Il caracole au sommet des palmarès, accumule les Victoires de la musique et magnétise les foules dans ses spectacles qui font salle comble. Racine carrée, son plus récent album, a dépassé le cap du 1,5 million d’exemplaires vendus (dont plus de 40 000 au Canada). Pourtant, sur papier, ce grand timide, fils spirituel de Brel et de MC Solaar, n’avait rien pour devenir la grande star européenne de l’heure.

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Stromae, Paul Van Haver de son vrai nom, grandit dans une modeste banlieue de Bruxelles. Il est élevé, avec ses quatre frères et soeur, par une mère de famille monoparentale. Il fait ses débuts dans le rap à 15 ans et adopte du coup le pseudonyme de Stromae (maestro, en verlan). Trois ans plus tard, il forme avec un de ses copains son premier groupe, Suspicion, qui ne parvient malheureusement pas à connaître le succès. À l’époque, il chante «Faut que t’arrêtes le rap» dans une chanson aux allures prémonitoires. Viennent ensuite les petits boulots et enfin, en 2010, un premier hit, Alors on danse, qui embrase dans le temps de le dire la Belgique, l’Europe et le monde. Le tube est même remixé par Kanye West, puis par Will.I.Am, des Black Eyed Peas.

Pop-star malgré lui, ce grand dandy androgyne, mi-Belge mi-Rwandais, fait danser la planète (et en français, s’il vous plaît) avec son pétillant premier album, Cheese. Son successeur, l’excellent Racine carrée, qui paraît en 2013, vient confirmer que le phénomène Stromae n’est pas qu’une étincelle. L’an dernier, en France, Stromae a vendu plus d’albums que Daft Punk, lauréat de plusieurs Grammys. Même le New York Times et The Guardian lui ont consacré des articles élogieux.

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Ultime consécration, l’élégant jeune homme, qui a fait des polos imprimés et du noeud papillon sa marque de commerce, s’apprête à faire son entrée au musée Grévin, à Paris, d’ici la fin de l’année. «J’avoue que c’est probablement le truc le plus dingue qui me soit arrivé depuis le début de ma carrière, raconte-t-il au téléphone depuis la Ville Lumière. Au début, je croyais à une blague. Je regardais le phénomène de haut, j’avais plein de préjugés. Mais quand j’ai vu le sérieux que le personnel du musée y mettait, j’ai changé d’avis. On a même envoyé un dentiste prendre l’empreinte de mes dents! Et puis, le musée a accepté de modeler ma statue sur le personnage du vidéoclip de Papaoutai, qui avait déjà l’air d’une poupée de cire; alors, ça va!»

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Sous son image flamboyante et colorée se cache presque toujours un propos sérieux. En témoigne justement Papaoutai, une réflexion douce-amère sur l’absence de son père, coureur de jupons notoire, que le jeune homme n’a vu qu’une vingtaine de fois dans sa vie et qui est disparu tragiquement durant le génocide rwandais. «Je ne cherche pas à faire des chansons à caractère social, je me contente de parler de ce que je vois autour de moi, de traiter de la réalité. La vie est parfois belle, parfois moche, et mes chansons le sont aussi!»

Le Québec n’échappe pas à la Stromae-mania. «Le Belge le plus connu dans le monde, devant Tintin et le Manneken-Pis», dixit Le Figaro, offrira bientôt non pas un, mais deux spectacles au Centre Bell. C’est un des rares artistes francophones qui peuvent se vanter de remplir le temple du hockey. «J’ai fait bien des salles importantes en Europe, mais j’avoue que je n’y croyais pas lorsqu’on m’a annoncé que je faisais le Centre Bell, dit le chanteur aux yeux gris-vert. C’est toujours un défi de chanter devant de si grandes foules, car je veux garder la proximité avec le public.»

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Arrêt sur image

Et sur le plan de la proximité, difficile de faire mieux que lui avec ses clips qui font sensation sur Internet. Pensons à Formidable, où on le voit apparemment complètement soul, titubant dans les rues de Bruxelles en beuglant sa chanson à tue-tête (une pièce qu’il a d’ailleurs reprise à capella dans le métro de Montréal en 2013 pour l’émission En mode Salvail). Ou encore, dans Tous les mêmes, où il présente simultanément ses côtés féminin et masculin à l’aide d’un maquillage hallucinant.

L’image est une partie importante de la proposition artistique du jeune homme. «C’est vrai, mais le visuel ne sera jamais aussi important que la musique, affirme-t-il. Pour moi, ce sont des éléments qui gravitent autour de ce que je fais, mais que je délègue avec plaisir à d’autres. Ce n’est pas mon genre d’aller faire le beau en prétendant que je fais tout. Je suis entouré de stylistes, de chorégraphes et de réalisateurs de grand talent. C’est un travail d’équipe.»

Modeste, le Stromae. Dites-lui qu’il a su dépoussiérer la chanson française ou qu’il est une des voix les plus fortes de sa génération, et il vous répondra avec un soupir un peu gêné: «C’est gentil, mais c’est un peu lourd à porter, vous ne trouvez pas? J’ai simplement le point de vue d’un mec de 29 ans, alors forcément, celui de ma génération.»

À quoi peut-on s’attendre de ses concerts au Centre Bell qui promettent d’être le clou des FrancoFolies? «Je chante, je danse, je fais le clown, répond l’artiste haut en couleur. Je veux divertir les gens, les rassembler, leur faire passer un bon moment. Oui, je veux les faire sourire, mais je veux aussi les faire pleurer, voire leur faire peur.»

On se prépare à une forte dose d’émotions.

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