Nous ne les voyons pas, mais elles sont là. À la surface de notre peau grouillent en effet mille milliards de bactéries. L’industrie cosmétique a longtemps tenté de les exterminer – que ce soit à l’aide de gels antiseptiques, de lotions astringentes ou de peelings chimiques -, mais voilà qu’elle leur fait les yeux doux. Certains fabricants vont même jusqu’à en ajouter de façon délibérée à leurs formules!

«Notre épiderme abrite plus de 500 espèces bactériennes, de même que des levures et des champignons», affirme Richard Martin, chef des technologies émergentes chez L’Oréal. «Ensemble, ces petites bestioles forment ce qu’on appelle le microbiote cutané. Certaines d’entre elles sont nuisibles, mais la plupart sont bénéfiques, et ce sont celles-ci qui nous intéressent.»

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En effet, elles jouent un rôle essentiel dans le maintien d’une peau saine. Le microbiote cutané constitue une barrière qui nous protège contre les infections et l’inflammation, comme notre flore intestinale nous aide à lutter contre certaines maladies. Quelques bactéries auraient même un pouvoir antioxydant. Toutefois, la flore cutanée, à l’instar de la flore intestinale, peut souffrir d’un déséquilibre. «Pour tuer les vilaines bactéries, on a parfois recours à des antibiotiques et à des savons astringents, mais ces produits détruisent du même coup les bons microorganismes», indique Patrick D. Paquette, président de l’Association des microbiologistes du Québec. Nous devenons alors plus vulnérables aux agents pathogènes, notamment aux staphylocoques, qui sont à l’origine de nombreux problèmes de peau, comme l’impétigo. Les frottements répétés, les gommages trop abrasifs, les rigueurs du climat, les fluctuations hormonales et les agents de conservation contenus dans certains cosmétiques peuvent eux aussi perturber notre microbiote cutané.

L’ère de la beauté microbio

Pour prévenir un tel déséquilibre, les produits peuvent agir sur deux fronts. «Il est notamment possible de favoriser la croissance des microorganismes bénéfiques pour l’épiderme en leur procurant des compléments nutritionnels», indique Richard Martin. Le nouveau Lipikar Baume AP, que La Roche-Posay a lancé l’automne dernier, contient par exemple du mannose, une forme de sucre dont raffolent nos bonnes bactéries. En plus du mannose, ce soin compte des extraits de bactéries parmi ses ingrédients actifs (voir ELLE AIME). Même principe pour le Baume relipidant XeraCalm A.D, d’Avène. Après des années de recherches, les chercheurs de cette marque ont découvert que les propriétés antiinflammatoires et apaisantes de l’eau thermale d’Avène ne provenaient pas uniquement des minéraux qu’elle contient, mais aussi d’un microorganisme qui n’appartient qu’à elle seule: Aquaphilus dolomiae. «À l’aide de manipulations biotechnologiques, nous avons sélectionné les meilleures substances actives de cette bactérie, puis nous les avons ajoutées aux produits de la gamme», raconte Anne Laure Nguyen Huy Lai, directrice de la stratégie et du développement marketing d’Avène. «C’est un peu comme si nous avions utilisé de l’huile essentielle de menthe plutôt que de simplement mélanger des feuilles de menthe broyées avec de l’eau. On ne prend que ce qui nous intéresse à l’intérieur du microorganisme, et c’est beaucoup plus efficace!»

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Fort bien, mais les innovations intégrant des bactéries sont-elles sans danger? «Tous nos composants actifs sont soumis à des études toxicologiques extrêmement poussées, répond Mme Nguyen Huy Lai. Et après avoir démontré qu’ils étaient très bien tolérés par la peau, on doit prouver l’efficacité de nos produits et les soumettre à des études cliniques très exigeantes.» Contrairement à beaucoup d’autres soins, qui sont habituellement testés sur quelques dizaines de volontaires, la gamme XeraCalm A.D a été testée sur 1288 patients, et les résultats ont fait l’objet d’une publication dans le numéro de juillet du réputé British Journal of Dermatology. De quoi convaincre les plus dédaigneuses d’entre nous!

À chacun ses microbes

La composition du microbiote de chaque être humain est influencée par différents facteurs: l’âge, le sexe, l’environnement, etc. «Il y a autant de microbiotes qu’il y a d’individus», affirme Patrick D. Paquette, président de l’Association des microbiologistes du Québec. «En fait, notre signature microbienne est aussi unique que notre profil ADN! C’est d’ailleurs pour cette raison que deux personnes soumises aux mêmes perturbations, par exemple un traitement aux antibiotiques, peuvent avoir des réactions différentes.»  

5 précautions belle peau

1. Éviter les nettoyants astringents, comme ceux qui sont à base d’acide salicylique.

2. Privilégier les soins qui respectent le pH de l’épiderme. Rappelons qu’une peau saine a un pH légèrement acide, soit autour de 5.

3. Choisir des produits qui contiennent peu ou pas d’agents de conservation.

Bon à savoir: plus un contenant est petit, moins il renferme d’agents de conservation.

4. Utiliser, pour se laver, une eau tiède (entre 32 °C et 34 °C), car l’eau très chaude perturbe la flore cutanée.

5. Se nettoyer les mains avec un savon doux plutôt qu’avec un gel antibactérien

 

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ELLE AIME

1. Sérum Advanced Night Repair Complexe de réparation synchronisée II, d’Estée Lauder (72 $).Ce soin enrichi de bifidus et de lactobacillus (deux bactéries présentes dans certains yogourts) renforce la barrière cutanée, tout en favorisant le processus de réparation naturel de la peau.

2. Lipikar Baume AP , de La Roche-Posay (25 $). En plus du mannose, un sucre qui contribue à la croissance de nos bonnes bactéries, cette version améliorée du classique baume AP contient un mélange d’eau thermale et de la bactérie Vitreoscilla filiformis, très efficace pour traiter la dermatite atopique, un problème qui affecte plus de deux millions de Canadiens!

3. Démaquillant douceur, de Lierac (29 $). Grâce aux lactobacilles qu’elle renferme, cette eau micellaire enlève les résidus de fards sans perturber la flore cutanée.

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