On sort du temps des Fêtes comme on émerge d’une transe, étonnés, sans trop se souvenir de ce qui s’est passé: coma diabétique ou coma éthylique? On ne sait plus. On a les contours de la bouche encore couverts de sucre en poudre et de miettes de beignes à l’ancienne, le foie engorgé d’alcools en tous genres et la carte de crédit dans le rouge. On consulte un calendrier et on se rend compte que oui, ça y est, on est en janvier. Une nouvelle année toute fraîche et toute propre nous accueille. Cette année est d’ailleurs beaucoup plus propre et fraîche que nous. La fête est finie.

On se lève, on enjambe les bouteilles vides et les restes du buffet de la veille, puis on s’approche d’un miroir pour constater l’étendue des dégâts causés par nos récents excès. C’est pire qu’on se l’imaginait. Soucieux de stopper notre déchéance au plus vite, on s’empare d’un stylo et d’un bout de papier, et on fait une liste de résolutions. «1. Manger mieux. 2. Boire moins. 3. Économiser.» On se sent déjà mieux. On a un plan d’action. Il ne reste plus qu’à l’appliquer.

Animés par la culpabilité plus que par une farouche conviction, on s’élance dans les rues tôt le matin, avant même que le soleil soit levé. On jogge sur les trottoirs couverts de glace noire, au mépris du danger. On a le souffle court, un point de côté, et on est serrés dans nos vêtements de sport à cause de nos 10 livres en trop. On ne se nourrit plus que de yogourt sans gras, de purée d’avocat et de graines de lin. On sabre les dépenses en n’achetant plus d’alcool, plus de vêtements, plus rien. Et après, on se demande pourquoi janvier nous déprime autant.

Le premier mois de l’année est plutôt conçu pour lire dans un fauteuil sous « Janvier est trop froid pour commencer à courir, trop gris pour arrêter de boire et trop propice aux rabais sur les vacances au soleil pour tenter d’économiser.» une couverture moelleuse en buvant de grands bols de café au lait ou pour flâner sur une plage où tout est inclus, particulièrement les margaritas et le rhum punch. Les repas de salade laitue-concombre-pas-de-vinaigrette peuvent attendre encore un peu.

Pour notre propre bien, il faut éviter de prendre des résolutions qu’on ne tiendra pas plus que celles de l’année dernière. Et lutter contre la culpabilité. Ça implique évidemment de se tenir loin du pèse- personne, de ne regarder que distraitement nos relevés de cartes de crédit et d’éviter de calculer le nombre de calories vides qu’on a ingérées pendant les Fêtes.

Bientôt, la météo sapera moins notre moral, et on pourra s’attaquer à tous les mauvais plis qu’on a pris pendant l’hiver. L’arrivée du beau temps nous donnera non seulement la motivation requise pour dresser une liste de résolutions, mais aussi l’énergie nécessaire pour la mettre à exécution. D’ici là, on peut bien s’offrir un brunch extra bacon pour se remettre de nos lendemains de veille.  

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