Certaines habitudes maladroites et désuètes continuent d’exister dans l’industrie de la coiffure, telles les chartes de prix genrées. Classer des coupes selon un barème binaire «pour homme» et «pour femme» peut sembler anodin pour bien des gens, mais ce geste a un impact énorme sur le bien-être de la clientèle issue de la communauté LGBTQ+. Par la campagne UNGENDERED, la coiffeuse queer et fondatrice du salon APART Studio, MJ Déziel, souhaite apporter un vent de changement dans l’industrie de la coiffure. La vidéo de la campagne, réalisée avec l’appui de Redken et de Concept JP, met en vedette des duos de tous genres et identités confondus arborant la même coupe de cheveux. Les looks, imaginés par MJ Deziel en collaboration avec Sygie Gagné, du salon La Chop, à Québec, nécessitent le même temps d’exécution, peu importe qu’ils soient portés par des personnes avec une expression de genre masculine, féminine ou androgyne.

On a rencontré MJ Déziel afin de discuter de cette campagne nécessaire plus en profondeur.

 

  1. Pouvez-vous nous raconter comment l’idée de cette campagne a germé dans votre esprit?

 

Ça faisait longtemps que j’avais envie de créer une campagne à mon image, qui allait respecter mon style et dont j’allais pouvoir orchestrer tous les aspects créatifs. Le fait de genrer les chartes de prix, dans l’industrie de la coiffure, est une habitude anodine qui est lourde de conséquences: il arrive fréquemment que certaines personnes se fassent mégenrer, et le seul fait de penser à se rendre dans un établissement de coiffure peut devenir une source d’anxiété pour elles. Ce geste a aussi une incidence sur la perception qu’on a de notre propre métier. Plusieurs artistes-coiffeurs refusent de faire des «cheveux d’hommes», car ils présument que c’est moins payant. C’est le résultat direct d’un barème mal construit, qui ne prend pas en compte de nombreuses variables – comme la complexité de certaines techniques, l’expertise du coiffeur ou de la coiffeuse et le temps d’exécution – pour facturer adéquatement les services de coiffure. Même chose quand un barbier dit qu’il ne fait pas de «coupes pour les femmes», alors qu’il veut sûrement dire qu’il ne coupe pas les cheveux longs. Il faut revoir notre vocabulaire! En plus des coupes que l’on aperçoit dans la campagne, j’ai aussi voulu briser d’autres stéréotypes en mettant de l’avant une personne avec une expression de genre féminine à ta tête rasée et une expression de genre masculine aux cheveux pastel.

 

campagne ungendered APART Studio

 

  1. En quoi l’adoption d’une charte de prix non genrée apporte un changement positif sur la clientèle, particulièrement la communauté LGBTQ+?

 

La neutralisation de la charte de prix répond directement aux problématiques de l’industrie de la coiffure, et pas seulement pour ma communauté! Il faut s’assurer que notre environnement soit inclusif et plus sécuritaire pour accueillir notre clientèle, en nous concentrant sur ce qui compte vraiment. Se rémunérer adéquatement, selon les barèmes que j’ai énoncés plus haut, nous permet aussi d’améliorer notre propre perception quant à notre métier de coiffeur et de coiffeuse.

 

  1. Sentez-vous un vent de changement dans le monde de la coiffure par rapport à l’inclusivité et à la révolution des codes genrés?

Oui, totalement! Je ne suis pas la première à avoir instauré cet ajustement, je n’ai pas inventé la roue: plusieurs coiffeurs ou coiffeuses indépendant.e.s, qui ont quitté le monde de la coiffure traditionnel, ont amorcé ce mouvement. Je sentais néanmoins qu’il était nécessaire de revisiter le sujet, parce que certains sont encore réfractaires à ces changements.

 

 

  1. Quel impact souhaitez-vous avoir avec cette campagne?

Je veux apporter des pistes de solutions. J’ai espoir que tous les salons de coiffure emboîtent le pas avec cette initiative d’inclusivité.

 

  1. Vous avez ouvert le studio APART, à Montréal, il y a deux ans. Je sais que l’inclusivité, la liberté, la conscience environnementale et l’esprit de communauté sont au cœur du salon. Qu’est-ce qui a mené à ce désir de créer un espace unique? Comment ces valeurs se traduisent-elles chez APART?

 

J’ai travaillé dans plusieurs modèles d’affaires de l’industrie afin de comprendre les bons et les mauvais coups de celle-ci. Avec mon expérience et mon bagage de connaissance, j’ai eu envie de créer mon propre espace qui regroupe mes valeurs fondamentales: créer un environnement sécuritaire pour tous, écoresponsable, qui encourage le partage et l’appartenance à une communauté créative et finalement, m’entourer de coiffeurs qualifiés qui perfectionnent leur art au quotidien. J’avais envie de donner l’opportunité à des coiffeurs indépendants d’évoluer dans un espace où la liberté d’expression règne afin d’innover et redéfinir l’industrie de demain.

 

campagne ungendered APART Studio

 

Pour prendre rendez-vous chez APART Studio:

apartstudio.co

 

Crédits de la campagne UNGENDERED:

Créatrice de la campagne & directrice artistique: MJ Déziel; Co-directrice artistique: Sygie Gagné; Productrice: Véronique Perreault; Modèles: Amélie et Céleste (Folio Society), Bastien (Dulcedo), Tyrin (System Agency) et Jack, Oona, Tasha, Noamane, Dylan et Alexe (Faces Managements); Réalisatrice, directrice de la photographie et monteuse: Helene Ha; Première assistance à la caméra: Laura Torres; Cheffe styliste: Amanda Breeze; Assistante-styliste: Shahneli Saint-Clair; Maquilleuses: Garance Mouz et Audrey Cousineau; Cheffe électricienne: Cloé Lafortune; Musique: Robert Robert (Chivi Chivi); Photographe: Jodi Heartz; Assistant photo: Renaud Lafrenière.

Lire aussi:

50 salons de coiffures que vous aimez au Québec

Les nouvelles coupes de cheveux des vedettes québécoises pour l’été

Conseils et shopping pour un cuir chevelu en santé