Les artistes et le vedettariat, Catherine Pogonat connaît bien… Ça fait plus de 15 ans que l’animatrice suit la carrière des personnalités du milieu artistique québécois, qu’elle assiste à leurs balbutiements, à leurs succès et à leurs flops. «J’en ai vu plusieurs passer du statut d’inconnu à celui de vedette… et changer, explique-t-elle. Pas forcément en mal, mais quand les gens deviennent connus, ils adoptent une autre attitude en public. Ils sont plus conscients de leur image.»

«C’est ce qui m’a donné l’idée de faire un documentaire, dit-elle. Je voulais aborder le thème de la célébrité sous l’angle humain, psychologique.»

Dans la série radiophonique Sous les étoiles, l’animatrice s’est entretenue avec 15 vedettes québécoises sur divers thèmes liés à la célébrité: les enfants-vedettes, les revers de la notoriété, l’influence de la téléréalité et des réseaux sociaux dans la vie des personnalités publiques, etc. Elle nous explique ce qu’elle en a retenu.

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Vous dites que les gens changent en devenant célèbres… Et comment! J’ai suivi la carrière de nombreux artistes et je les ai vus évoluer au fil des succès. Que ce soit les membres de Loco Locass, Ariane Moffatt ou Yann Perreau, ils ne sont plus les mêmes qu’à leurs débuts… L’exemple de Daniel Boucher m’a particulièrement marquée. À l’époque du lancement de son album Dix mille matins, il venait à CIBL jouer ses chansons live, avec sa guitare. Il n’était pas encore connu. Puis, il a gagné à l’ADISQ, il a joué Ma gang de malades devant 1,5 million de téléspectateurs, et le lendemain, c’était une vedette. Ç’a été un choc pour lui, et ça l’aurait été pour n’importe qui d’autre. Quand tu deviens célèbre, les gens ne t’abordent plus de la même façon et tu te fais cruiser par des filles parce que tu es connu. Sans compter que tu deviens hyper-conscient de ton image et que tu te mets une pression incroyable sur les épaules pour performer. Tout ça a été très dur pour Daniel…

Aujourd’hui, on dirait que tout le monde veut être célèbre… Qu’est-ce que ça apporte de si extraordinaire? La célébrité est avant tout une drogue. C’est ce qui ressort de toutes les entrevues que j’ai faites. Son côté bénéfique, c’est la dose d’amour qu’elle apporte. Michèle Richard l’exprime très bien: «Il n’y a aucun “je t’aime” d’un homme qui peut accoter 15 000 personnes qui te crient leur amour dans un aréna!» C’est une phrase qui m’a vraiment frappée, parce que ça veut dire que la vedette sabote forcément sa vie amoureuse.

Cet amour du public est également un formidable baume sur les blessures de la vie. Car les stars sont comme tout le monde: elles traversent des moments difficiles, des séparations, des maladies, des passages à vide sur le plan professionnel… Et là, c’est le soutien des fans qui fait toute la différence, m’ont confié Julie Snyder, Véronique Cloutier et aussi Claude Dubois. Le hic avec la célébrité est le même qu’avec toute drogue: ceux qui y sont accros veulent toujours que le high soit plus fort. Comme me l’ont dit Véronique Cloutier et Xavier Dolan, cette quête de la reconnaissance du public est sans fin, les vedettes courent toujours après.

Après la diffusion de la télésérie américaine Gilmore Girls, Yanic Truesdale est devenu une grosse vedette à Hollywood. Il évoque les immenses privilèges auxquels il a eu droit… C’est vrai que le traitement des stars à Hollywood est impressionnant. Je savais qu’elles avaient des faveurs, mais pas à ce point! Visiblement, elles ne font pas la file avec tout le monde à l’aéroport, elles ont des chambres privées à l’hôpital, etc. Ceci dit, nos vedettes québécoises aussi bénéficient de bien des privilèges. Xavier Dolan confiait qu’un jour, à New York, il a fait un caprice et a demandé à aller voir les bureaux de Vogue. Eh bien, il les a visités!

Côtoyer les plus grands réalisateurs à Cannes, porter des beaux vêtements, dormir dans des chambres d’hôtel luxueuses, avoir les meilleures tables au resto, se faire offrir des verres dans les bars… C’est une vie vraiment plus facile!

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Mais il y a aussi le revers de la médaille… L’aspect le plus sombre de la célébrité, c’est la grande insécurité que ressentent les artistes quand ils ne sont plus sur scène. C’est une insécurité quasi maladive, accompagnée d’un immense sentiment de solitude – notamment quand la vedette se retrouve toute seule dans sa chambre d’hôtel après avoir performé devant 10 000 personnes en délire.

Mais le pire, à mon avis, c’est le doute. Imagine que tu sois une musicienne qui tripe dans ton sous-sol. Tu lances ton premier album, et bang! C’est le gros succès! Bonne chance pour le deuxième album! Là, tu te mets une immense pression sur les épaules pour être à la hauteur de ce succès. Tu veux être la plus belle, la plus fine, la plus talentueuse..

La célébrité vient avec beaucoup de privilèges, mais elle génère aussi beaucoup d’angoisse et exige des sacrifices. Quelles sont les personnalités les mieux armées pour faire face à tout ça? Certaines personnes sont plus solides que d’autres, mais toutes ont besoin de leur entourage pour les aider. Ça, toutes les vedettes me l’ont dit, et des psychologues me l’ont confirmé. Un bon entourage, c’est des personnes qui te remettent les pieds sur terre. Une blonde, une amie ou un frère qui ne contribuent pas à t’enfler la tête et qui ne te disent pas, comme les autres, que tu es le plus beau et le plus extraordinaire. C’est aussi des gens qui calment tes angoisses et qui te font relativiser les choses, que ce soit un succès ou une mauvaise passe.

L’âge y est pour beaucoup, aussi. On pense généralement que les personnes devenues célèbres dès l’enfance vont être les plus déséquilibrées. C’est faux. L’adolescence est le moment le plus critique pour devenir une star, car les ados sont particulièrement fragiles et se cherchent encore. Ils ont aussi tendance à s’éloigner de leurs parents, mais sans encore avoir de personnes solides dans leur entourage. Et ils ont moins de recul que les adultes face à la vie, aux critiques et aux méchancetés qui leur sont adressées.

Ç’a d’ailleurs été le passage le plus difficile pour Mahée Paiement et Bianca Gervais. À 15 ans, cette dernière trouvait très dur de passer des auditions sans obtenir de rôle, car ça lui faisait vivre un sentiment de rejet. Elle dit que, à 28 ans, elle commence à peine à avoir confiance en elle.

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Qu’est-ce que les réseaux sociaux ont changé à la célébrité? Presque tout! Les Xavier Dolan, Coeur de pirate et les autres jeunes vedettes ont un tout autre rapport à la célébrité que les générations qui les précèdent. Alors que Michèle Richard et René Simard mesurent leur cote d’amour en se fiant aux témoignages des gens dans la rue et au nombre de billets qu’ils vendent, les jeunes artistes prennent le pouls de leur notoriété sur les réseaux sociaux.

Facebook, Twitter, etc. permettent un contact direct avec le public. Cette proximité-là donne lieu à une relation presque bipolaire: l’artiste reçoit des marques d’amour à la minute, mais aussi des claques à la minute. C’est une espèce de baromètre d’amour permanent. De quoi devenir pas mal compulsif et anxieux…

Qu’est-ce qui caractérise la célébrité d’aujourd’hui? C’est la proximité. Avec Loft Story, Star Académie et toutes les autres téléréalités, monsieur et madame Tout-le-monde deviennent aussi des vedettes. Un rapprochement s’est fait entre le public et les célébrités. On cherche de plus en plus des vedettes qui nous ressemblent. Avant, les stars avaient une dimension héroïque ou mythique, elles accomplissaient des choses qu’on était incapables d’égaler. Aujourd’hui, on veut qu’elles nous représentent, en version un peu plus glamour. On cherche plus un reflet de nous-mêmes que des modèles.

Est-ce que votre regard sur la célébrité a changé après cette série d’émissions? Encore plus qu’avant. Je trouve que les stars sont humaines et touchantes. Quand telle actrice ou tel animateur laisse paraître les photos de son mariage en couverture d’un magazine à potins, on s’imagine que c’est avant tout pour entretenir sa célébrité. Bien sûr qu’il y a une part de stratégie derrière ça, mais je crois que l’affaire est moins calculée et plus émotive qu’on le pense. Faire la une des magazines, c’est une façon de redonner quelque chose à son public, soit l’accès à une partie de sa vie. C’est aussi une façon d’aller chercher de l’amour. Les stars en ont besoin comme tout le monde, sauf que dans leur cas, il n’y a qu’un seul moyen de l’obtenir, et c’est en s’exposant au public.

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