Charles Ritzen est un homme imposant. Grand, pansu, avec des airs de bon vivant, il parle avec l’accent traînant du Tennessee et dégage une assurance calme, celle des gens qui ont fait fortune. Car M. Ritzen est un homme riche. Si riche, en fait, qu’il aurait pu passer sa retraite à se la couler douce sur un yacht en compagnie de sa jolie épouse, Candy. Au lieu de quoi, je le rencontre en plein milieu d’une forêt humide de la République dominicaine, habillé d’un t-shirt usé, le front trempé de sueur. C’est ici que sa femme et lui ont implanté un parcours de tyrolienne pour les touristes fans d’hébertisme aérien et un petit refuge tranquille pour les singes-écureuils. C’est ici également – et surtout – qu’ils ont construit une clinique médicale et dentaire qui soigne gratuitement les habitants des environs. Car dans ce pays où 57 000 personnes environ vivent avec le VIH, l’accès aux soins de santé est difficile, surtout pour les plus démunis. «Au début, on arrachait les dents à l’arrière d’une camionnette », se rappelle Charles Ritzen. Aujourd’hui, son dispensaire a évolué: il est propre, mieux équipé (!) et bénéficie de l’aide bénévole de dentistes et de médecins américains, qui y séjournent régulièrement.

Pour que le projet soit viable à long terme, M. Ritzen a décidé que son hôpital de fortune ne se contenterait pas de dons, mais qu’il deviendrait autosuffisant grâce aux profits générés par ses attractions touristiques. C’est ainsi que je me suis retrouvée là, casquée, gantée et harnachée, sur le point de m’élancer dans le vide pour survoler la cime des arbres: j’étais venue y tâter la tyrolienne. Avant de sauter (solidement retenue par des câbles, mais quand même!), j’ai eu un pincement au coeur en pensant au roman que j’avais espéré lire sur la plage, un mojito à la main. Mais la lecture et le bronzage n’étaient pas précisément au menu de ce séjour à Puerto Plata…

 

Un parfum de renaissance

Longtemps, Puerto Plata n’a été qu’un parc à touristes: construite pour les besoins des complexes hôteliers venus s’enraciner sur ses plages de sable fin, elle ne vivait que par et pour les étrangers. Puis, son étoile a pâli au profit de celle de sa rivale, Punta Cana, et sa réputation a décliné. Durant des années, il régnait un parfum de stupre et de luxure dans certaines municipalités de la région, comme Cabarete et Sosúa: la prostitution y était courante, et de nombreux motards québécois y avaient élu domicile pour passer leurs vieux jours sous le soleil caribéen.

Aujourd’hui, Puerto Plata veut tourner la page. Ses infrastructures ont été rénovées, une police spécifiquement destinée à protéger les touristes a été créée, et un programme (appelé ZONE BRANCHÉE) a été mis sur pied, en partenariat avec le voyagiste Nolitours. L’idée derrière tout ça? Convaincre les voyageurs de s’aventurer hors des remparts de leur tout compris, pour voir la République Dominicaine autrement. Sorties sportives, expéditions, restos, bars… les commerçants locaux offrent maintenant une multitude d’activités – à des tarifs préférentiels – aux clients des hôtels environnants. Voilà pourquoi je me suis retrouvée suspendue sur une corde raide dans la MONKEY JUNGLE de Charles Ritzen, où j’ai pu à la fois faire un doigt d’honneur aux lois de la gravité et tendre une épaule accueillante aux tout petits singes qui souhaitaient s’y percher.

La plus belle évidence que les choses sont en train de changer à Puerto Plata? On l’aura en se baladant sur EL MALECÓN, une agréable promenade dallée qui borde la mer et s’étend sur plus de 6 km. Entourée de bouibouis, surmontée au loin par le vertigineux mont ISABEL DE TORRES (on peut d’ailleurs se rendre à son sommet en empruntant un téléphérique qui monte presque à la verticale!), ponctuée par le FORT SAN FELIPE (le plus vieil édifice de la région), la route traverse la ville de part en part, mais surtout, elle invite à la fête. Les fins de semaine, des vendeurs de rue s’y installent pour écouler leur bazar, tandis que les boîtes de nuit des environs y déversent du mérengué à plein volume. De quoi donner envie de frayer avec la culture locale!

Le renouveau culinaire

Un soir, à Puerto Plata, le groupe dont je fais partie saute dans un autobus nolisé qui nous amène sur les hauteurs de la ville, dans un quartier résidentiel aux demeures cossues. À l’arrivée, on s’arrête devant une maison aussi bourgeoise que les autres, et surprise! on découvre un resto chic dans ce qui avait dû être un salon privé. Nous venons d’atterrir à MARES, la dernière adresse du réputé chef Rafael Vásquez Heinsen. Dans le jardin qui exhale des effluves de fleurs, une grande table a été dressée pour nous à côté de la piscine turquoise. Sous la lumière des guirlandes qui illuminent doucement la nuit dominicaine, je goûterai ce soir-là à du homard fraîchement pêché et flambé au Ricard, à une crème de courge parfumée à la cardamome, à des sushis à la banane plantain… Assez pour me faire oublier tous les préjugés que j’aurais pu avoir au sujet de la cuisine caribéenne!

Ce n’est pas la dernière fois du séjour que je dégusterai une nourriture qui n’a rien à voir avec les traditionnels buffets d’hôtel. Le soir avant notre départ, nous recevons une consigne précise: nous rendre sur la plage d’EL PUEBLITO masqués et vêtus en blanc de pied en cap. Comme New York, Londres, Paris ou Montréal, Puerto Plata organise sa propre version des dîners en blanc – sauf qu’ici le party a lieu tous les mercredis, et non pas une fois par année, question de faire la fête plus souvent. Sur la plage, l’ambiance est surréaliste, presque fellinienne: des tables recouvertes de nappes et de verrerie surgissent au milieu de nulle part, tandis que les convives – sortes de fantômes blancs – se promènent entre les étalages de nourriture. Un banquet grisant, inattendu, qui se poursuivra jusque tard dans la nuit, et qui est à l’image de la nouvelle Puerto Plata: une destination qui a beaucoup plus à offrir qu’une mer bleue et un soleil de plomb.

Des vacances responsables!

Ils s’appellent Rafael, Ramón, Dionely, Selena, Miladi… Des gamins curieux, dégourdis, pas timides pour deux sous, qui s’intéressent à mon appareil photo ou qui se baladent avec un cliché de Justin Bieber autour du cou, telle une relique… Je les rencontre alors que je passe un après-midi dans le SOS VILLAGES D’ENFANTS de Santiago de los Caballeros, une grande ville industrielle du nord du pays. Ils sont 150 à vivre ici en permanence, dans des maisonnettes joyeusement bariolées où ils sont supervisés nuit et jour par une mère adoptive.

Créée en 1949, l’association caritative qui les héberge se donne pour mission d’offrir un toit et une (vraie) enfance à des bambins orphelins ou abandonnés dans 132 pays. En République, où 40% de la population vit sous le seuil de la pauvreté, il y a fort à faire… L’organisme est soutenu entre autres par Air Transat, qui tente de contribuer de cette façon au mieux-être des enfants dans ses pays de destination. Quand on sait que les profits d’un voyage tout compris dans un pays pauvre reviennent trop souvent aux voyagistes de pays riches, on comprend l’impératif de trouver des formes de retombées pour les populations locales. Signe des temps, Nolitours vient d’ajouter un volet communautaire au programme Zone Branchée: les voyageurs peuvent se porter volontaires pour faire des emplettes et cuisiner un repas pour les fillettes du refuge CASA ALBERGUE DE MARTINA, ou alors, ils peuvent consacrer quelques heures de leurs vacances à effectuer des travaux communautaires.

Carnet d’adresses de Puerto Plata

À 3 heures 30 de Montréal (vol direct).

QUAND À l’année longue, mais la saison haute dure de décembre à avril.
À FAIRE Essayer la plongée en apnée à Sosúa; profiter des vents du large pour faire du kitesurfing, à Cabarete; explorer le parc aquatique Ocean World avec les enfants, nager avec des requins et batifoler avec des lions de mer.
SORTIR Au bar Hemingway, au Señor Rock ou au Coco Bongo, sur la Playa Dorada.
MANGER au restaurant LAX à Cabarete, les pieds dans le sable; pour les nostalgiques, le petit troquet Hispaniola, tenu par un Québécois sur la plage d’El Pueblito, sert de la poutine.
INFO zonebranchee.nolitours.com. L’onglet Zone sociale présente des courts métrages informatifs sur les activités comprises dans le programme (en anglais seulement).




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