Nostalgiques de la ruée vers l’or, amoureux des périples automobiles ou fans de Jack Kerouac, la Route 66 appelle les mordus de voyages sur bitume. La plus célèbre voie de communication terrestre des États-Unis, surnommée Mother Road ou Main Street USA, a ouvert pour la première fois le chemin vers l’Ouest, de Chicago à Los Angeles.

Et même si elle a été officiellement déclassée en 1985, la «route mère» suscite toujours autant d’engouement. En témoignent les milliers de touristes venus des quatre coins du monde qui l’arpentent bon an, mal an. «On produit en moyenne 500 tracés personnalisés (TripTik) pour la route 66 chaque année», estime Cédric Essiminy, de CAA-Québec.

Inaugurée en 1926, la 66 traverse trois fuseaux horaires et huit États: l’Illinois, le Missouri, le Kansas, l’Oklahoma, le Texas, le Nouveau-Mexique, l’Arizona et la Californie. Elle est longue de quelque 3670 kilomètres, et on la parcourt en entier ou par tronçons, selon notre intérêt pour elle et la durée de nos vacances. Désormais classée route historique, elle est ponctuée de panneaux brun et blanc qui nous guident sur les traces de la ruée vers l’or.

Get your kicks on Route 66…

On sillonne en général la 66 d’est en ouest, pour respecter l’histoire et suivre les traces des colons américains. Le trajet commence à Chicago, bastion d’Al Capone, mais on entre véritablement dans l’ambiance de la route mère en sirotant un lait frappé aux fraises au Polk-a-Dot Drive In, à Braidwood, en Illinois.

Springfield, capitale de l’État et ville d’adoption du 16e président américain, Abraham Lincoln, nous permet de plonger un siècle et demi en arrière avec son quartier préservé datant de 1850.

Direction Missouri. On traverse le fleuve Mississippi à pied sur le pont Chain of Rocks, construit en 1929 et aujourd’hui réservé aux piétons. On ne manque pas de franchir symboliquement l’arche du Jefferson National Expansion Memorial, la «porte de l’Ouest», devenu l’icône de la ville de Saint-Louis.

La Route 66 ne fait qu’un petit crochet de quelque 20 kilomètres au Kansas – mais quels 20 kilomètres! Ce passage obligé équivaut à un saut dans le passé grâce aux stations-services du début du siècle et aux édifices bariolés de publicités d’époque. On a l’impression de traverser un décor de cinéma.

Les vrais adeptes ne manqueront pas de s’arrêter au Route 66 Museum, à Clinton, en Oklahoma, pour découvrir la vie autour de la Mother Road selon les époques. Envie de goûter le fameux bœuf de l’Ouest? Le Big Texan Steak Ranch, à Amarillo, au Texas, est LA place pour s’offrir un repas gargantuesque dans une ambiance western à peine exagérée. Un conseil: travaillez votre faim en route, surtout si vous souhaitez vous attaquer au steak de 72 oz! Ensuite, procurez vous de la peinture en aérosol pour ajouter votre touche colorée à un autre incontournable d’Amarillo: l’installation artistique Cadillac Ranch, érigée en 1974.

Un arrêt s’impose dans la petite localité de Tucumcari, aux portes du Nouveau-Mexique, paradis des enseignes au néon et des hôtels kitsch. L’arrivée dans la ville marque aussi un changement de climat: l’entrée dans la zone désertique. Surnommé «la terre de l’enchantement», le Nouveau-Mexique présente un mariage unique entre les cultures espagnole et navajo. Santa Fe vaut le détour, même si la capitale de l’État a été exclue du trajet officiel de la Route 66 en 1937.

On ralentit la cadence en Arizona, à cause de la chaleur, mais aussi pour admirer la Forêt pétrifiée, le Grand Canyon et d’autres paysages plus grands que nature. Juste avant d’entrer en Californie, on s’arrête dans la petite ville western d’Oatman pour revivre la conquête de l’Ouest avec ses cow-boys et ses tavernes typiques.

Dernière étape du périple: la Californie et l’océan Pacifique, qu’on est impatient de découvrir après les kilomètres de désert. On s’arrête au Mojave National Preserve, dans le comté de San Bernardino, et au légendaire Bagdad Café, avant de s’échouer sur la jetée de Santa Monica tandis que la route mère plonge dans l’océan.

En voiture: logistique du voyage sur la route

On met environ trois semaines pour parcourir la route 66 à un rythme agréable, à raison d’un peu moins de 200 kilomètres par jour. Pour les routards québécois qui envisagent de la parcourir, le plus simple reste de se rendre à Chicago en avion. On pourra y louer une voiture, qu’on laissera ensuite à son arrivée à Los Angeles, avant de prendre un vol de retour. Une auto climatisée n’est pas un luxe si on parcourt la Mother Road en été.

On choisit de partir avec son propre véhicule? Il faut ajouter au compteur la portion Montréal-Chicago (environ 1500 kilomètres) et, surtout, celle du retour, qui vient doubler la durée du voyage.

On fait la 66 en moto, façon Easy rider? Il faut prévoir beaucoup d’eau pour les zones désertiques et s’enduire de lotion solaire, surtout si le casque protecteur n’est pas obligatoire, comme en Arizona. On porte aussi une attention particulière aux limites de vitesse, qui varient d’un État à l’autre.

Sur la route, on ne sait pas toujours quand on s’arrêtera ni à quelle fréquence se présenteront les aires de repos. On prévoit donc une glacière dans laquelle on se garde un lunch, parfois salutaire dans les régions peu peuplées de l’Oklahoma ou du Nouveau-Mexique. Un GPS peut être utile pour retrouver sa route, de même que plusieurs applications «route 66» pour téléphones intelligents. On se munit tout de même d’une bonne vieille carte routière. Les membres du CAA peuvent demander un tracé routier personnalisé.

On a tendance à croire, à tort, qu’un périple sur la route constitue une façon économique de voyager. Mais avec le prix de l’essence, de l’hébergement, de la location d’une voiture et des billets d’avion, la facture s’élève à coup sûr à quelques milliers de dollars.

Bons préparatifs et, surtout, bonne route!

La route 66 fait désormais aussi partie du paysage culturel américain. Plusieurs artistes s’en sont inspirés, dans des œuvres devenues aussi mythiques que la Mother Road!

Musique

  • (Get your kicks on) Route 66: chanson composée par Bobby Troup en 1946, mais popularisée par une dizaine d’artistes dont Nat King Cole, Ray Charles et les Rolling Stones.

Films

  • Easy rider a été tourné le long de la «route mère» (notamment à Flagstaff, en Arizona, et à Santa Monica, en Californie).
  • Les stations-services et les motels bon marché s’enchaînent dans Thelma & Louise, qui a la 66 pour décor.
  • Le véritable Bagdad Café, qui a inspiré le film du même nom, se trouve près du village fantôme de Bagdad (aujourd’hui disparu), le long de la Mother Road.

Livres

  • C’est son voyage à travers l’Amérique, en partie sur la Main Street USA, qui aurait inspiré Jack Kerouac pour son livre Sur la route.
  • L’intrigue des Raisins de la colère, de John Steinbeck, a la 66 comme trame de fond.

En savoir plus

  • Pour un voyage organisé sur la route 66 : CAA-Québec
  • Les USA État par État – Voyage au cœur des États-Unis d’Amérique (collectif), Lonely Planet, 2010.
  • The little road trip handbook, par Erin McHugh, Sterling, 2009.

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