de manger», ajoute Mme Jobin. Manger est un acte social que le paléo rend parfois pénible. Le simple fait d’aller au restaurant ou chez des amis devient un casse-tête ou une source de stress. À long terme, la frustration devient telle que les gens abandonnent tout et se lancent à corps perdu dans la nourriture, ce qui est très néfaste.»

Les hommes de cro-magnon modernes

Il est difficile d’estimer le nombre d’adeptes du paléo, mais on sait qu’ils sont partout sur la planète… y compris à Hollywood. Qu’on pense à des vedettes comme Megan Fox, Jessica Biel, Miley Cyrus et Matthew McConaughey. Ce type d’alimentation attire aussi les fans du CrossFit (technique de conditionnement physique intensif combinant entre autres l’athlétisme, l’haltérophilie et la gymnastique). La raison: ils perçoivent le paléo comme un style de vie plutôt que comme un régime. «Nos ancêtres n’étaient pas assis devant un écran d’ordinateur toute la journée. C’était des chasseurs-cueilleurs, donc ils étaient très actifs», explique Julie Beaumont, copropriétaire du CrossFit de l’ouest, qui a adopté ce régime depuis plus de deux ans.

Selon Dominic Adam, propriétaire de L’Usine CrossFit de Montréal et «homme de Cro-Magnon» depuis plus de trois ans, «le CrossFit vise l’endurance et la musculation, mais aussi l’atteinte d’un bien-être général qui passe notamment par la nutrition».

Le régime paléo fait donc partie d’une démarche globale, soutiennent ses partisans. À la clé: le bonheur de se sentir en forme, un degré d’énergie stable jour après jour, la disparition des ballonnements et un sommeil de meilleure qualité.

Quant à la monotonie du régime, c’est une idée fausse, soutient Amanda Weil, gérante du magasin Lululemon de Pointe-Claire. «Il existe plusieurs livres de recettes paléo, et le Net regorge d’idées de repas, dit-elle. Pour ma part, j’ai une vie sociale très active. Ma famille et mes amis respectent mon choix et cuisinent en général des mets paléo lorsqu’ils m’invitent. Au restaurant, les menus offrent toujours quelques plats composés de viande et de légumes.» Par ailleurs, Annick Paquet, membre de L’Usine CrossFit et «femme de Cro-Magnon» depuis plus d’un an, confie que manger de cette façon est plus coûteux, les aliments frais étant plus chers que le pain et les pâtes. «Ce mode de vie demande plus d’organisation mais, comme je prépare tous mes repas à l’avance, je n’ai plus à me soucier de ce que je vais manger, ce qui réduit mes chances de tricher», conclut-elle.

Comment adapter le paléo?

Le nutritionniste Guillaume Couture déconseille ce régime. «Il est très difficile à suivre. Ceux qui décident de l’adopter doivent le faire intelligemment: il faut bien s’informer pour éviter les déficits nutritionnels qui, à long terme, peuvent engendrer des problèmes d’ostéoporose ou d’hyponatrémie (manque de sodium).» Voici ses recommandations:

1. On mange une variété de fruits et de légumes, en quantité suffisante pour s’assurer d’avoir toutes les fibres solubles et insolubles nécessaires.

2. On remplace les légumineuses, riches en protéines, en calcium et en potassium, par du foie ou des abats.

3. On s’assure d’ingérer assez de vitamine D en mangeant des poissons rosés ou du foie. Sinon, on opte pour des suppléments.

4. Comme notre corps a besoin de sodium et qu’on en perd beaucoup lorsqu’on sue, on en ajoute un peu dans nos plats, que ce soit sous forme de sauce soya ou de sel iodé.

5. On mange beaucoup de légumes-racines (carottes, panais, betteraves, etc.) pour fournir des glucides à l’organisme.

 

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Pour en apprendre plus sur le paléo au quotidien et essayer quelques recettes, visitez bitemecuisine.com.

 

 

 

 


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