Dans l’atelier de Marie Saint Pierre, l’effervescence est palpable. Le chef d’orchestre Yannick Nézet-Séguin est présent pour les essayages. Devant le miroir, il admire la chemise longue qu’il porte par-dessus un pantalon. L’ensemble ébène a été coupé selon ses mensurations, comme celui des 89 autres musiciens d’ailleurs. Du sur-mesure pur luxe pour une formation qui s’envole fin novembre en tournée européenne, de Cologne à Hambourg en passant par Amsterdam et Paris. Marie Saint Pierre s’affaire sur sa création et laisse libre cours à son imagination débordante. Elle propose à Yannick Nézet-Séguin de coudre une bande blanche sur la patte de boutonnage, et l’idée semble l’emballer. Après tout, il faut bien différencier le chef du reste de l’orchestre. «On parle le même langage, Marie et moi, assure-t-il. J’imagine déjà l’effet de choc lorsqu’on va débarquer sur la scène parisienne habillés de cette façon par la meilleure créatrice québécoise. Ce sera un moment de grande fierté!» Entre la designer et le chef d’orchestre, l’entente est au beau fixe. Il faut dire que, dans leur milieu respectif, ils incarnent chacun une certaine modernité… et ils ne tarissent d’ailleurs pas d’éloges l’un pour l’autre! «Avec l’Orchestre Métropolitain, on est dans les hautes sphères de la musique, et je souhaite que ça se traduise à travers les vêtements et la qualité des matières, explique Marie Saint Pierre, mélomane avertie. Ç’a été un grand honneur et une belle expérience d’habiller les membres de la troupe en leur offrant un uniforme confortable et adapté aux exigences de leur instrument.»

Marie Saint Pierre Orchestre Métropolitain

Photographe: Marie Saint Pierre

Quand elle a été approchée par le Métropolitain, la créatrice s’est tout d’abord intéressée aux musiciennes, en concevant une longue robe légère en résille et techno jersey qui répond aux critères de tournée: une pièce infroissable qui respire bien, se lave facilement et sèche rapidement. Sans oublier de prendre en compte les réalités du métier: les violonistes ont besoin de bouger les bras aisément, les contrebassistes, de pouvoir écarter les jambes. L’idée d’habiller le reste de l’orchestre a ensuite germé d’elle-même, avec l’appui financier du Collège LaSalle. Pour les hommes, Marie Saint Pierre a créé deux chemises – l’une de coupe ample, l’autre ajustée – en double jersey (un tissu confortable et facile d’entretien), à enfiler par-dessus un pantalon chic, sans bouton ni braguette. Le tout est accessoirisé de deux nœuds papillon au choix et de chaussures offertes par la griffe montréalaise Aldo. Le look détonne lorsqu’on pense à l’habituelle tenue formelle d’un orchestre symphonique. «J’ai occulté le veston traditionnel pour permettre aux musiciens de jouer dans l’aisance, précise la designer. D’ailleurs, certaines femmes ont choisi de porter l’habit masculin. Que Yannick ait été d’accord et que son équipe ait été emballée dès le départ, ç’a été fantastique.» Et c’est aussi une belle façon de célébrer les 30 ans de la Maison Marie Saint Pierre!