Jusqu’à il y a trois ans, trouver des nuances de fards qui correspondent vraiment à ma peau a toujours été un casse-tête! Il y avait très peu de choix pour les peaux noires. Et la plupart des fonds de teint que j’essayais donnaient des reflets grisâtres à ma peau. Heureusement, j’ai fini par trouver le bon!» raconte Alexandra Mathieu, une ingénieure à la carnation d’ébène rappelant celle de la top Anok Yai. Même son de cloche pour Kim Young, une étudiante d’origine chinoise qui se réjouit de pouvoir enfin dénicher des produits de maquillage ni trop roses ni trop jaunes, même dans les pharmacies. «C’est tellement plus facile! J’applaudis aussi la représentation accrue de mon groupe ethnique dans les pubs de maquillage. Il était temps!» Ce phénomène n’est pas étranger à l’effet Fenty, consécutif à la création de Fenty Beauty by Rihanna, la gamme de maquillage de la star internationale. Dès son lancement en 2017, sa marque, qui proposait alors 40 nuances de fonds de teint, a connu un succès planétaire. Qui plus est, les plus foncées d’entre elles se sont envolées dès leur sortie – du jamais vu! Ce qui a poussé d’autres marques internationales, nichées ou locales, à élargir, voire à créer des collections répondant aux nouvelles exigences de diversité et d’inclusion. Si le concept semble nouveau, il a ses précurseurs. Des maisons telles Estée Lauder et L’Oréal Paris promeuvent activement la diversité tant dans leurs produits que dans leurs campagnes publicitaires depuis les années 2000. Et avant, il y a eu Iman, la supermodèle somalo-américaine, qui dès 1994 a créé Iman Cosmetics pour répondre aux besoins de «toutes les femmes de couleur». Et plus près de nous, M·A·C Cosmetics voyait le jour en 1984 à Toronto et bousculait les codes avec son époustouflant éventail de couleurs et sa vision inclusive de la beauté. Depuis, la marque n’a jamais cessé de faire l’éloge de la différence grâce à des collaborations avec, entre autres, RuPaul, Iris Apfel, Patrick Starrr, Daphne Guinness et… une certaine Rihanna. Elle qui en 2018 affirmait au magazine Times: «L’inclusion n’est pas une mode, c’est la façon dont je vois le monde. C’est plus que de simplement ajouter des nuances de fards à une collection, c’est tenir compte de la réalité de plein de gens partout dans le monde.»

En quête du teint parfait

Concrètement, le sentiment d’inclusion passe par le plaisir de se composer une trousse de maquillage qui nous va à la perfection. Le point de départ? «C’est le fond de teint. Le trouver, c’est comme trouver son parfum!» estime Stéphane Côté, artiste-maquilleur sénior national pour M·A·C Cosmetics.

Le secret repose sur le ton de la peau (clair, moyen ou foncé) et le sous-ton (chaud, neutre ou froid) qui transparaît sous la surface. Pour déterminer ce dernier, on observe les veines du poignet à la lumière du jour. «Si elles sont bleues, le sous-ton est froid; vertes, il est chaud, et si elles sont entre le bleu et le vert, le sous-ton est neutre», précise l’expert. En cas de doute, on peut aussi observer le contraste entre l’épiderme et une feuille blanche qu’on pose près du visage. Si la carnation semble jaune, alors, le sous-ton est chaud; si elle semble rose, il est froid. Entre les deux, il est neutre. Ces caractéristiques nous guideront au moment d’écumer les étalages des magasins ou des pharmacies – où, faut-il le préciser, le choix est nettement plus vaste qu’avant.

3, 2, 1, test!

Le meilleur moyen de tester des fonds de teint consiste à en appliquer quelques-uns le long de la mâchoire. «Comme ça, on s’assure que la teinte convient au visage et au cou. On le fait de préférence à la lumière du jour et on laisse sécher le produit 30 secondes, le temps qu’il se révèle», précise Stéphane Côté. Surtout, on évite de le tester sur le dos de la main, souvent plus pâle que le visage, surtout chez les peaux foncées. Une fois qu’on a détecté la nuance qui ne laisse aucune démarcation sur notre peau, on cherche la formule qui correspond à notre sous-ton.» La recherche est plus facile maintenant parce que de plus en plus de marques ajoutent les lettres C ou W (pour chaud ou warm), N (pour neutre ou neutral) et F ou C (pour froid ou cold) aux numéros ou aux noms de leurs fonds de teint, ou encore elles les classent par familles de tons. Pensons aux marques Estée Lauder, L’Oréal Paris, Laura Mercier, M·A·C Cosmetics, V Kosmetik, Urban Decay, Lancôme, Bobbi Brown ou encore Clinique, CoverGirl ou Dior. On est enfin prête à choisir le fini et la couvrance du fond de teint parfait pour nous? Il ne reste qu’à opter pour une version mate ou veloutée si on souhaite un rendu lisse et irréprochable, ou une version lumineuse, qui apportera de la fraîcheur et de l’éclat. «Pour évaluer la couvrance, on teste le produit sur les jointures de la main, souvent plus roses ou plus foncées que le visage. Selon l’effet souhaité, on optera pour un produit plus fluide ou plus crémeux, ajoute l’expert de M·A·C Cosmetics. Un truc: on peut aussi ajouter quelques gouttes de crème hydratante à son fond de teint pour en moduler la couvrance, et ainsi augmenter sa polyvalence toute l’année.» Un dernier détail à ne pas négliger, selon Priscilla Ono, artiste-maquilleuse internationale pour Fenty Beauty? «On choisit une formule qui convient à notre type de peau: hydratante si elle est sèche ou assoiffée, matifiante si elle est grasse ou luisante.»

Trunk Archive

Fards à la carte

Les artistes maquilleurs sont unanimes: il n’y a pas de règles strictes en matière de maquillage. Cela dit, tous s’entendent pour dire que certaines nuances flattent le teint plus que d’autres. Voici leurs couleurs de prédilection.

«On a le teint d’une Asiatique ou un teint moyennement bronzé? Les illuminateurs et les blushs rose pêche seront très flatteurs, estime Priscilla Ono. Pour les peaux métissées, autochtones et foncées au sous-ton chaud, je privilégie les tons bordeaux ou brun profond nacrés.» Quant à l’artiste-maquilleur Jean-François Casselman-Dupont, il recommande, pour les peaux noires ou foncées, «les teintes de pierre précieuse (vert émeraude, bleu saphir, rouge rubis, jaune topaze, etc.), de même que les fards métalliques dorés, bronze ou les bruns chauds. Et on évite les tons trop clairs comme le gris, le blanc et le bleu poudre, qui éteignent le teint. Si on a le teint mat (olive), tous les tons de terre iront. Bien sûr, on peut oser d’autres nuances: le secret, c’est de doser.» Enfin, Stéphane Côté suggère à celles qui ont la peau noire ou foncée au sous-ton froid, «des couleurs vibrantes, telles que le fuchsia ou le bleu électrique. D’ailleurs, plus la peau est foncée, plus on peut explorer les fards pigmentés. Sur les teints chauds des Méditerranéennes et des Latines, les tons pêche ou dorés assureront une mine resplendissante à la Jennifer Lopez. Pour les fards corail, ils illumineront le teint peu bronzé des Asiatiques.» Pour les peaux avec un sous-ton neutre, tout est permis.

Pleins feux sur la bouche

Le choix du rouge à lèvres rime avec la quête du Saint-Graal. Pour se faciliter la vie et dénicher le produit fétiche, on tient compte de son sous-ton. Bonne nouvelle: de nombreuses marques proposent des nuances dites universelles. Des exemples? Les fameux Ruby Woo, de M·A·C, Uncensored, de Fenty Beauty by Rihanna, Fire & Ice, de Revlon, 1993, d’Urban Decay, Orgasm, de Nars, 400, de Giorgio Armani Beauty, ou les sept nuances de la collection Made for All, de Maybelline New York, seyants sur quiconque. Et pour la touche finale, on suit les conseils de Jean-François Casselman-Dupont.

«Je lève mon chapeau à celles qui osent la couleur, mais elles gagneraient à ourler leur moue d’un trait de crayon à lèvres. On le choisit d’un ou deux tons plus foncés que le rouge ou lèvres (par exemple, orange brûlé pour un rouge à lèvres orangé), et on le fait fondre au doigt ou au pinceau. Ça rend le tout plus harmonieux, surtout sur les peaux métisses, autochtones et noires.»

Elle aime

Fard à joues, de V Kosmetik (22 $).

Acheter

Fond de teint hydratant longue tenue Pro Filt’r, de Fenty Beauty by Rihanna (45 $).

Acheter

Rouge à lèvres Color Sensational Made For All, de Maybelline New York (11 $).

Acheter

S.O.S. imperfections

Certaines peaux sont plus sujettes aux imperfections que d’autres. Que faire? Jean-François Casselman-Dupont nous refile ses astuces. «Les peaux métisses et noires présentent souvent une hyperpigmentation, ces taches localisées ou généralisées résultant d’une production excessive de mélanine. En plus d’une routine de soins enrichie de vitamine C ou d’acide salicylique et l’application d’une protection solaire adéquate, quelques trucs de maquillage peuvent l’atténuer. On mise sur des produits liquides ou en crème offrant une couvrance moyenne qu’on applique en fines couches, puis on retouche seulement les zones plus foncées, du bout des doigts. Pour les zones marquées par l’hyperpigmentation, on applique un correcteur de teint orangé, en le tapotant avant le fond le teint qu’on applique au doigt également, jamais au pinceau, sous peine de gâcher notre travail.» Mais que faire lorsque notre peau affiche une hypopigmentation? «Sur une peau propre et saine, on étale une base qui prolongera l’effet unifiant du fond de teint, qu’on choisira liquide ou en crème, et légèrement ou moyennement couvrante. On garde la main légère, histoire de pas ternir l’éclat du teint. On retouche les zones plus claires au besoin. Si le visage hypopigmenté montre des reflets grisâtres, on opte pour un fond de teint chaud ou légèrement doré.» Enfin, comment neutraliser l’effet luisant sur un teint mat ou asiatique? «Je recommande une base matifiante sans silicone, car ce dernier a tendance à tourner sous l’effet du sébum et à obstruer les pores. Côté fond de teint, on préfère une formule sans huile au fini mat ou semi-mat, qui limite l’excès de sébum. Puis, on dépose un léger voile de poudre matifiante. Attention cependant: trop poudrer ne ferait qu’empirer le problème! On peut aussi recourir à des feuilles matifiantes pour avoir une mine impeccable tout au long de la journée.»

Les hommes aussi

Le teint sublimé de David Beckham, les traits fardés du YouTubeur et égérie masculine de Maybelline, Manny Gutierrez, les collections de maquillage pour hommes des maisons Chanel, Givenchy, MMUK MAN et Tom Ford, sans compter les voix de plus en plus nombreuses à revendiquer une identité non genrée… Pas de doute, les codes de la masculinité changent. Certes, les hommes maquillés ne sont pas légion, mais un nombre croissant d’entre eux, déjà convertis aux soins pour la peau et à l’entretien de la barbe, se tournent vers des produits qui leur donnent bonne mine. «C’est la clé pour les apprivoiser, car l’idée de se maquiller fait encore peur à plusieurs, révèle l’artiste maquilleur et auteur Bruno Rhéaume. Je leur conseille de commencer par une crème teintée ou un fond de teint mat en poudre, qui «booste» la carnation, en plus de l’unifier. Un baume à lèvres, mat et hydratant apporte la touche finale. Quant au crayon à sourcils, il séduira les plus audacieux.» Tout comme les fards pour les yeux ou les joues, que les hommes sont plus libres que jamais d’adopter.

ELLE Aime

Hydratant teinté unisexe healthy glow, de charlotte tilbury (53$).

Acheter

Gel sourcils coiffant For Men, de Tom Tord (68$).

Acheter

Le baume à lèvres; le teint fluide teinté, le stylo à sourcils Boy, de Chanel (48$, 85$ et 53$).

Acheter