Louise: «Je ne m’attendais pas à discuter avec des personnes aussi ouvertes d’esprit, affirmées, autonomes et parfaitement intégrées à la société québécoise. D’ailleurs, au fil des conversations, j’ai senti s’estomper la distance que crée le voile. En même temps, il y a des choses que je ne comprends toujours pas.

«Comme le fait que ces femmes ne fassent pas le lien entre le foulard et le symbole d’oppression qu’il représente, car son port est dicté par des mouvements intégristes dans d’autres pays. Je crois à leur sincérité quand elles disent que leur décision n’a pas de lien avec cet islam politique, mais personnellement, j’aurais du mal à adhérer à une pratique imposée à d’autres femmes.

«Aussi, quand Fadoua a dit que nous avons jeté le bébé avec l’eau du bain en rejetant en bloc tout ce qui concerne le catholicisme, ça m’a fait réfléchir. Il y a peut-être effectivement un vide dans les sociétés occidentales, et beaucoup de gens manquent de repères, mais j’aurais bien du mal à revenir à une existence où la religion prend autant de place.»

Anne-Marie: «Ce qui m’a le plus frappée, c’est la grande différence entre ce que les médias nous présentent de l’islam et la vision qu’en ont ces femmes. Alors qu’on n’entend parler que d’un islam misogyne et rétrograde, elles ne gardent que le meilleur de leur religion, et en retirent spiritualité et identité.

«J’ai changé d’avis sur un autre point. Avant, je disais que le voile représentait un frein à la liberté. Là, j’ai rencontré des personnes qui ont vraiment fait un choix personnel et qui l’assument. Dans ce sens, elles sont libres. Ça a d’ailleurs changé le regard que je porte sur les femmes voilées en général. Aujourd’hui, je crois qu’elles ne sont pas toutes pareilles. Certaines, comme Fadoua, Suad et Salam, choisissent de porter le foulard pour des raisons spirituelles et identitaires. D’autres parce que c’est ce qui se fait dans leur famille. Et d’autres encore parce qu’elles n’ont pas le choix.»

Découvrez les citations inédites de cette table ronde

Suad: «J’ai été agréablement surprise de voir que les participantes non musulmanes n’étaient pas là pour juger, mais parce qu’elles voulaient vraiment connaître la réalité des femmes voilées. Ça a donné lieu à des échanges très enrichissants! J’ai aussi mieux compris pourquoi le voile met les Québécoises de souche mal à l’aise. En fait, cette gêne est plus liée à leur valeur de liberté qu’à du racisme ou à de l’islamophobie. Elles trouvent fondamental que les femmes puissent choisir leur mode de vie. D’où le malaise par rapport au voile, qui est vu comme une obligation.»

Marie-Charles: «J’ai l’impression d’avoir « dégonflé une grosse balloune » en parlant avec Suad, Fadoua et Salam! Dans le débat actuel, il n’y a pas de nuances. Les gens s’affichent pour ou contre le voile. Mais c’est plus complexe que ça. Il s’agit surtout d’une question de foi, ce qu’on peut avoir du mal à comprendre au Québec étant donné qu’on a évacué la religion de notre vie. De plus, le catholicisme ne comporte pas de signe ostentatoire comme celui-là, d’où le malaise, sans doute… 

«Ça ne veut pas dire pour autant que je comprends vraiment les raisons qui poussent à mettre le voile, mais j’accepte que ces femmes soient différentes de moi, tout au moins sur le plan religieux. Sinon, ce sont des filles modernes, qui ont plein de choses à dire et qui s’impliquent dans la société.»

Fadoua: «J’ai compris à quel point les échanges de ce type importent! Parce que finalement, les Québécois de souche connaissent très mal les musulmans; et c’est d’autant plus compliqué que ceux-ci proviennent de différents pays dans lesquels on retrouve des cultures et des pratiques religieuses diverses. Et je ne dis pas que c’est seulement aux autres de se rapprocher. Au contraire! Je crois que les musulmans doivent aussi fournir des efforts individuels et collectifs pour mieux se faire comprendre et sortir des clichés véhiculés par les médias.

Qui sont les femmes qui ont participé à la table ronde?

«Grâce à cette discussion, j’ai également constaté à quel point les Québécois de souche rejettent la religion et que ça date de bien avant l’arrivée des musulmans. Et s’ils éprouvent un tel malaise par rapport au voile, c’est parce qu’ils ont sorti la religion de leur vie, alors ils ne veulent plus la voir, y compris chez des personnes d’autres confessions.»

Salam: «Cette table ronde m’a confirmé le besoin social de communication. Je ne pense pas les Québécois de souche racistes; je les crois curieux. Et il est de la responsabilité des musulmans de ne pas se replier sur eux-mêmes et de dialoguer avec les gens pour expliquer qui ils sont.»

 

LE VOILE, PARLONS-EN!
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